Les services d’urgence connaissent une forte affluence en Suisse. Conséquence: le temps d’attente augmente. L’Hôpital fribourgeois (HFR) a lancé un appel à la patience et à la compréhension face à cette situation. Le chef des urgences de l’HFR explique que si la situation perdure, la qualité des soins pourrait s’éroder.
Vincent Ribordy, médecin-chef du Service des urgences de l’HFR et coprésident de la Société suisse de médecine d’urgence, parle dans Forum d’une situation tendue. « On constate depuis le début de l’année une nette augmentation du nombre de patients en général », indique-t-il. « Cela se traduit par des périodes de forte activité, qui mettent le système sous pression. »
Manque de médecins de proximité
Cette situation « qui use » est globale et répond à une certaine logique, note le médecin. Il explique en premier lieu le phénomène par un rattrapage après deux ans de pandémie: « Durant les vagues successives du Covid, nous avons eu moins de patients aux urgences. Même si c’était compliqué, on a pu s’adapter. Maintenant, on constate une sorte de retour à la normale, avec le rattrapage de certains retards », explique-t-il. En effet, auparavant, la fréquentation des urgences augmentait de 5% par année. « Depuis le début de l’année, c’est comme si on prenait l’augmentation des trois dernières années d’un seul coup », estime Vincent Ribordy.
Le manque de médecins de premier recours (médecins de famille, pédiatres, psychiatres et certains spécialistes) est un facteur d’explication à cette attractivité croissante, les gens ne se rendant en effet pas « par plaisir » aux urgences, mais par « besoin ». « Lorsque la couverture des soins médicaux de base devient insuffisante, il y a tout de suite un effet de report sur les services d’urgence », explique le médecin. Il pense donc qu’il est nécessaire « d’inciter la population à éviter de recourir aux urgences systématiquement ».
Conséquences sur la prise en charge
Pour lui, l’augmentation des délais d’attente pour les traitements les moins sérieux est la conséquence « la moins grave ». En revanche, plus problématique, la qualité des soins pourrait en pâtir. « On doit se concentrer sur l’essentiel, on donne moins d’attention », relève-t-il.
Le docteur explique que la tension et le travail de triage font partie du métier d’urgentiste. Mais il précise que « si cette pression est constante et anormalement importante, elle augmente le stress et le risque de commettre des erreurs ».
Vincent Ribordy lance donc un avertissement: cette congestion, qui survient dans un contexte de pénurie de personnel soignant, peut épuiser et provoquer des départs de la profession.
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Propos recueillis par Thibaut Schaller
Adaptation web: Antoine Michel