Nostalgie politicienne ? La scène politique ivoirienne actuelle ressemble à une boîte de production audiovisuelle qui tenterait de réunir le casting d’une vieille série télévisuelle. D’année en année, les dénouements judiciaires locaux ou internationaux libèrent les faits et gestes des grandes figures des années 2000.
Suite au récent et pondéré retour de Charles Blé Goudé en Côte d’Ivoire, après neuf années passées dans le labyrinthe de la Cour pénale internationale de La Haye, la distribution des premiers rôles de l’époque est presque relocalisée : Alassane Ouattara, Henri Konan Bédié ou encore Laurent et Simone Gbagbo. Mais quid de Guillaume Soro ?…
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Dernier grand exilé du personnel politique de la crise ivoirienne, boudé lors de sa tentative avortée de retour en 2019, condamné à la prison à vie en mai 2021 mais toujours ambitieux, l’ancien et précoce chef de gouvernement et président de l’Assemblée nationale ne s’attendait peut-être pas à recevoir le soutien entendu, ce samedi 10 décembre, dans la région de La Mé…
La thèse de Gbagbo
C’est dans le stade de la ville d’Adzopé, à 102 km au nord d’Abidjan, que Laurent Gbagbo a donné, devant ses partisans, un avis sans ambiguïté : « Il faut que Soro Guillaume rentre ». Si le second a été le Premier ministre du premier, il n’échappe pas à de lourds reproches : « Il a fait une guerre civile », selon l’ancien chef de l’État qui précise que le nommer chef de gouvernement était alors l’une des « manières de tuer un conflit politique ». Comme pour dédouaner un peu Soro et répéter un storytelling bien rodé, Gbagbo rappelle sa thèse : la « guerre civile est partie de Ouagadougou avec la complicité du Burkina et d’autres pays. » Et le septuagénaire de jouer les vieux sages en ouvrant les bras au quinquagénaire, certain qu’au retour éventuel de son ancien ministre de cohabitation, « il n’y aura plus de problème de son côté, en tout cas ».
Aucun engagement ne saurait encore surprendre, dans cette Côte d’Ivoire passée maître dans les danses qui imposent le changement de partenaire. Après les tangos « Ouattara-Gbagbo » de 1994, « Gbagbo-Bédié » de 2000 et « Ouattara-Bédié » de 2015, pourquoi ne pas intégrer la génération suivante dans la danse ? Peut-être que, dans son appel au grand pardon, Laurent Gbagbo mise-t-il sur une vague d’amnisties qui pourrait dégouliner sur la grâce présidentielle dont il a bénéficié, mais qu’il juge insuffisante ?
Malgré la mansuétude d’Alassane Ouattara, l’ex-chef de l’État reste en effet sous le coup d’une condamnation par la justice. Or le Parti des peuples africains de Côte d’Ivoire (PPA-CI) le considère comme son « candidat naturel » à l’élection présidentielle de 2025…