L’exode vers le Sud, ça fait partie de nous, comme le sirop d’érable, les feuilles qui changent de couleur en automne et nos tempêtes de neige qui impressionnent tout le monde sur la planète, sauf les Russes qui sont rompus à toutes les misères. « Demain, l’hiver, je m’en fous. Je m’en vais dans le Sud au soleil. » : ça devrait être ça, notre hymne national !
Le déferlement de l’ouragan Ian vient de nous rappeler qu’il faudra se montrer plus prudents en « plantant nos orteils dans le sable doux », pour paraphraser Robert Charlebois, qui ne se doutait pas, il y a cinquante-cinq ans, que nos projets de vacances pouvaient être, en quelques heures à peine, aussi violemment saccagés.
Il faut se faire une raison, les scientifiques observent que les tempêtes tropicales les plus violentes deviennent de plus en plus… violentes et que ces tempêtes les plus violentes deviennent, par surcroît, de plus en plus fréquentes.
Ce sont, pour nous en Amérique du Nord, des ouragans, ailleurs, des cyclones ou des typhons, mais il s’agit essentiellement d’énormes machines de vent et de pluie alimentées par l’eau et l’air chauds de l’océan.
CACHEZ-VOUS DU VENT ! SAUVEZ-VOUS DE L’EAU !
Les roulottes renversées, les maisons arrachées de leur fondation, les bateaux empilés dans les rues de Fort Myers : voilà ce que provoquent des pointes de vents de 240 km/h ! Comme je l’ai cependant vu tant d’autres fois dans ma carrière – lors du déchaînement des ouragans Gustav, Rita et Katrina, par exemple –, la crue des eaux poussée par Ian, couplée à des pluies torrentielles, se profile pour être, en Floride et le long de la côte Atlantique, plus dévastatrice et meurtrière encore.
À La Nouvelle-Orléans en 2005, le passage de l’ouragan Katrina avait fait plus de 1800 morts. Les grands coupables n’avaient pourtant pas été les vents qui nous avaient chahutés de tous bords pendant des heures. J’ai plutôt vu le lendemain et dans les jours qui ont suivi les eaux du golfe du Mexique ajoutées à celles du lac Pontchartrain envahir les quartiers les plus vulnérables de la grande cité louisianaise.
Une réalité qui ne fera que s’aggraver à entendre les spécialistes, parce que les changements climatiques – encore eux – contribuent à une augmentation constante du niveau des mers.
LE PRIX DE L’INACTION
Les experts ont calculé que, depuis 1880, le niveau des mers et des océans a grimpé, en moyenne, de 20 à 23 cm, les deux tiers de cette hausse ayant débuté à la fin des années 90.
Et selon un groupe d’experts de l’ONU, ce niveau devrait bondir de plus d’un mètre d’ici 2100. Bonjour les dégâts !
Tout cela coûte cher. En vies humaines, certainement. Et en dévastations de toutes sortes. Juste en 2021, pour les vingt pires catastrophes climatiques que les États-Unis ont connues, l’Agence d’observation océanique et atmosphérique a établi la facture à 145 milliards de dollars. Uniquement pour 2021 !
Sur cinq ans, les États-Unis ont eu à absorber pour près de 750 milliards de dollars de dommages dus à ces catastrophes. On peut continuer à faire comme si de rien n’était, mais jamais « rien » n’aura été aussi hors de prix.
Les catastrophes climatiques, de pire en pire
- 56 | Le nombre de catastrophes météorologiques et climatiques aux États-Unis au cours des trois dernières années (de 2019 à 2021) avec des pertes dépassant un milliard de dollars chacune.
- 20 | Le nombre de catastrophes météorologiques et climatiques que les États-Unis ont connues en 2021, chacune entraînant des pertes d’au moins un milliard de dollars.
- 7e | 2021 a été la septième année consécutive au cours de laquelle au moins 10 événements catastrophiques d’un milliard de dollars chacun se sont produits aux États-Unis.
- Le coût total de ces événements, l’an dernier, a atteint 145 milliards de dollars.
- 2 155 milliards $ | Le coût total approximatif des dommages causés par les catastrophes météorologiques et climatiques aux États-Unis de 1980 à 2021.
LES OURAGANS LES PLUS COÛTEUX DE L’HISTOIRE
Il est trop tôt pour tirer un bilan du déferlement de l’ouragan Ian, mais les estimations initiales vont de 47 milliards à 100 milliards de dollars.
Source : NOAA, Agence américaine des océans et de l’atmosphère, 2022)