- 1. Un viol systémique documenté
- 2. Des crimes passés sous silence
- 3. Une survivante devenue témoin clé
- 4. Le réseau SEMA, mémoire vivante
- 5. Torture, électrocution, humiliation
- 6. Un système sans justice
1. Un viol systémique documenté
Depuis 2022, au moins 376 cas de viols commis par des soldats russes en Ukraine ont été officiellement recensés. Des femmes, des hommes, des enfants. Mais selon les experts, ce chiffre pourrait être dix fois supérieur à la réalité. Cela représenterait près de 4 000 victimes silencieuses, brisées, oubliées.
Parmi les témoignages : Halyna, 62 ans, violée avec une Kalachnikov ; Tetiana, 61 ans, violée après avoir vu son mari exécuté ; Liudmyla, 77 ans, frappée au visage avec une crosse avant d’être agressée sexuellement. Chaque histoire évoque un crime de guerre méthodique, froid, répété.

2. Des crimes passés sous silence
De nombreuses victimes refusent de témoigner. La honte, le regard du village, le sentiment d’inutilité. À quoi bon raconter l’indicible si le monde cherche déjà à négocier la paix sans justice ?
Pour Alisa Kovalenko, réalisatrice et survivante, ce silence est une seconde violence. « Ce n’est pas seulement la victime qu’on détruit. Ce sont les liens familiaux, la dignité, l’identité. »
3. Une survivante devenue témoin clé
Alisa Kovalenko, 37 ans, est l’une des premières à avoir témoigné en 2020. Enlevée en 2014 par des soldats pro-russes, elle a été accusée d’être snipériste, battue, menacée, et finalement violée après avoir été forcée de se déshabiller.
« Tu te sens comme un animal paralysé. Il nettoyait son arme devant moi. Puis il a dit : “Rien ne s’est passé.” »
Son témoignage, glaçant, est au cœur du documentaire Traces, coréalisé avec Marysia Nikitiuk, qui sortira à l’automne 2025.

4. Le réseau SEMA, mémoire vivante
C’est Iryna Dovhan, autre survivante emblématique, qui a fondé le réseau SEMA Ukraine. En 2014, elle a été violée, torturée, exposée nue dans la rue, un drapeau ukrainien autour du cou.
Grâce à elle, des dizaines de femmes ont trouvé la force de parler, dont Halyna, qui vivait seule près de Boutcha, et qui a survécu à une agression inhumaine.
« Je refuse de rester brisée. C’est ma manière de résister », dit Iryna dans le documentaire.
SEMA, qui signifie « parler » en swahili, œuvre à archiver, témoigner, résister. Même si la justice semble lointaine.
5. Torture, électrocution, humiliation
Les hommes ne sont pas épargnés. Oleksandr Gudilin, 34 ans, soldat capturé à Marioupol, raconte avoir été déshabillé, électrocuté sous une douche, battu aux reins.
« Tu n’as pas le droit de regarder les officiers. Tu es nu, debout, ils t’observent. »
À Kherson, une femme détenue pendant un an avec six autres prisonnières entendait les cris de son fils adolescent torturé dans la cellule voisine. Elle-même a subi des électrochocs, l’interdiction d’utiliser les toilettes, et des humiliations répétées.
6. Un système sans justice
La crainte aujourd’hui : que des accords de paix incluent des amnisties silencieuses, que la violence sexuelle soit ignorée au nom de la realpolitik.
Une lettre du réseau SEMA repose actuellement sur le bureau d’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU. L’objectif : faire inscrire la Russie sur la « Liste de la honte » de l’ONU, qui recense les États utilisant le viol comme arme de guerre.
« Peut-être que cela ne changera rien aujourd’hui. Peut-être que la justice viendra dans 20 ans. Mais nous devons au moins documenter. C’est le minimum », conclut Alisa Kovalenko.