Jeudi 8 décembre est un anniversaire dont se passeraient volontiers les proches d’Olivier Dubois. Cela fait vingt mois que le journaliste est retenu par un groupe djihadiste après avoir été enlevé à Gao, dans le nord du Mali. Six cent neuf jours précisément que l’homme de 48 ans est devenu une monnaie d’échange malgré lui. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux le 5 mai 2021, le Français, qui vit et travaille au Mali depuis 2015, se disait entre les mains du Groupe de soutien de l’islam et des musulmans (GSIM), une alliance djihadiste au Sahel, liée à Al-Qaida. Il reste aujourd’hui le seul otage français recensé dans le monde, depuis la libération, en octobre 2020, de Sophie Pétronin, également enlevée au Mali.
Travaillant à la pige – à l’article – pour le quotidien Libération et pour les hebdomadaires Le Point et Jeune Afrique, le journaliste indépendant est décrit par ses proches comme quelqu’un de solaire, curieux, aimant débattre et faire découvrir ce qui l’entoure. Son ami Marc de Boni, ancien grand reporter au Figaro, dresse le tableau d’une personne ayant compris très tôt que des événements déterminants se jouaient au Mali. « Il avait saisi que le pays allait devenir l’épicentre de phénomènes aux répercussions géopolitiques touchant aujourd’hui le monde entier », raconte-t-il, avant de louer la grande rigueur d’Olivier Dubois. Un professionnalisme qui n’a, malheureusement, pas empêché son enlèvement, le jeudi 8 avril 2021.
Depuis cette date, plusieurs actions ont été menées par ses proches et des soutiens à la liberté de la presse pour sensibiliser à la condition d’otage d’Olivier Dubois, notamment à travers plusieurs manifestations, des tribunes ou encore une pétition. Pour Nicolas Hénin, ancien journaliste ayant été otage en Syrie durant dix mois en 2013-2014, les différents comités de soutien permettent de maintenir une pression réaliste sur les responsables politiques français et maliens. « C’est aussi intéressant vis-à-vis des groupes terroristes, qui nous dépeignent en individualistes, de montrer qu’on se serre les coudes et qu’on n’abandonne pas », fait-il valoir. Reporters sans frontières (RSF) a, par exemple, fait projeter le portrait de M. Dubois sur le Panthéon, à Paris, des banderoles ont été accrochées au fronton de plusieurs mairies, et des bracelets de l’association SOS Otages ont été distribués. Mais cela ne suffit plus : l’opinion publique semble plus absente qu’auparavant.
« Liens avec les rédactions plus diffus »
« C’est une double peine au quotidien », dénonce sa demi-sœur Canèle Bernard. « Peine de subir son absence et qu’on ait du mal à faire parler de son calvaire », dit celle qui milite pour évoquer l’angoisse vécue par sa famille au président de la République, Emmanuel Macron. Cette moindre mobilisation médiatique s’explique aussi par son statut de journaliste pigiste de presse écrite, alors que ces derniers jouent, pourtant, un rôle essentiel dans l’information internationale. « Comme tout pigiste, les liens avec les rédactions sont plus diffus, analyse Elise Descamps, journaliste elle-même pigiste et membre du comité de soutien. Pourtant, ils prennent autant de risques, le tout avec en plus une précarité accrue au quotidien. »
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