Des bugs pour le match phare de Ligue des champions PSG-Juventus le 6 septembre dernier. Une émission post match, le Canal Champions Club, le 14 septembre dernier, qui ne peut être diffusée. Des épisodes entraînant ce post contrit du présentateur phare de la chaîne Hervé Mathoux : « la frustration est totale ». C’est du jamais vu dans l’histoire récente de Canal. La quatre a fait sa renommée dans le football, autant pour l’analyse tactique de haut vol en plateau que pour sa technique infaillible hors champ. Nul doute que pour les 100.000 à 200.000 abonnés privés du match du 6 septembre, qui paient le foot au prix cher, la frustration était totale à lire leurs commentaires sur les réseaux sociaux. Résultat : canal retient son souffle pour ce mercredi 5 octobre, alors qu’il retransmet l’opposition entre Benfica et le PSG. Aucun bug majeur n’a été toutefois signalé depuis ces fâcheux événements.
Le directeur général adjoint de Canal + Frank Cadoret avait officiellement présenté « ses excuses aux clients qui n’ont pu voir le match PSG-Juventus Turin ». Il invoquait auprès de l’AFP « un problème de capacité quand il y a beaucoup de clients qui se connectent » sans « écarter non plus une possibilité de malveillance », estimant toutefois « que [les] serveurs sont dimensionnés. » Entre les lignes, la piste d’une cyberattaque était évoquée le 7 septembre pour PSG-Juventus. Désormais, le dirigeant n’a « rien de particulier » à déclarer sur le sujet, alors que les investigations auraient dû trouver la panne en question.
Vous êtes bien sûr nombreux à vous interroger sur la non diffusion de la soirée post match LDC. Nous avons subi un bug géant inexpliqué qui bloquait toute diffusion . Nous comprenons votre déception et nous demandons de nous excuser . Notre frustration est totale .L équipe LDC
— Hervé MATHOUX (@MathouxHerve) September 14, 2022
Mise à jour de MyCanal et pannes micro
Et pour cause : d’après les informations recueillies par Challenges auprès de sources internes, confirmant celles du site Les Jours, les vraies raisons des bugs ne sont pas à aller chercher derrière un groupe de hackers souhaitant la chute de Canal. Lors du comité social et économique (CSE) du 22 septembre dernier, le directeur de la DTSI (direction technique des systèmes d’information) de Canal a livré des éléments de réponse.
Concernant le bug sur MyCanal (l’application en ligne de C+), l’entreprise ne saurait pas de manière certaine combien d’abonnés ont été touchés. L’accès restreint ce soir-là au service serait en réalité dû à des mises à jour et nouvelles fonctionnalités sur MyCanal déployées depuis quelques mois. Et qui n’auraient pas résisté à l’afflux important de connexions simultanées. Loin, donc, de la piste de « malveillances » évoquée par les dirigeants.
La clarté se précise aussi sur le deuxième bug qui a empêché la diffusion du Canal Champions Club du 14 septembre. L’erreur humaine alors invoquée a trouvé sa cause. Un prestataire aurait fait une mise à jour aux studios de la Canal Factory, où les émissions sont tournées. Le test vire à la catastrophe : aucun micro HF n’est fonctionnel. L’émission ne peut être diffusée car aucune solution de secours n’a pu être trouvée en temps et en heure.
Plan de départ et perte de savoir-faire
De nombreux salariés font le lien entre ces dysfonctionnements et le plan de départ massif de 2019, concernant 20% des effectifs, soit 492 salariés. « A chaque fois, la direction avance une raison technique différente constate un élu du personnel. La vérité, c’est que les anciens sont partis car ils coûtaient trop cher. Un savoir faire technique est parti. Le groupe veut pourtant lancer de nouvelles chaînes : Canal + Foot et Canal + Sport 360. Sauf que les jeunes sans expérience et les prestataires ne peuvent pas assurer la même qualité de service… »
D’autant que Canal a déménagé cet été dans un nouvel immeuble : Canal + One, de nouveaux locaux à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). « Pourquoi cela nous arrive maintenant alors que ce n’était pas le cas avant ?, poursuit l’élu du personnel. On a gratté partout pour faire des économies, le risque d’erreur étant in fine assumé. Certains disent qu’avec notre infrastructure, c’est un petit miracle que cela ne pète pas beaucoup plus. Le calcul de Canal, c’est de se dire que les consommateurs sont captifs sur la Ligue des champions, ils ont l’exclusivité. »
Le directeur général adjoint de Canal, Frank Cadoret, avait promis début septembre des ristournes commerciales aux clients impactés par les bugs techniques. Pour l’instant ils sont nombreux sur les réseaux sociaux à indiquer n’avoir rien vu venir.
La situation est inconfortable pour Canal. Le groupe a décroché en juillet dernier l’appel d’offres afin de diffuser l’intégralité des coupes d’Europe de football entre 2024 et 2027. Un tour de force à 480 millions d’euros par an, dont Canal entend bien profiter pour sécuriser ses abonnés football, alors qu’un appel d’offres pour la Ligue 1, pour la période 2024-2028, n’est pas attendu avant la fin d’année 2023. L’épisode des bugs techniques de Canal rappelle celui connu au lancement de la chaîne RMC Sport en 2018. Contacté sur le sujet, Canal + n’a pas souhaité commenter.
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