Si les émissions de gaz à effet de serre ne baissent pas drastiquement, les températures en France pourraient, selon une étude, augmenter en 2100 de 3,8°C en moyenne par rapport au début du XXe siècle.
Un réchauffement climatique qui s’annonce pire que prévu pour la France. Les températures dans l’Hexagone pourraient augmenter en 2100 de 3,8°C en moyenne par rapport au début du XXe siècle si les émissions de gaz à effet de serre ne baissent pas drastiquement.
« Cela représente une hausse jusqu’à 50 % plus élevée que les précédentes prévisions », indique l’un des auteurs de l’étude, Aurélien Ribes, climatologue au Centre national de la recherche météorologique (CNRM).
Dans le pire des scénarios, celui où l’on continuerait à recourir massivement aux énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), les températures moyennes pourraient grimper de 6,7°C, avertit l’étude parue début octobre dans la revue « Earth Systems Dynamics ». Dans le meilleur des cas, l’augmentation de la température serait de 2,3°C.
Dans l’ensemble, « la France se réchaufferait davantage (environ + 20 %) que la moyenne planétaire », avec une hausse moyenne de 0,36°C par décennie, indique Aurélien Ribes.
Selon l’ONU, le réchauffement de l’ensemble de la Terre pourrait, si rien n’est fait, atteindre les +2,7°C à la fin du siècle.
Un réchauffement hexagonal de 1,8 degré en 2023
Pour établir ces données à l’échelle de la France, les chercheurs du CNRS, du CNRM, et du Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique (Cerfacs) se sont fondés sur celles récoltées depuis 1899 par une trentaine de stations météorologiques réparties sur le territoire pour mesurer le réchauffement actuel et futur.
Ces experts ont étudié différents scénarios, du plus optimiste – celui où la neutralité carbone est atteinte en 2050, après d’importants efforts au niveau international – au plus pessimiste – une augmentation persistante des émissions.
Ces données ont montré que la température moyenne de la France actuelle était de 1,66°C supérieure à la période 1900-1930. « Dont la quasi-totalité (1,63°C) sont dus uniquement aux activités humaines », souligne Aurélien Ribes.
« Chaque tonne de CO2 compte dans la mesure où le réchauffement dépend du niveau d’émission cumulé », ajoute-t-il, ajoutant que « pour 2023, on atteindrait déjà +1,8°C ».
Le dernier rapport des experts climat de l’ONU (Giec) a montré que la planète avait déjà gagné en moyenne près de 1,2°C depuis l’ère pré-industrielle en raison des gaz à effet de serre générés par ces activités humaines.
« Cela voudrait dire des phénomènes extrêmes largement plus forts »
Mais attention, la hausse de 3,8°C en 2100 en France n’est qu’une moyenne, avertissent les chercheurs : certaines régions, notamment autour de l’arc méditerranéen ou en montagne, pourraient connaître des températures encore plus élevées.
Par ailleurs, le réchauffement varierait fortement selon les saisons. Si en hiver, la hausse des températures serait de 3,2°C (2,3 à 4,2°C selon les régions), en été, le thermomètre pourrait s’affoler, avec une hausse moyenne de 5,1°C (3,6 à 6,6°C selon les régions).
« Cela voudrait dire qu’on aurait des phénomènes extrêmes (chaleur, sécheresse, inondations …) largement plus forts que ce qu’on a connus à l’été 2022, où le réchauffement n’était que de 4°C en moyenne », souligne Julien Boé, chercheur en climatologie au CNRS. Ils seront aussi plus fréquents et surtout plus intenses, note Aurélien Ribes.
Selon Météo-France, dans un scénario à 4°C de réchauffement, les vagues de chaleur en Île-de-France par exemple s’étendraient de 21 à 94 jours selon les régions – contre sept aujourd’hui en moyenne nationale – et la fréquence de ces événements devrait doubler d’ici 2050.
Selon le Giec, chaque degré supplémentaire de réchauffement équivaut à une augmentation de 7 % des précipitations lors des tempêtes et orages.
Dans tous les cas, ce réchauffement aura « des conséquences sur les écosystèmes et la biodiversité, avec des habitats qui deviendront moins favorables à certaines espèces, qui seraient contraintes de se déplacer, et aussi sur le système agricole » avec l’abandon de certaines cultures, faute d’eau ou un changement dans les cycles de récolte, explique Julien Boé.
Seul petit point positif : « On est au moment où le réchauffement augmente le plus vite » du fait de la baisse des aérosols (qui ont un effet rafraîchissant), qui est amenée à ralentir, concomitante à la hausse des gaz à effet de serre (qui réchauffent). « Le rythme de hausse devrait donc ralentir après 2030 », estime Aurélien Ribes. Mais même comme cela, si rien ne change, on n’échappera au +3,8°C.
Avec AFP