Ancienne handballeuse, la sociologue Béatrice Barbusse est vice-présidente déléguée de la Fédération française de handball (FFH). Elle a été l’une des premières femmes en France à diriger, de 2007 à 2012, un club professionnel masculin, l’US Ivry. En 2016, elle avait publié un livre, Du sexisme dans le sport (Anamosa), dont une nouvelle édition enrichie est sortie en février.
Vous avez piloté un plan de féminisation des instances dirigeantes du handball en France. Cinq ans après le scandale Weinstein, qu’est-ce que le mouvement #metoo a changé dans le monde du sport ?
Le mouvement #metoo a permis d’enclencher un processus de libération de la parole, à commencer par celle de la patineuse Sarah Abitbol. Beaucoup d’affaires sont remontées au niveau du ministère des sports, dont un grand nombre concerne des faits datant des années 1980 et 1990. Quelque chose est en train de bouger dans le sport français, mais nous devons rester vigilants : il y a toujours des femmes qui ont peur de signaler des faits dont elles sont victimes.
Les fédérations sportives ont-elles pris la mesure du problème ?
Je ne suis pas satisfaite de l’attitude du monde sportif en général face aux violences sexuelles et au sexisme. Il y a beaucoup d’immobilisme. C’est un chantier prioritaire parce que les violences sexuelles détruisent des vies, non seulement celles des victimes et de leurs proches, mais aussi celles des familles des agresseurs, de leur entourage. C’est pour cela qu’il faut sensibiliser les personnes décisionnaires au sein des fédérations. Il faut clarifier les processus utilisés dans le traitement des affaires de violence sexuelle. Trop souvent, les commissions de discipline qui doivent statuer à la suite des signalements reçus ne prennent aucune sanction ou ne sont pas saisies.
En outre, le temps sportif n’est pas le temps judiciaire. Tant qu’il n’a pas été condamné par la justice, un entraîneur bénévole coupable d’une agression sur un enfant et qui a été radié de sa fédération peut commettre d’autres agressions sur d’autres enfants dans une autre fédération sportive car il n’y a pas encore de croisement de fichiers. A la Fédération de handball, la commission fédérale peut prendre des sanctions qui peuvent aller jusqu’à la radiation. Depuis janvier 2020, il y en a eu quatre.
Quel dispositif avez-vous mis en place à la Fédération française de handball ?
A la FFH, nous essayons d’améliorer notre dispositif pour protéger les victimes au fur et à mesure que les affaires remontent. Nous avons décidé que les affaires graves pour lesquelles il existe des éléments de preuve doivent être traitées au niveau national. Cela afin d’éviter le manque d’objectivité que les liens amicaux au sein des commissions territoriales peuvent entraîner. Des réactions du type « lui, ce n’est pas possible, je le connais bien » sont encore très courantes, mais ce n’est pas acceptable. Nous devons aller encore plus loin en créant une commission de discipline complètement indépendante.
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