ReportageLe ministre de l’intérieur s’est rendu deux jours sur l’île et a multiplié les rencontres. Il s’est engagé à répéter l’exercice toutes les six semaines, s’inscrivant dans le processus de discussions né après les émeutes du printemps, qui pourrait déboucher sur des changements institutionnels.
C’est jour de marché à Sartène (Corse-du-Sud). Les quatre ou cinq commerçants venus vendre leurs produits ont dressé leurs étals, autour desquels des touristes déambulent. Il est à peine 8 h 30 et, en ce samedi 23 juillet, le soleil ne tape pas encore trop fort. Gérald Darmanin s’est attablé à la terrasse du Bien Assis. Installé devant une petite table ronde de ce café de la place Porta, le ministre de l’intérieur bavarde l’air de rien avec deux élus de ce gros bourg, sous-préfecture de la Corse-du-Sud, situé à quelques encablures des plages de Propriano.
Comme quelques dizaines d’autres consommateurs, auxquels il n’a pas manqué de serrer la main, il goûte la douceur matinale de cette journée qui s’annonce caniculaire. N’étaient son costume bleu sombre un peu strict, cette chemise blanche parfaitement repassée et cette cravate nouée autour d’un col raide, on le prendrait pour un de ces habitués qui, chaque jour à la même heure, viennent là boire leur café, avant que le Parisien – le pinzutu, prononcez « pinsout » – ou autres touristes ne se ruent vers les meilleures tables, à l’abri du soleil. Pour l’heure, ces derniers profitent du marché : miel des montagnes de Corse, canistrelli et fromages de la bergerie…
Voilà deux jours que Gérald Darmanin parcourt « l’île de Beauté », comme il le répète à chaque étape. Une tournée marathon commencée vendredi matin à Bastia, prolongée en fin d’après-midi et en soirée à Zicavo et Cozzano, deux villages aux maisons hautes, volets clos et façades de granit caractéristiques du Haut-Taravo en Corse-du-Sud, poursuivie à Propriano et Bonifacio le lendemain, avant un retour à Paris en fin de journée. Gendarmes, policiers, pompiers, élus, entrepreneurs, producteurs locaux, étudiants d’école de commerce… Le ministre de l’intérieur, qui selon son expression se sent « comme ministre de la Corse », effectue avec soin et méthode cette visite des popotes. Surtout ne rien oublier, ni personne.
Feuille de route
En vérité, derrière cette attention plus ou moins protocolaire, Gérald Darmanin est en mission : renouer les liens abîmés avec la Corse et ses représentants depuis que les nationalistes ont accédé à la présidence de la collectivité insulaire en 2015, instaurer un dialogue respectueux, apaiser les tensions pour déboucher sur d’éventuelles évolutions institutionnelles. Après les émeutes qui, en mars et avril, ont secoué l’île à la suite de l’agression mortelle dont a été victime le 2 mars Yvan Colonna à la centrale d’Arles (Bouches-du-Rhône), où l’assassin du préfet Claude Erignac purgeait sa peine, le ministre de l’intérieur a hérité du dossier corse. « Au plus mauvais moment, lâche-t-il. On a évité le pire, il n’y a pas eu de mort. »
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