Yuesheng Wang n’est pas le premier présumé espion chinois à être arrêté en Occident. Au contraire, l’espionnage en provenance de la Chine inquiète de plus en plus aux États-Unis ainsi que de l’autre côté de l’océan.
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Cet été, dans une rare sortie commune, les dirigeants du FBI (police fédérale américaine) et du M15 (services secrets de renseignement britannique) ont sonné l’alarme sur les dangers de l’espionnage commercial chinois.
Le directeur du FBI, Christopher Wray, a même dit que le gouvernement chinois était la «plus grande menace à long terme pour [la] sécurité économique et nationale» des États-Unis.
«Le gouvernement chinois est déterminé à voler votre technologie […] et à l’utiliser pour saper votre entreprise et dominer votre marché. Et il est déterminé à utiliser tous les outils à sa disposition pour le faire», a énoncé M. Wray, dans l’allocution commune destinée à mettre en garde la communauté d’affaires britannique.
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Pas un nouveau problème
La problématique est loin d’être nouvelle, mais elle a pris de l’ampleur au cours des dernières années, souligne le professeur et directeur du Centre sur la sécurité internationale de l’Université Laval, Stéphane Leman-Langlois.
«Si on pouvait aller fouiller dans les fichiers secrets du SCRS [Service canadien du renseignement de sécurité], on s’apercevrait que ça fait quand même un bout de temps qu’ils s’intéressent à la question», explique-t-il.
Quelques cas de potentielle interférence chinoise ont d’ailleurs été médiatisés. En 2020, le quotidien La Presse dévoilait que les États-Unis réclamaient l’extradition d’un professeur de McGill, Ishiang Shih, en lien avec l’exportation illégale vers la Chine de micropuces liées à une technologie militaire. Le frère de ce dernier a d’ailleurs été condamné l’an dernier à plus de cinq de prison en raison de cette affaire.
Puis, deux ans plus tard, la Gendarmerie royale du Canada arrêtait Wanping Zheng, un ressortissant chinois de 61 ans, soupçonné d’avoir œuvré pour les intérêts d’une compagnie chinoise alors qu’il travaillait à l’Agence spatiale canadienne.
Mais c’est la première fois qu’un individu serait formellement accusé d’espionnage économique au Canda, affirme Charles Burton, de l’Institut Macdonald-Laurier, et ex-conseiller à l’ambassade du Canada en Chine.
«Nos pays alliés, comme l’Australie, la Grande-Bretagne ou les États-Unis ont déjà réussi à arrêter et à faire accuser des agents de l’État chinois qui avaient obtenu illégalement des technologies. Jusqu’à maintenant, le Canada avait lui échoué à en traduire devant la justice. […] Pourtant, la présence d’espions chinois est très importante au Canada», explique M. Burton.
«Le fait qu’on ait réussi enfin à en arrêter pourrait indiquer que la Gendarmerie royale du Canada a amélioré ses connaissances en la matière et qu’elle a maintenant plus de ressources pour y faire face J’espère que cela se traduira en davantage d’arrestations et découragera l’État chinois de continuer en ce sens.»
D’autres cas partout dans le monde
L’espionnage chinois s’est imposé comme une tendance lourde un peu partout dans le monde au cours des dernières années.
Encore tout récemment, en octobre, les États-Unis annonçaient un dépôt d’accusation contre 13 individus soupçonnés de travailler pour les services secrets chinois et d’avoir notamment tenté d’entraver des poursuites américaines contre le géant Huawei.
L’an dernier, les médias britanniques rapportaient que la Grande-Bretagne avait expulsé trois espions chinois qui se faisaient passer pour des journalistes depuis plusieurs mois.
En 2019, un espion chinois retournait carrément sa veste et dévoilait aux autorités australiennes les méthodes d’infiltration de l’État chinois.
D’autres cas allégués ou avérés ont également été recensés ailleurs en Europe, notamment en France et en Suisse.