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Terroriste tueur à Morges (VD)Un camouflet infligé au Ministère public de la Confédération
Le Tribunal pénal fédéral a estimé que l’acte d’accusation concernant un tueur accusé de terrorisme n’est pas étayé. Le MPC doit reprendre l’instruction, selon les juges de Bellinzone.
Meurtre, assassinat, multiples violations de la loi fédérale interdisant les groupes «Al-Qaïda» et «Etat islamique» ainsi que les organisations terroristes, tentative de meurtre, lésions corporelles simples, tentative d’incendie intentionnel, tentative d’explosion, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants… La liste des faits reprochés à O., l’homme qui a tué Joao* dans un kebab à Morges en 2020, est très longue.
Mais, selon le Tribunal pénal fédéral (TPF), le Ministère public de la Confédération (MPC) doit revoir son acte d’accusation du 14 juin 2022. «Au terme d’un examen sommaire, il apparaît que l’acte d’accusation n’est pas complet en ce sens qu’il ne décrit pas suffisamment l’état de fait de certains reproches adressés au prévenu et ne satisfait dès lors pas à la maxime d’accusation à plusieurs égards», a déclaré le TPF.
Ainsi, en ce qui concerne le soutien présumé du prévenu à l’organisation «Etat islamique», les juges de Bellinzone estiment que le MPC n’a pas suffisamment étayé l’accusation et s’est borné à mentionner «laconiquement le fait que le prévenu aurait échangé 2’597 messages avec I., aurait envoyé à J. 169 fichiers images, 4 fichiers audio et 3 fichiers vidéo de propagande, aurait présenté à K. «2 à 3 vidéos» de violence extrême et enfin aurait partagé à «de tiers non identifiés» 50 images de violence ou de propagande». Selon le TPF, le MPC n’indique pas les faits constituant des actes de propagande. «Il incombe au MPC d’identifier la nature de chacun de ces messages afin de permettre à la Cour de retenir ou d’écarter l’infraction reprochée au prévenu. En outre, le descriptif de l’état de fait ne fournit aucune indication sur le lieu où la propagande reprochée aurait été commise ni sur son éventuel lien avec l’organisation «Etat islamique»(…). Enfin, l’acte d’accusation n’explique pas quels sont les effets et les buts escomptés par le prévenu en diffusant la propagande qui lui est reprochée», a décidé le TPF. Tous ces éléments pris en compte, le TPF a estimé que «l’acte d’accusation doit être complété» afin que la Cour puisse «comprendre sans ambiguïté les actes concrètement reprochés au prévenu».
«Aucun élément de preuve matérielle»
Quant aux accusations de lésions corporelles et de menaces, selon le TPF, «le descriptif ne renvoie à aucun élément de preuve matérielle propre à démontrer, respectivement à infirmer, la réalisation d’une atteinte sur la victime présumée». Plusieurs autres manquements ont été déplorés par les juges: absence de preuve sur la létalité de coups de stylo sur le cou d’un gardien de prison ou encore un agent de la police fédérale qui aurait été agressé par le prévenu mais dont l’identité non déclinée rend impossible son éventuelle audition par la Cour.
Des experts qui se contredisent
Sur le plan de la santé mentale du prévenu, le TPF a retenu que les trois expertises versées au dossier comportent «des contradictions et/ou des éléments d’information dorénavant périmés». Les juges de Bellinzone recommandent de lever les contradictions et de procéder à une mise à jour du diagnostic «par le biais d’une expertise de synthèse».
Jugé incomplet, le dossier a été renvoyé au Ministère public de la Confédération pour qu’il administre les moyens de preuves manquants.
(apn)