La délégation française de judo fait grise mine au sortir des championnats du monde, disputés cette semaine à Tachkent en Ouzbékistan. Avec cinq médailles (une en or, une en argent et trois en bronze), l’équipe de France pointe à la 7e place du classement et réalise son plus mauvais résultat depuis les Mondiaux d’Osaka, en 2003. Une situation inquiétante, à deux ans des Jeux olympiques de Paris et alors que le judo est un fournisseur important de breloques pour la France.
Invité d’Europe 1 Sport jeudi, Stéphane Nomis, le président de la Fédération française de judo, partage sa déception. « Cinq médailles, c’est toujours ça de pris, mais c’est très en-deçà de ce qu’on attendait. On en attendait au moins sept, et plus d’or surtout. C’est là que se fait la vraie différence », estime-t-il au micro d’Europe 1.
« Là, on a atteint les abymes »
Ce bilan est certes décevant, mais aussi contrasté. Si les filles ont plutôt bien performé, à l’image de Romane Dicko, sacrée championne du monde en catégorie +78 kg, aucun garçon n’a réussi à monter sur un podium à l’exception de l’épreuve par équipes mixtes qui a vu les Bleus s’incliner jeudi en finale face aux Japonais. « On peut se remettre en question chez les hommes, mais chez les femmes, on fait une médaille sur deux. Beaucoup de sports aimeraient avoir 50% de médaillés », tempère le président de la fédération française.
Le président de la Fédération française de judo Stéphane Nomis appelle à un changement d’entraînement pour les athlètes français.
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« Ce sont les réglages que l’on va devoir affiner, il va falloir reprendre l’entraînement correctement », appuie Stéphane Nomis, qui relève un bilan « catastrophique » chez les garçons. « On finit 24e nation (…). Ça faisait longtemps que l’on descendait, là on a atteint les abymes », tranche-t-il, ajoutant que le but est de « trouver des solutions pour l’équipe masculine parce que c’est ce qui fera la différence à Paris », aux JO de 2024.
Un changement de méthode d’entraînement
Face à ce bilan plus que décevant, il faut néanmoins rappeler que les deux leaders de la délégation tricolore, Clarisse Agbegnenou et Teddy Riner, manquaient à l’appel de cette édition des championnats du monde. « Ce qui est sûr, c’est qu’on doit changer notre système d’entraînement masculin, et en faire des gens qui gagnent parce que c’est sur le tapis que ça ne gagne pas », insiste Stéphane Nomis auprès de Céline Géraud, ancienne championne de judo et aujourd’hui cheffe du service société d’Europe 1.
« Leur technique n’est pas assez impactante, ils ne font pas tomber. Au niveau tactique, c’est toujours nous qui prenons un troisième shido (carton jaune), et au sol, on perd des fois de manière dramatique. On a un gros travail à faire sur la défense », avance le président de la Fédération française de judo, comparant avec le modèle d’entraînement des Japonais qui ont, eux, terminé à la première place du classement avec 12 médailles glanées.
15 jours pour trouver des solutions
L’ex-judoka souhaite un changement radical dans la méthode d’entraînement des Bleus. « On va devoir les entraîner en mode startup, en mode équipe olympique restreinte dès demain (vendredi) ou dans 15 jours, le temps de mettre en place la nouvelle gouvernance. On va faire de notre mieux pour remonter dans le classement, au moins dans les huit premiers mondiaux », espère Stéphane Nomis. « Il faut faire une vraie métamorphose, il faut se renouveler, proposer quelque chose en rupture avec ce qui se faisait avant. »
Le président a donné quelques jours à la prochaine gouvernance pour trouver des solutions. « Est-ce que l’Insep est encore le bon modèle ? », s’interroge-t-il ensuite. « Ça fait 20 ans qu’on a changé ce modèle, il ne marche plus. Les ministères vont devoir nous suivre, comme l’Agence nationale du sport. »
Abordant le parcours décevant de quelques judokas dans ces derniers Mondiaux, Stéphane Nomis estime que les responsabilités sont partagées. « C’est la faute du staff, des athlètes. On est à leur service, il y a les moyens financiers mis par l’État, les membres qui payent la fédération, on a le plus gros budget des pays pour finir 24e mondial. C’est une cata pour nous », conclut le président de la fédération.