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L’électricité suisse, pas si verte que ça – rts.ch

L’électricité suisse, pas si verte que ça - rts.ch


Huitante pour cent de l’électricité consommée en Suisse est d’origine renouvelable, selon un communiqué de l’Office fédéral de l’énergie datant du 5 septembre. Un chiffre qui ne concorde pourtant pas avec les recherches de l’Université de Genève, qui montrent une proportion de 50% seulement. La raison: l’électricité achetée n’est pas toujours celle qui est consommée.

C’est un chiffre flatteur: en Suisse, 80% de l’électricité consommée serait d’origine renouvelable. Elliott Romano, chercheur à l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université de Genève, a pourtant trouvé un résultat différent: « Les analyses que nous menons à l’institut depuis 2017 montrent que la part d’énergie renouvelable dans notre consommation électrique est différente de celle indiquée par l’OFEN. Elle est en réalité de 50%, annonce-t-il au micro de l’émission On en parle. En 2021, le mix de consommation d’électricité se répartit entre 45% d’hydraulique, 5% de solaire, 33% de nucléaire et environ 11% d’énergie fossile », poursuit le chercheur.

L’électricité achetée n’est pas celle qui arrive chez soi

Comment une telle différence est-elle possible? Eliott Romano a pris en compte dans ses recherches une réalité physique: l’électricité qui arrive chez soi n’est pas forcément celle achetée. « Notre méthodologie reflète les installations qui sont réellement mises en œuvre pour répondre à la consommation d’électricité en Suisse à un moment donné. Cela n’est pas le cas de la méthodologie de l’OFEN, qui repose sur la certification de l’électricité au moyen des garanties d’origine. »

En Suisse, à chaque kilowattheure produit, que cela soit dans un barrage ou une centrale nucléaire, l’établissement de son origine à l’aide d’une garantie, ou certificat, est obligatoire. « Or, les garanties d’origines ne garantissent pas une concordance entre de la production et l’utilisation de l’électricité », explique Elliott Romano.

Cela implique qu’une électricité consommée à un moment donné de l’année peut avoir été marquée par un certificat associé à un volume d’électricité produite à un tout autre moment de l’année. Par exemple, il est possible de marquer avec un certificat solaire produit en été une consommation en plein cœur d’une nuit hivernale. » Autrement dit, même en ayant acheté un mix énergétique 100% renouvelable, une machine a café allumée à 6 heures du matin a peut-être été alimentée par du charbon allemand ou du nucléaire français, énergies qui contribuent à maintenir le réseau suisse et européen sous tension.

« Aujourd’hui, des réflexions sont en cours pour une meilleure adéquation entre le moment de la production et le moment de la consommation », précise Elliott Romano.

Des certificats « comptables »

Autre explication de cet écart: il est possible d’avoir dans un pays davantage de certificats que d’énergies renouvelables. La Suisse achète donc le droit de dire qu’elle est plus propre que la réalité. Parmi ces certificats comptabilisés en Suisse contribuant aux chiffres flatteurs de la Confédération, certains viennent d’Islande, pays produisant et consommant  physiquement 100% d’énergie renouvelable. Il n’y a pourtant pas de connexion physique entre la Suisse et l’Islande, ni d’électrons islandais dans les foyers suisses. Il s’agit donc d’une réalité comptable: la Suisse importe des certificats de courant vert sans pouvoir l’utiliser concrètement.

Contacté par On en parle, l’OFEN confirme la situation: « Il est vrai que le système européen de ‘Garanties d’origine’ et de marquage de l’électricité ne reflète pas les flux physiques. Les ‘Garanties d’origine’ sont échangées de manière dissociée de la fourniture physique d’électricité. Cela est dû au fait que dans un système de courant alternatif, on ne peut pas suivre/tracer les électrons. »  Il conteste cependant certains chiffres de l’Université de Genève, notamment la part d’électricité d’origine fossile qui ne serait pas de 11% mais de 3% maximum.

L’OFEN confirme aussi le mécanisme d’achats de certificats dans d’autres pays, par exemple l’Islande. « L’Islande est membre de l’Espace économique européen. Pour cette raison, il est également possible d’importer virtuellement en Suisse des ‘Garanties d’origine’ provenant d’Islande ». L’organe souhaite aussi travailler dans le sens d’un raccourcissement de la durée de vie des certificats. Il parle pour le moment d’un « marquage trimestriel  », déjà en discussion à Berne.

Sujet radio: Mathieu Truffer et Bastien von Wyss

Adaptation web: Myriam Semaani

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