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« Napoléon, empereur raté des relocalisations »

« Napoléon, empereur raté des relocalisations »



Lorsque les relations entre grandes puissances deviennent tendues, les produits et ressources provenant de contrées avec qui l’on commerçait jusqu’alors pacifiquement peuvent devenir des armes économiques. Les chaînes d’approvisionnement, les routes commerciales et les réseaux de communication peuvent tous être accessibles à l’adversaire. Cette crainte a été ressentie par la France au cours du XIXe siècle, dans le cadre de la guerre qui l’a opposée à l’Angleterre. En mai 1803, les ports français ont été soumis au blocus des vaisseaux de Sa Majesté, devenant impossibles à atteindre par voie maritime, alors l’essentiel du commerce à l’époque.

L’interdiction d’importer toute marchandise par ce biais a privé la France de ressources précieuses telles que les épices, le café et le sucre des colonies, ainsi que du coton provenant du Levant, d’Egypte, des Caraïbes et du Brésil. À l’époque, l’industrie textileétait la principale activité industrielle en France, et selon des données de 1805, 4 103 manufactures cotonnières étaient en activité à cette époque. Les circuits alternatifs via des ports neutres, plus coûteux, ont également été interrompus lorsque Napoléon a tenté d’étouffer l’économie d’Albion en interdisant toute importation de marchandise anglaise en novembre 1806.

Ainsi, l’empereur français s’est mis en tête de remplacer chaque denrée importée par un équivalent « relocalisé », tel que le pastel pour l’indigo ou la betterave pour la canne à sucre. Cependant, la mesure la plus surprenante qu’a prise Napoléon a été de tenter de faire pousser du coton dans le sud de la France et le nord de l’Italie. Ce projet, présenté lors d’un séminaire sur « Les économies d’Empire », le 17 mars dans l’École des hautes études en sciences sociales, a été décrit par Laurent Brassart, de l’Institut de recherches historiques du Septentrion à l’université de Lille.

La mobilisation de l’administration a été rapide, une circulaire datant du 12 février 1807 ordonnant à tous les préfets de remonter à Paris toutes les publications des botanistes ou voyageurs sur le sujet. Suivant ces travaux, l’agronome Charles Philibert de Lasteyrie a publié en 1808 une étude exhaustive de 400 pages intitulée « Du cotonnier et de sa culture », dans laquelle il concluait à la proximité des « climats » tropicaux avec les « climats » méditerranéens, le coton étant ou ayant été cultivé en Sicile, à Naples, à Malte et en Andalousie.

Le ministère a également porté cette question au Muséum d’histoire naturelle et à la chaire de botanique de l’université de Montpellier pour en vérifier la faisabilité. Henri-Alexandre Tessier, de l’Institut, a légitimé l’hypothèse en soumettant une instruction sur la culture du coton en France au ministre. La tentative d’introduire la culture du coton en France n’a finalement pas abouti, mais elle reste un exemple d’initiative proactive de l’administration lorsqu’une guerre économique menaçait l’économie nationale.

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