C’est en visio conférence depuis sa résidence à Miami (Etats-Unis) que Blaise Matuidi s’est confié à Challenges, à quelques heures de son premier passage dans le jury de « Qui veut être mon associé? », l’émission des entrepreneurs de M6 diffusée mercredi 25 janvier à 21h10.
Co-fondateur d’Origins, un fonds de capital-risque fondé en 2021 aux Etats-Unis présent au capital de neuf start-up, l’ancien joueur de l’équipe de France occupe ses journées à rencontrer des investisseurs, participer à des tours de table ou encore développer les entreprises dans lesquelles il s’est impliqué financièrement. En tant qu’ancien sportif, il espère que sa nouvelle vie d’homme d’affaires va pouvoir changer la vision des sportifs de haut niveau en Europe. Et pourquoi pas créer des vocations.
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Pourquoi avoir accepté de faire partie du jury de « Qui veut être mon associé ? »
C’était une occasion de rentrer dans ce nouveau monde, rencontrer des exemples qui ont réussi dans le domaine de l’entrepreneuriat. J’ai aussi accepté car j’avais l’envie d’aider des jeunes entrepreneurs qui arrivent avec de nouveaux modèles. C’est toujours intéressant de voir ce qu’ils sont capables de fournir.
Vous êtes pourtant déjà en contact avec des start-ups dans le cadre de votre fonds de venture Origins…
L’émission « Qui veut être mon associé? » est un plus par rapport à mon activité quotidienne. Mais le profil des investisseurs du jury, capables de déceler les nouvelles pépites, m’a convaincu de participer à cette aventure.
Vous avez une double casquette : celle de business angel et de capital-risqueur. Pourquoi ?
J’ai commencé à être business angels avant de fonder Origins. La création du fonds est un accomplissement après avoir acquis un peu d’expérience. Les gens du secteur commencent a entendre parler de moi. C’est comme dans le football : tu évolues dans un club et demain, tu peux être transféré. Ce sont des choix de vie et j’ai saisi cette opportunité. Représenter autant d’entités dans un seul fonds, soit 70 à 90 personnes, est une grande réussite et une responsabilité importante. On se donne les moyens pour réussir.
Quels souvenirs avez-vous gardés du tournage de l’émission ?
J’étais le petit nouveau. Le petit jeune qui essaye de faire sa place. A côté de ces experts, ce n’a pas été facile, mais c’était une belle expérience et un accueil super de la part de l’équipe. Vous verrez dans l’émission mais je n’ai pas eu trop de réussite (rires).
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Quelles sont les questions que vous posez avant d’investir dans une entreprise ?
Je me demande si l’équipe est bonne, questionne le produit ou le service, la vision future et les étapes pour arriver là ou l’entrepreneur souhaite aller. J’accorde beaucoup d’importance à l’humain car l’histoire est importante pour moi. Les belles choses se construisent sur de belles histoires. Ce que le produit peut apporter sur le marché est très important. L’humain est tout aussi important.
Quelles sont les similitudes que vous faites entre les deux milieux ?
Le sport professionnel m’a aidé à franchir la frontière entrepreneuriale. Le football nécessite un certain leadership, la résilience, le don de soi, ne pas avoir peur. Autant d’éléments que j’ai retrouvés dans le business. Ce sont des valeurs qui m’animent au quotidien. Et quand elles sont partagées, je suis derrière les entrepreneurs.
Il y a plus de tacles dans le monde du foot ou de l’entrepreneuriat ?
Je n’ai pas encore connu de tacle, donc ça va (rires). Il ne faut pas faire n’importe quoi et s’affirmer. J’ai su le faire dans le monde du football et c’est la même chose dans le monde de l’entrepreneuriat.
Quelles ont été vos erreurs d’entrepreneur ?
Cela fait maintenant plus de sept ans que je suis investisseur. Bien évidemment ont est conscient que toutes nos participations ne vont pas réussir. Les avancées de la vie d’une entreprise nous renseignent, aussi, sur ce qu’on aurait pu faire autrement. L’activité d’une entreprise peut s’arrêter à tout moment, il faut donc savoir gérer ce risque.
Tant que ça ne me met pas en difficulté personnellement, ça ne me pose pas de problème. Je suis un père de famille donc je ne peux pas faire n’importe quoi. C’est l’éducation transmise par mon papa.
Qu’apportez vous dans une entreprise ?
J’ai participé à pas mal de rounds de levée de fonds. Je parle ainsi de mon vécu et de ma vision d’ensemble. J’aiguille les entrepreneurs et, surtout, j’ouvre mon carnet d’adresse. J’ai la chance d’avoir un réseau qui commence à être important. C’est une des clés de réussite.
Je suis quelqu’un qui dans le foot ne lâchait jamais rien et le Blaise du foot n’a pas changé aujourd’hui. J’ai confiance en notre équipe, nos participations, et on nous a fait confiance. Il faut donc la rendre.
Un de vos atouts, c’est aussi votre argent, vous permettant d’investir plus que le citoyen lambda…
Oui, aussi. Mais notre rapport à argent est aussi différent. On ne va pas faire n’importe quoi. Il y a des chiffres qui peuvent faire tourner la tête. Mais nous sommes habitués, dans le monde du football, à voir des chiffres impressionnants, par les transferts ou les salaires. Les montants en millions d’euros de levées de fonds ne me choquent pas.
Votre collègue au sein du jury, Marc Simoncini est connu pour s’impliquer dans des start-ups aux business verts. Vous, à titre personnel, qu’est-ce qui vous motive à investir ?
J’ai évidemment envie de laisser un monde meilleur. Mais en tant qu’ancien joueur international, je veux servir d’exemple pour les générations suivantes. Je pense faire partie aujourd’hui des pionniers qui ouvrent une nouvelle voie après leur carrière professionnelle. Les sportifs sont catalogués. Je veux démontrer qu’un athlète peut être beaucoup plus que ça. L’aura, l’expérience, le réseau sont des acquis qu’il faut utiliser comme un avantage. Pour réussir dans le monde de l’investissement, les sportifs ont des atouts au-dessus de la moyenne.
Des footballeurs ont raté leur reconversion et ont terminé ruinés. Quand avez-vous pensé à votre avenir ?
Ma femme m’a toujours dit que le football, ça durait qu’un temps. Il fallait donc construire sa vie d’après 35 ans, et voir loin. Ce sont des étapes. Grâce à une certaine sécurité financière, je peux me permettre d’avoir des challenges.
Michael Jordan, Tony Parker et même Mathieu Flamini sont autant d’anciens sportifs de haut-niveau qui sont devenus investisseurs. Avez-vous un modèle de reconversion réussie ?
Vivant aux Etats-Unis, il y a de nombreux modèles parmi les anciens sportifs ou les sportifs en activité. Ces derniers sont les meilleurs exemples tant ils sont capables d’être concentrés sur leur première passion mais aussi d’aller chercher des défis dans des secteurs loin de leur domaine de prédilection. On peut le faire aussi en Europe. Mathieu Flamini est un bon exemple.
Quelle serait votre plus grande fierté : champion du monde de foot ou alors investisseur de premier plan capable de soutenir le prochain Google ?
Ma fierté serait qu’il y ait de plus en plus de sportifs demain qui réussissent dans d’autres domaines que le sport.
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