Le combat entre Arslanbek Makhmudov et Carlos Takam venait de prendre fin il y a quelques minutes à peine. Marc Ramsay était encore dans le ring après avoir obtenu la victoire par décision des juges.
J’ai attiré son attention. Je voulais avoir sa réaction à chaud. Instinctive. Avant qu’il n’ait eu le temps de tout analyser comme il le fait si bien.
Penché sur les câbles, il a répondu à la première question :
– « C’était un combat pour hommes. C’était le combat qu’on espérait. On est rendu là avec Makhmudov. À partir de ce soir, il va affronter des adversaires de cette trempe. C’est comme ça que ça se passe dans l’élite.
– « Mais il m’a semblé qu’il ne voyait pas tout le temps les ouvertures. Des fois, Artur Beterbiev aurait plongé…
– « Il n’y a qu’un seul Artur Beterbiev. Arslanbek, c’est autre chose. C’est certain qu’il perdait de sa structure de boxe quand il était sous pression. Mais c’est normal, on va travailler sur tout ce qu’on va avoir appris ce soir… »
LE CERCLE DES HOMMES FORTS
Hier, dans le clan Eye of the Tiger Management, on était satisfait de la soirée. Sans parler de Steven Butler qui a montré qu’il pouvait progresser malgré ses dix ans dans le ring pro, on s’attardait à la pièce maîtresse de la compagnie. Arslanbek Makhmudov.
On sait maintenant qu’il a une mâchoire d’acier. Il a pris quelques droites balancées à toutes forces par Carlos Takam sans broncher. Comme si c’était une mouche qui l’achalait. C’est très important pour la suite des choses.
Il a montré qu’il en avait encore beaucoup à apprendre. C’est parfait. Quelques fans un peu exaltés s’époumonaient sur les réseaux sociaux après le combat. C’était fini Makhmudov.
Pensez-vous une seconde que Marc Ramsay et Camille Estephan croyaient que Makhmudov planterait Tyson Fury en deux rounds ? Et Deontay Wilder en trois ? Sans parler d’Oleksandr Usyk en quatre et Andy Ruiz et Joseph Parker en quatre rounds… le même soir ?
C’est simple. Vendredi au Casino, Arslanbek Makhmudov est entré dans le cercle des hommes forts. Les vrais.
JEFF JEFFREY A COMPRIS
Mais pourquoi ne s’est-il pas servi davantage de son double jab ? Et pourquoi, en voyant que Carlos Takam se penchait systématiquement sous les attaques pour offrir seulement son dessus de tête aux coups de Makhmudov, n’a-t-il pas pris un pas de recul ?
Parce qu’il n’avait jamais été obligé de l’apprendre. Il n’en avait jamais eu besoin. Le gros Russe grimpait dans le ring en l’enjambant et assommait tous ses adversaires en quelques minutes. Pas besoin d’être rusé, pas besoin de défensive, pas besoin d’être structuré pendant dix rounds.
J’ai eu une longue discussion avec Jeff Jeffrey, l’analyste au 91,9 qui transpirait après le combat tellement il avait plongé dans l’action. Jeff est un passionné et des fois, il oublie comment l’être humain a tendance à fonctionner.
– « Pourquoi n’employait-il pas son double jab ?
– « Parce que ce n’est pas naturel pour lui ?
– « Pourtant, c’est important.
– « Parce qu’il n’en a jamais eu besoin. Il montait dans le ring et démolissait tout le monde. Ce soir, il a appris qu’il aurait besoin de plus d’outils pour aller affronter le reste des grands. Le besoin crée l’organe, tous ceux qui ont étudié la théorie de l’évolution le savent. Makhmudov a besoin de plus d’outils, maintenant il va écouter Marc Ramsay, maintenant il va travailler à les acquérir. C’est de même dans tous les domaines. L’homme vise toujours la facilité pour régler une situation. C’est pareil dans la boxe… »
C’est comme couvrir le Canadien…
MAKHMUDOV LE RECONNAÎT
Makhmudov a été très intéressant en point de presse. Il a très bien analysé le combat et la performance de son adversaire. Il a reconnu qu’il avait appris également sur lui-même. En précisant qu’il voulait prendre son temps et s’assurer qu’il saurait s’adapter à la situation.
Mais il a été surpris par la condition physique de son adversaire qui n’a jamais baissé le tempo.
D’ailleurs, en visionnant les combats de Takam plus tôt dans la semaine, j’avais réalisé qu’il avait drôlement embêté Anthony Joshua pendant quatre ou cinq rounds avant de casser le régime. Faut dire qu’il avait accepté ce combat de championnat à dix jours d’avis. Dans ses autres combats contre les grands de la division, il a été difficile à vaincre. Surtout dans les six premiers rounds.
Il était le poids lourd parfait pour ouvrir la porte de l’élite à Makhmudov.
Jean Pascal contre Joe Smith Jr.
Coup de téléphone à Jean Pascal. Sourire et bonne humeur à l’autre bout de la ligne… numérique.
Jean Pascal et Greg Leon, son gérant, et le promoteur Lou DiBella ont gagné l’enchère pour présenter le combat, mais les négociations n’ont pas encore abouti.
Jean Pascal, toujours aussi alerte, n’a pas niaisé avec le puck. Il m’a glissé dans la conversation que si ça ne fonctionnait pas, il allait affronter Joe Smith Jr. à New York. Pas compliqué. Simple comme tout.
Le Bon Dieu est bon pour l’humble prolétaire de l’information. Qui était ringside vendredi au casino ? Joe De Guardia, promoteur de Carlos Takam… et de Joe Smith : « Oui, je confirme que nous sommes en attente pour Jean Pascal. Si ça ne se règle pas pour Buatsi, on aimerait organiser un affrontement entre Jean Pascal et Joe Smith Jr. quelque part dans la région new-yorkaise. Joe a perdu contre Artur Beterbiev, mais il faut reconnaître que Beterbiev est dans une classe spéciale. En plus, tout a mal été pour Joe dans les semaines qui ont précédé le combat. Ce ne sont pas des excuses, mais c’est la vérité », de dire DeGuardia.
Et il se pourrait que Jean ait découvert le Seigneur…