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« Le Maroc en demi-finales, c’est la revanche des pays les plus défavorisés »

« Le Maroc en demi-finales, c’est la revanche des pays les plus défavorisés »


Les joueurs de l’équipe marocaine célèbrent leur victoire en quart de finale de la Coupe du monde de football face au Portugal, au stade Al Thumama, à Doha, Qatar, samedi 10 décembre 2022.

L’historien Yvan Gastaut, maître de conférences à l’université Côte d’Azur (UCA) et coauteur, avec Pascal Blanchard et Hadrien Dubucs, de l’Atlas des immigrations en France (Autrement, 2021), analyse les relations entre la France et le Maroc, à travers le football.

Que peut-on dire des relations entre la France et le Maroc dans l’histoire du football ?

C’est une histoire longue ! Ces relations se sont nouées dès la colonisation, avec l’instauration, en 1912, du protectorat de la France sur le Maroc. Le football, venu d’Angleterre, se développe en France puis au Maroc, où les Européens qui s’y installent importent la pratique du jeu, dans les clubs ou dans la rue. Les Européens jouent entre eux, les « indigènes » aussi, puis ils finissent par jouer ensemble.

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Très tôt, des joueurs marocains vont émerger dans le championnat de France métropolitain, comme Larbi Benbarek, un des meilleurs joueurs des années 1930 et 1940. Certains Européens du Maroc vont également s’illustrer, comme Just Fontaine. La pratique est intensive et importante dans cette époque d’avant la décolonisation. Le football, au Maroc comme dans d’autres pays du Maghreb, a été un sport de révélations, peut-être parfois de confrontations, mais aussi un sport qui a mis côte à côte des joueurs « indigènes » et européens.

Après l’indépendance, en 1956, des liens sont maintenus, notamment avec une forte présence dans le championnat de France de joueurs marocains ainsi que de joueurs d’origine marocaine, c’est-à-dire des fils de travailleurs immigrés. Les Marocains se sont approprié le football, venu de la colonisation, mais des formes de domination ont persisté, notamment parce qu’on a vu beaucoup plus d’entraîneurs français au Maroc que d’entraîneurs d’origine marocaine en France. Aujourd’hui encore, le championnat de France reste plus prestigieux et le choix de l’équipe de France, lorsqu’il est à la portée des joueurs, est toujours mieux coté que celui de l’équipe du Maroc.

Mais le football marocain arrive aujourd’hui à un niveau d’accomplissement qui lui permet de se confronter aux plus grandes équipes mondiales…

C’est ce que prouve cette demi-finale. On voit les étapes franchies dans les dernières décennies. Le Maroc avait fait une belle campagne de Coupe du monde en 1986, mais cette fois, il a passé une étape supplémentaire consistant effectivement à se hisser au niveau des plus grands. On peut penser que le système sportif marocain a engendré cette possibilité qu’un descendant de l’immigration marocaine en France puisse, de manière équitable, choisir entre l’équipe du Maroc ou l’équipe de France en effectuant un choix du cœur plutôt qu’un choix strictement de carrière.

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