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Une trentaine de personnes, dont une dizaine de membres des forces de sécurité, ont été tuées, jeudi, au Tchad, selon les autorités, lors d’affrontements opposant police et manifestants. Des centaines de personnes se sont réunies à l’appel de l’opposition contre la prolongation de deux ans de la transition par le pouvoir du président Mahamat Idriss Déby.
Haute tension au Tchad : une trentaine de personnes, dont une dizaine de membres des forces de sécurité, ont été tuées, jeudi 20 octobre, dans des affrontements opposant police et manifestants, selon le porte-parole du gouvernement tchadien.
« Une manifestation interdite s’est transformée en insurrection. Il y a eu une trentaine de morts dont une dizaine d’éléments des forces de l’ordre et plusieurs blessés. Les manifestants ont attaqué des édifices publics, le gouvernorat, le siège du parti du Premier ministre, celui du président de l’Assemblée nationale », a déclaré à l’AFP Aziz Mahamat Saleh.
Des centaines de personnes se sont réunies à l’appel de l’opposition contre la prolongation pour deux ans de la période de transition politique dirigée par Mahamat Idriss Déby.
Un journaliste de l’AFP a vu les cadavres de cinq personnes, dont deux recouvertes du drapeau national et trois de draps blancs ensanglantés, allongées sur le sol de l’hôpital situé dans le 7e arrondissement, épicentre des manifestations dans la capitale tchadienne.
La Croix-Rouge du Tchad a indiqué avoir déployé « une dizaine d’équipes » dans les arrondissements sous tension de la ville. « Nous prodiguons les premiers soins et nous acheminons des dizaines de blessés en véhicule jusqu’aux hôpitaux », a déclaré à l’AFP son président, Khalla Ahmat Senoussi.
Sollicitées par l’agence de presse, les autorités n’avaient pas réagi à la mi-journée.
Une transition de dix-huit mois… qui ne s’est pas achevée
« Des violences sont survenues ce (jeudi) matin au Tchad, avec notamment l’utilisation d’armes létales contre les manifestants, ce que la France condamne », a souligné le Quai d’Orsay dans un communiqué, affirmant que Paris ne joue « aucun rôle dans ces événements ».
Des nuages de fumée noire étaient visibles et des tirs de gaz lacrymogène se faisaient régulièrement entendre dans la capitale jeudi matin, tandis que des barricades ont été dressées dans plusieurs quartiers de la ville et que des pneus sont brûlés sur les principaux axes routiers, selon les journalistes de l’AFP à N’Djamena.
Ces affrontements se déroulent après la prolongation pour deux ans de la « transition » qui devait s’achever ce jeudi. Mais fin septembre, Mahamat Idriss Déby a finalement été maintenu à la tête de l’État jusqu’à des élections libres et démocratiques, censées se tenir à l’issue d’une deuxième période de transition et auxquelles il pourra se présenter.
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Ce maintien, à l’issue d’un Dialogue national inclusif et souverain (DNIS) boycotté par une grande partie de l’opposition, a achevé de braquer les oppositions politiques et armées. Il embarrasse aussi la communauté internationale qui avait pourtant adoubé Mahamat Idriss Déby il y a un an et demi.
Le 20 avril 2021, à l’annonce de la mort du maréchal Déby – tué par des rebelles en se rendant au front – l’armée avait proclamé son fils Mahamat Idriss Déby président de la République à la tête d’une junte de 15 généraux, pour une période de transition de 18 mois devant mener à des élections.
« On n’a pas vu de changement positif dans notre pays »
La manifestation avait été interdite mercredi par les autorités.
« Je suis sorti manifester pour dénoncer ce dialogue de façade pour pérenniser un système et réclamer un changement du pouvoir. En 31 ans, on n’a pas vu de changement positif dans notre pays », a déclaré Abass Mahamat, 35 ans.
Dans le centre de la capitale, les commerces du marché central ont baissé le rideau. « On nous a dit qu’il y a une manifestation dans la ville et je suis venu comme les autres collègues pour rester devant mon magasin pour éviter des pillages », a expliqué Mahamat Mboudou, les yeux rivés sur son téléphone pour suivre les événements se produisant dans le sud de la ville.
Dans le 6e arrondissement, fief de l’opposition où est également situé le domicile du Premier ministre Saleh Kebzabo, les rues sont désertes. Des pneus, des troncs d’arbre, des amas de briques, jonchent les rues, a constaté un journaliste de l’AFP. Les établissements scolaires et universitaires sont fermés.
Le siège du parti de Saleh Kebzabo, l’Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR), a été pris pour cible par les manifestants et a été « en partie incendié », a indiqué le vice-président du parti, Célestin Topona.
Opposant historique à Mahamat Idriss Déby, qui a dirigé le pays d’une main de fer pendant 30 ans, Saleh Kebzabo avait rallié il y a 18 mois le gouvernement nommé par la junte militaire dirigée par le fils de l’ancien chef de l’État. Il a été nommé à la tête du gouvernement le 12 octobre.
« Ils nous tirent dessus. Ils tuent notre peuple. Les soldats du seul général qui a refusé d’honorer sa parole et aujourd’hui c’est la fin des 18 mois, voilà comment il entend installer la dynastie en tuant le peuple », a déclaré dans un message sur Twitter Succès Masra, l’un des principaux opposants du parti Les Transformateurs, qui avait lancé mercredi un appel à manifester pacifiquement.
Avec AFP