Dans une Assemblée nationale en majorité relative où les équilibres sont mouvants, tout est bon à prendre pour embarrasser le camp d’en face. Chaque instrument législatif, utilisé à bon escient, peut enfoncer un coin dans l’unité affichée de ses adversaires et remettre en cause toute discipline de groupe.
C’est ce à quoi s’emploient les députés de La France insoumise (LFI) avec leur niche parlementaire, prévue jeudi 24 novembre. Au menu, douze propositions de loi, dont la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et de la contraception, l’interdiction de la corrida ou la hausse du smic à 1 600 euros net.
Pour cette journée de la session parlementaire où ses 75 députés ont la main sur l’ordre du jour jusqu’à minuit, le groupe LFI entend remettre sur la table ses marqueurs programmatiques. « Nous portons les préoccupations de la majorité des Français », veut croire la députée de Seine-Saint-Denis Aurélie Trouvé. Sondages à l’appui : « On n’a certes pas gagné électoralement de majorité, mais on a gagné une grande partie de la bataille des idées. »
D’autant que le contexte a changé par rapport au précédent quinquennat. Quand les macronistes disposaient de la majorité absolue, les groupes parlementaires des oppositions étaient conscients que leurs textes avaient finalement peu de chance d’aboutir – faute d’accord au Sénat ou avec le gouvernement. Aujourd’hui, la situation de majorité relative ouvre de nouvelles perspectives.
« Dans la configuration dans laquelle on est, où l’on se demande tous les jours si ça va tenir, si on va dissoudre ou non, les niches sont importantes. Elles obligent chacun à dire où il se situe politiquement », estime la députée (Horizons, Val-d’Oise) et vice-présidente de l’Assemblée nationale Naïma Moutchou. « Le but des niches, c’est aussi de mettre en difficulté les autres groupes, et là, c’est plutôt bien joué », constate le député Les Républicains (LR) de la Loire Antoine Vermorel-Marques, à propos des propositions de loi déposées par les « insoumis ».
Crispations en interne
Celles-ci ont provoqué un certain flottement chez les autres groupes parlementaires, et même chez leurs alliés socialistes et communistes, qui, devant l’impossibilité parfois de définir une position unitaire – comme sur la constitutionnalisation de l’IVG ou sur l’abolition de la corrida –, ont décidé d’accorder une liberté de vote à leurs élus.
Mais le choix de ces textes « clivants » dans l’Hémicycle s’est très vite retourné contre les députés LFI, qui font face à plusieurs centaines d’amendements déposés par les autres groupes du Palais-Bourbon. Au point de compromettre l’examen en séance de la plupart de leurs mesures, faute de temps suffisant.
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