S’accaparer une grosse part du gâteau du retail media – la monétisation des inventaires et espaces publicitaires des e-commerçants: c’est le sens de l’alliance nouée le 8 novembre entre Publicis et Carrefour. Mi-2023, le tandem va créer une société commune ouverte à d’autres acteurs. La grande distribution, les enseignes spécialisées (bricolage…) ou BtoB (Point P…) sont en ligne de mire.
Pourquoi ce tandem? Pas seulement parce que leurs PDG, Alexandre Bompard et Arthur Sadoun, sont amis. Ce dernier est au conseil de Carrefour, mais promis-juré, l’affaire s’est traitée sans lui. Depuis sa frénésie d’achats de 2019 – la reprise de l’américain Epsilon et de l’australien CitrusAd, pro du retail -, Publicis est très outillé. Au Royaume-Uni, il travaille pour Tesco, Sains-bury’s… Croître en Europe est pour lui indispensable.
Carrefour veut s’imposer dans les données primaires propriétaires
Avec 8 milliards de transactions et 80 millions de clients, Carrefour, de son côté, s’impose dans la first party data, les données primaires propriétaires. « Notre plateforme Carrefour Links, née en 2021, couplée à notre carte de fidélité – les deux tiers de nos transactions – nous a permis de nous faire la main, assure Elodie Perthuisot, directrice du pôle digital du groupe. Avec Publicis, nous allons accélérer, boosté aussi par notre complémentarité géographique. » L’enseigne travaille avec des acteurs comme Criteo. Son ambition est de tout rapatrier.
Pas question de rater la manne, et tout laisser à Amazon. « Avec les influenceurs, le retail média dope le marché digital », dit Xavier Guillon, directeur général de France Pub. Selon GroupM (WPP), il pèsera cette année 100 milliards de dollars (11% du marché mondial). Dès 2025, Goldman Sachs prévoit des recettes supérieures à celles de la télévision aux Etats-Unis. Un métier juteux avec ça – 50% de marge au bas mot, selon la banque. « Où le coût est d’abord celui de l’inventaire », confie Thibault Hennion, patron des opérations internationales d’Epsilon. Walmart y réalise déjà 2 milliards de dollars de revenus. De quoi (presque) faire oublier l’impitoyable guerre des prix.