Perdu au milieu des champs, le bâtiment en pierre, avec ses hautes fenêtres encadrées de brique et sa façade surmontée d’un fronton, détonne dans le paysage verdoyant. « Ça surprend toujours quand je dis qu’il n’y a rien autour de la mairie du Favril [Eure-et-Loir], à part des pâturages et de la forêt, mais c’est le cas », s’amuse John Billard, l’édile de ce petit village niché entre les grandes plaines céréalières de la Beauce et les collines bocagères du Perche. L’édifice aura connu des fortunes diverses. Autrefois asile pour les pauvres, puis école communale, il abrite désormais la mairie. Et, depuis 2019, une cabine de téléconsultation médicale.
La première installée en France dans une mairie. Une originalité qui continue, trois ans plus tard, à attirer les curieux. La mairie ne compte plus les élus qui se sont déplacés jusqu’à son cabinet médical connecté. Sauver les déserts médicaux grâce à la téléconsultation ? En 2017, lorsque son projet prend forme, l’idée est loin d’être une évidence. John Billard se heurte pendant des mois aux réticences des administrations territoriales et des autorités de santé. Jusqu’à Matignon, qui le convoque, intrigué par sa démarche. Un casse-tête, mais l’édile persiste.
« Il faut se rendre compte qu’à l’époque il fallait au moins douze à quinze jours aux habitants de la commune pour décrocher un rendez-vous chez un généraliste », explique-t-il. Après presque deux ans de bataille, l’accord est finalement donné. La cabine de téléconsultation accueille les premiers patients. Coût total, en incluant les travaux d’aménagement du local où est installée la cabine : 100 000 euros, financés à 80 % par les collectivités locales et l’Etat. S’y ajoutent les 1 200 euros déboursés chaque mois par la mairie du Favril, à titre de frais de fonctionnement.
Pallier l’absence de médecins
Avec quatre à cinq patients en moyenne chaque semaine, l’opération n’est pas financièrement rentable. Mais « les habitants apprécient ce service, qui vient répondre à leurs besoins », dit Laurence Elisabeth, la secrétaire de mairie. Depuis l’arrivée de la cabine, c’est elle qui se charge d’accueillir les patients, de les accompagner jusqu’au local, de nettoyer et de désinfecter après leur passage. Pour John Billard, le bilan est plus que satisfaisant.
« On a même sauvé une vie !, raconte-t-il. Le médecin a détecté une urgence chez une patiente, alors qu’il auscultait à distance. Les pompiers sont immédiatement venus la chercher pour la conduire à l’hôpital de Chartres. » L’expérience favriloise a fait des émules. De plus en plus de collectivités territoriales s’équipent aujourd’hui de cabines de téléconsultation pour pallier l’absence de médecins. Une responsabilité qui ne relève pourtant pas de leurs compétences, cette attribution étant normalement réservée à l’Etat.
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