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Au Kenya, la sécheresse décime les animaux sauvages dans les parcs nationaux

Au Kenya, la sécheresse décime les animaux sauvages dans les parcs nationaux


Des rangers du Kenya Wildlife Services (KWS) passent devant une carcasse de gnou au parc national d’Amboseli, le 30 novembre 2022.

Au Kenya, une sécheresse d’une intensité inédite depuis quarante ans décime éléphants, buffles et zèbres dans les parcs nationaux. A Amboseli (sud), près de la frontière avec la Tanzanie, la terre est sèche et se craquelle sous les pieds. Pas une herbe haute à l’horizon, les feuilles des arbres décharnés sont jaunies. Des carcasses d’animaux gisent le long de la route.

« La dernière grosse pluie que nous avons eue ici remonte à décembre 2021 », se lamente Josphat Wangigi Kagai, 37 ans, ranger du Kenya Wildlife Service (KWS), qui travaille dans le parc depuis 2016. Il vient d’être appelé par Kelembu Ole Nkuren, un berger masaï qui a découvert, en faisant paître son troupeau, un éléphant mort depuis presque un mois.

Le pachyderme, éventré par des rapaces et autres prédateurs, gît dans la vaste plaine surplombée par les cimes enneigées du Kilimandjaro. Une odeur fétide entoure la dépouille de l’animal, âgé de seulement 7 ans quand l’espérance de vie des éléphants avoisine les 60 ans. « Cet éléphant est mort à cause de la sécheresse », se désole Josphat Wangigi Kagai.

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A l’aide d’une hache, il s’emploie ensuite à retirer les défenses de l’animal pour éviter qu’elles ne soient récupérées par les braconniers. « Depuis quelques semaines, nous faisons ça pratiquement tous les jours, ça me rend particulièrement triste, soupire-t-il. Avant, je devais porter un masque pour supporter l’odeur des animaux en décomposition, mais maintenant je suis habitué. »

« Tout est en train de disparaître »

La Corne de l’Afrique souffre de précipitations insuffisantes depuis fin 2020. Au Kenya, la sécheresse, conséquence du changement climatique, a plongé dans la faim au moins 4 millions de personnes (sur une population de plus de 50 millions d’habitants), mais aussi sa faune sauvage exceptionnelle, qui en fait une destination touristique prisée. Selon le ministre du tourisme, Peninah Malonza, 205 éléphants, 512 gnous, 381 zèbres et 12 girafes étaient morts de la sécheresse entre février et octobre.

A Amboseli, un des deux parcs emblématiques du pays avec celui de Masai Mara, les puits s’assèchent et les pâturages se transforment en poussière. « J’ai vu il y a quelque temps un éléphant qui était à bout de forces, je lui ai donné à boire mais il était déjà trop tard. Il s’est écroulé peu de temps après », raconte Josphat Wangigi Kagai, affirmant que les zèbres et les antilopes sont les plus touchés.

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« Cette sécheresse est terrible car tout est en train de disparaître en ce moment : zèbres, gnous, girafes et éléphants. Je n’ai jamais vu un si grand nombre d’animaux sauvages morts », assure Kelembu Ole Nkuren, le berger masaï, qui a passé les trente-cinq ans de sa vie à Amboseli. « Avant la sécheresse, vous pouviez voir des troupeaux d’éléphants errer dans cette partie du parc. Ils sont introuvables aujourd’hui », poursuit-il.

Dans une zone reculée du parc, des corps en décomposition de zèbres, buffles et antilopes s’étirent sur un sol aride. Des nuées de mouches se forment. « Le point d’eau le plus proche est à une trentaine de kilomètres, c’était trop loin pour eux », explique Josphat Wangigi Kagai.

« Nous perdons les plus jeunes »

Selon Norah Njiraini, membre depuis 1985 de l’Amboseli Trust for Elephants, une organisation qui étudie les pachydermes dans le parc, plus de 100 éléphants sont morts (sur un total de 2 000) depuis juin à Amboseli. La période actuelle lui rappelle un autre épisode de sécheresse, en 2009, particulièrement meurtrier pour les éléphants. Faute d’anticipation, cet épisode avait été « pire qu’aujourd’hui » pour les animaux, selon elle. « En 2009, nous avons perdu des femelles adultes. Cette année est différente car nous perdons les plus jeunes », s’inquiète-t-elle.

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Cette année, les services de protection de la nature et le personnel des parcs s’emploient à limiter les conséquences de cette sécheresse. A Amboseli, les rangers apportent tous les deux jours du foin aux animaux. Dans le parc national de Tsavo Est, à environ 140 km au nord, le KWS a foré des puits pour faire remonter de l’eau à la surface et permettre aux animaux de s’abreuver. Malgré tout, 54 éléphants y sont morts entre février et octobre.

« Selon les prévisions météorologiques, les précipitations pour cette saison des pluies [d’octobre à décembre] ne devraient pas être suffisantes », souligne Kenneth Ochieng, le directeur du parc, malgré quelques averses récentes. Mais il veut rester « optimiste » et croit que l’action menée portera ses fruits : « Les problèmes que nous avons sont causés par l’homme [le réchauffement climatique] et la solution vient aussi de l’homme. »

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Le Monde avec AFP

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