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« L’ère de l’hypercroissance est derrière eux »

"L’ère de l’hypercroissance est derrière eux"



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Confronté à des problèmes structurels renforcés par le contexte économique mondial, Meta prépare sa première vague massive de licenciements pour mercredi, selon la presse américaine. Mais, malgré ses difficultés, la maison mère de Facebook conserve des atouts.

Que se passe-t-il chez Meta ? Une semaine après sa chute en bourse, la société qui réunit Facebook, WhatsApp, Messenger et Instagram prépare, lundi 7 novembre, la première vague de licenciements massive de son histoire, selon le Wall Street Journal, qui évoque la date de mercredi pour l’annonce officielle. Plusieurs milliers des 87 000 employés du groupe pourraient être concernés.

La maison mère de Facebook souffre en effet de problèmes structurels de longue date, avivés par un contexte économique mondial morose. Meta pâtit en premier lieu des investissements massifs opérés par Mark Zuckerberg pour développer le métavers, Internet du futur où l’utilisateur pourra interagir dans un monde virtuel en réalité augmentée. Encore balbutiant, ce trou noir financier a avalé 21 milliards de dollars en deux ans, sans convaincre ni les investisseurs ni le public.

Un monde en ligne désert

Horizon Worlds, plate-forme de réalité virtuelle présentée comme la « première brique » du métavers, réunit ainsi moins de 200 000 utilisateurs mensuels au bout de dix mois d’existence, selon le Wall Street Journal. Le monde en ligne est, semble-t-il, un monde désert et le devenir du métavers laisse la plupart des observateurs sceptiques.

« Il est impossible de prévoir l’avenir du métavers, mais ce qui a été fait n’est pas très profitable pour le moment, observe Dominique Boullier, sociologue des usages du numérique à Sciences Po Paris. Ces investissements ne donnent pas une bonne image du groupe : s’il est normal qu’ils perdent de l’argent, cela représente tout de même des proportions importantes. »

Le « métavers risque de rester une niche, rebondit Virginie Clève, consultante en stratégie digitale. Cela fait penser à Second Life [un univers virtuel sorti en 2003, NDLR], qui a fasciné et s’est complètement essoufflé. D’autant que le coût énergétique nécessaire à son fonctionnement est colossal et, dans le contexte actuel, semble peu réaliste. »

>> À lire : Facebook et ses déboires en Bourse, les symptômes d’une nouvelle ère à Wall Street

Manque de confiance

Pensé pour devenir le futur d’Internet, le projet fou de Mark Zuckerberg pose aussi des questions en matière de respect des données personnelles des utilisateurs. « Le métavers a pour but de capter toutes les données des utilisateurs à travers l’ensemble de leurs activités, jusqu’aux regards qu’ils porteront dans le monde virtuel, afin de les monétiser, souligne Dominique Boullier. Cette stratégie risque de poser problème avec le RGPD [le règlement général sur la protection des données, texte européen, NDLR]. Et les utilisateurs peuvent aussi finir par se lasser de ce genre de captation permanente très intrusive pour la vie privée. »

Meta souffre d’ailleurs de sa mauvaise réputation en la matière. Élue « pire entreprise » de l’année en décembre 2021 par Yahoo Finance, la société a vu son image écornée par les scandales de Cambridge Analytica et des Facebook Papers. Malgré son changement de nom, des doutes sur son éthique persistent et contractent ses revenus publicitaires, déjà fragilisés par le contexte économique mondial.

« Meta vit une phase négative en termes de réputation, pointe Dominique Boullier. L’entreprise souffre d’une dégradation de son image auprès des investisseurs et des annonceurs. Les investissements continuent, mais les marques n’ont plus complètement confiance. Elles réévaluent leurs placements et ne veulent plus mettre tous leurs œufs dans le même panier. »

Conflit avec Apple

La société a en outre perdu des milliards de dollars de revenus publicitaires en raison des changements apportés par Apple à son système d’exploitation mobile en 2021. Critiquée, la marque à la pomme a mis en place une plus grande protection des données personnelles de ses utilisateurs, réduisant les capacités de Meta en matière de publicité ciblée.

Les deux géants sont également en conflit autour de la taxe de 30 % qu’Apple entend prélever depuis octobre sur les contenus sponsorisés diffusés sur Facebook et Instagram, en plus de celle qu’elle ponctionne déjà sur les achats effectués au sein des applications. Mark Zuckerberg a ainsi reconnu des « problèmes de ciblage publicitaire » qui, ajoutés au vieillissement, au recul de son audience et à la concurrence féroce de TikTok, font fondre ses revenus.

« Loin de la faillite »

Mais il ne faut pas s’y tromper : l’entreprise reste « loin de la faillite », rappelle Virginie Clève. « Meta continue à générer des sommes considérables et reste très puissant, explique la spécialiste. Ils sont très loin de la banqueroute, Instagram conserve une croissance forte, en nombre d’utilisateurs comme en monétisation. »

L’entreprise a donc de quoi résister. « Ils ont trois fers au feu, explique Dominique Boullier. Avec WhatsApp, Facebook et Instagram, Meta parvient à s’équilibrer : l’application phare diffère selon les pays, mais, dans l’ensemble, la société a la possibilité de retomber sur ses pieds grâce à la diversité de ses offres. »

Meta conserve par ailleurs la capacité à copier de façon efficace les innovations de ses concurrents et ne rechigne pas à « couper les branches mortes« , observe Virginie Clève. Mark Zuckerberg a ainsi arrêté le partenariat qui unissait Facebook à différents titres de presse, et s’est félicité du succès des « Reels », ces courtes vidéos directement inspirées du concurrent TikTok.

« 140 millions [de Reels, NDLR] sont jouées sur Facebook et Instagram chaque jour, soit 50 % de plus qu’il y a six mois, s’est félicité le dirigeant de Meta fin octobre. « Nous pensons que nous gagnons des parts de marché sur le temps passé à des concurrents comme TikTok. »

Malgré sa perte de vitesse, le réseau conserve ainsi près de trois milliards d’usagers quotidiens dans le monde en 2022 – dont 40 millions en France – qu’il n’est pas près de perdre. « Il est compliqué de quitter un réseau social, remarque Dominique Boullier. Une fois qu’un utilisateur s’y est investi, prendre la décision de partir est coûteuse, on ne peut pas récupérer tout ce qu’on y a fait. »

Si l’âge d’or de Facebook semble désormais derrière lui, tout n’est donc pas perdu pour l’entreprise reine des réseaux sociaux. « L’ère de l’hypercroissance est derrière Meta, il est touché pour la première fois par le contexte économique mondial comme n’importe quelle autre entreprise, résume Virginie Clève. Mais il ne faut pas parler de crépuscule pour autant, plutôt d’un âge de la maturité. Meta continue à générer des revenus stratosphériques. »

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