Cette fois-ci, les accusations sont claires et directes. Le quintuple champion du monde d’échecs Magnus Carlsen a publié, dans la soirée du 26 septembre, un tweet dans lequel il accuse ouvertement le joueur Américain Hans Niemann, âgé de 19 ans et 49e joueur au classement de la fédération internationale, de triche.
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« Je crois que Niemann a plus triché, et plus récemment, qu’il ne l’a publiquement admis, écrit le Norvégien de 31 ans dans un communiqué publié sur le réseau social. Sa progression en face-à-face est inhabituelle et, tout au long de notre partie à la Sinquefield Cup [au début de septembre aux Etats-Unis], j’ai eu l’impression qu’il n’était même pas stressé ou entièrement concentré sur le jeu. » Magnus Carlsen ajoute par ailleurs qu’il ne « souhaite pas jouer contre des personnes qui ont triché plusieurs fois par le passé ».
Depuis le début du mois, le monde des échecs est en ébullition. Le 4 septembre, le Norvégien s’était étonnamment retiré de la Sinquefield Cup après une défaite contre Hans Niemann. Dans un tweet déjà plein de sous-entendus, Magnus Carlsen avait, dans la foulée, mis en ligne une vidéo de 2014 de José Mourinho, alors à la tête de l’équipe anglaise de football de Chelsea. « Je ne préfère pas parler. Si je parle, je vais avoir de gros ennuis », disait l’entraîneur portugais en interview, à l’issue un match – perdu – dont il avait été exclu.
I’ve withdrawn from the tournament. I’ve always enjoyed playing in the @STLChessClub, and hope to be back in the fu… https://t.co/M9f6ru9ebT
Deuxième acte lundi 19 septembre. Alors qu’il disputait une partie en ligne contre le jeune Américain dans le cadre de la Julius Baer Generation Cup, Magnus Carlsen a cette fois abruptement éteint sa webcam, sans un mot, devant des commentateurs et des spectateurs médusés.
Prêt à « jouer nu »
Hans Niemann, qui connaît une progression fulgurante, traîne, il est vrai, une réputation un peu sulfureuse dans le milieu des échecs. Il a admis avoir triché à 12 ans et à 16 ans lors de parties en ligne, en s’aidant d’un ordinateur. Cet écart de jeunesse lui a valu d’être banni par Chess.com, la plate-forme de jeu d’échecs en ligne de référence. Le jeune prodige assure cependant ne jamais avoir fraudé lors d’une partie en face-à-face, se disant même prêt à « jouer nu » pour prouver sa bonne foi.
Pourquoi nu ? Parce que les spéculations sur la manière dont il tricherait, grâce à une aide technologique extérieure, vont bon train : oreillette indétectable, implant sous-cutané et même, hypothèse la plus invraisemblable, l’utilisation d’un plug anal connecté qui lui permettrait, à coups d’impulsions, d’être « téléguidé » par une tierce personne elle-même aidée d’un ordinateur…
Depuis, les experts du jeu ne savent plus où donner de la tête. Dans L’Equipe, la joueuse française Yosha Iglesias estime « impossible » d’obtenir une preuve formelle de triche. « C’est un cas sans précédent », a commenté le joueur néerlandais Anish Giri. Au micro de la chaîne norvégienne TV2, Jon Ludvig Hammer, consultant et joueur de haut niveau, a déploré « une attitude totalement inacceptable [de la part de Carlsen] de perdre délibérément ».
De son côté, dans son communiqué rageur du 26 septembre, Magnus Carlsen, qui espère que « la vérité sur cette affaire, quelle qu’elle soit, sortira », a appelé la discipline à renforcer ses mesures de sécurité et de détection de la triche.