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Crime organisé: le tueur à gages Frédérick Silva devient délateur

Crime organisé: le tueur à gages Frédérick Silva devient délateur


Le tueur à gages Frédérick Silva, qui était à la solde du crime organisé et incarcéré pour meurtres, vient de retourner sa veste en acceptant de devenir délateur. 

• À lire aussi: Un tueur à gages écope de la prison à vie pour trois meurtres

Notre Bureau d’enquête a appris de plusieurs sources fiables que ce criminel endurci, qui a eu 42 ans au début de juin, se trouve sous protection policière depuis jeudi avant-midi. 

La Sûreté du Québec (SQ) et le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) formeront une brigade spéciale pour «travailler ensemble» avec leur futur témoin repenti dans une enquête qui pourrait entraîner des «impacts majeurs» dans le crime organisé, nous ont mentionné les hauts gradés Benoit Dubé et David Bertrand, respectivement de la SQ et du SPVM.

Ces derniers n’ont toutefois pas confirmé l’identité de leur collaborateur, se contentant de dire qu’il s’agit d’un «individu hautement impliqué dans le crime organisé» et «de haut niveau».

Cette nouvelle aura l’effet d’une vraie bombe au sein du crime organisé montréalais puisqu’en prenant cette décision, Silva consentirait non seulement à confesser tous ses crimes mais aussi à dénoncer et à incriminer ses employeurs, ainsi que ses complices du monde interlope. 

Frédérick Silva a notamment été condamné pour avoir tenté de tuer par balles le chef mafieux Salvatore Scoppa en 2017 — ce dernier a ensuite été assassiné dans un hôtel de Laval au printemps 2019 — en marge d’un conflit avec le clan Rizzuto. 

Parmi ses victimes de meurtre, on compte notamment l’ex-membre des Rockers et proche des Hells Angels, Sébastien Beauchamp, tué d’une balle à la tête près d’une station-service du quartier Saint-Léonard en 2018.

Plus tôt cette année, Silva a été déclaré coupable de trois meurtres et d’une tentative de meurtre. Il devait revenir devant la Cour supérieure plus tard cet été afin d’être jugé pour un quatrième meurtre. 

Escorté en hélicoptère

Frédérick Silva était détenu au Centre régional de réception, l’un des trois pénitenciers fédéraux situés à Sainte-Anne-des-Plaines. 

Or, une escouade de policiers s’y est rendue pour le chercher lors d’une opération à risque, jeudi, et ensuite l’escorter à bord d’un hélicoptère de la SQ. 

Silva restera vraisemblablement sous garde à l’intérieur d’un des postes de la SQ, entouré de mesures de sécurité exceptionnelles, et ce, jusqu’à nouvel ordre.

Alors qu’il était fiché comme l’un des 10 criminels les plus recherchés au Québec, le fugitif avait été appréhendé à l’hiver 2019 alors qu’il se terrait dans un condo du Vieux-Montréal, au terme du projet d’enquête Mégalo, conjointement mené par la SQ et le SPVM.

Craintes pour sa vie

Me Danièle Roy, l’avocate qui a défendu Silva pendant ces trois années et demie de procédures judiciaires, a réagi à la nouvelle avec stupéfaction. La criminaliste ne savait absolument rien de ce qui se tramait entre son client, la SQ et le SPVM.

«J’ai été très, très, très surprise d’apprendre cela cet après-midi», a-t-elle mentionné à notre Bureau d’enquête.

Au lendemain de sa comparution, Le Journal de Montréal avait révélé, le 27 février 2019, que Silva avait rapidement été approché par les forces de l’ordre afin de lui offrir de collaborer avec la justice et d’identifier les commanditaires de ses contrats de meurtre mais qu’il avait catégoriquement refusé de se mettre à table.

Au cours des dernières semaines, Silva a cependant changé d’avis après s’est fait prévenir par la police que sa vie était en danger et avoir réalisé qu’il vivait possiblement sur du temps emprunté.

Les meurtres récents de deux de ses présumés complices, qui étaient accusés de l’avoir aidé à fuir les policiers durant sa cavale, ont vraisemblablement influencé sa réflexion.

Le premier, Sébastien Giroux, 36 ans, qui gravitait dans l’entourage des Hells, a été criblé de balles à l’intersection des boulevards Saint-Michel et Crémazie Est, à Montréal, le 11 mai. 

Le second, Bernard Cherfan, que la police reliait à la pègre libanaise, a été tué par balles dans un restaurant de Laval, le 1er juin. 

Le premier depuis Gallant

Avant de devenir officiellement délateur et de signer son contrat avec les autorités, Frédérick Silva devra passer plusieurs semaines à dévoiler les détails de ses crimes, ainsi que les noms de ceux qui l’ont embauché ou aidé. 

Les enquêteurs devront alors tenter d’amasser d’autres éléments de preuve susceptibles de corroborer les déclarations de Silva. 

Gérald Gallant, l’ex-tueur à la solde des Rock Machine durant la guerre des motards ayant fait plus de 160 morts lors des années 90, est le dernier tueur à gages du crime organisé au Québec à être passé dans le camp des délateurs en 2006. 

Gallant, dont le parcours criminel fait l’objet d’un livre du même nom et d’un film qui sortira dans les salles de cinéma plus tard en juillet, a confessé 28 meurtres, en plus de permettre aux policiers d’appréhender 11 employeurs ou complices de ses crimes. 

D’autres tueurs à gages québécois ont également retourné leur veste pour collaborer avec la police dans le passé. 

Parmi les plus connus, on retrouve Donald Lavoie, du clan Dubois à Montréal, qui a avoué 27 meurtres en 1981; Réal Simard, un homme de main de la mafia italienne qui a admis cinq meurtres en 1984; et l’ex-Hells Angels Yves «Apache» Trudeau, qui a reconnu en 1986 avoir participé à une quarantaine de meurtres. 

DES CRIMES COMMIS PAR SILVA

21 février 2017, à Terrebonne

Une caméra de surveillance filme l’influent mafieux Salvatore Scoppa qui se fait tirer dessus par Silva et tente de lui échapper dans le stationnement d’un restaurant. Scoppa s’en tire avec une blessure à un bras mais il sera toutefois assassiné au printemps 2019 quand un tireur le crible de balles lors d’une réception familiale dans un hôtel de Laval. Son frère ainé, Andrew Scoppa, que la police considérait comme le chef intérimaire de la mafia montréalaise entre 2016 et 2017, a connu le même sort à l’automne 2019.

24 mai 2017, à Montréal

Après une dispute en pleine nuit, Daniel Armando Somoza Guildea et Silva sont expulsés du cabaret de danseuses Les Amazones, rue Saint-Jacques, dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce. Une fois à l’extérieur, le premier, âgé de 28 ans, aurait alors été atteint de deux projectiles d’arme à feu par le second qui a fui au volant d’un luxueux VUS Range Rover rouge. 

11 octobre 2018, à Laval

Alessandro Vinci, un jeune homme de 31 ans sans histoire ni antécédent judiciaire, travaille dans son concessionnaire de véhicules d’occasion qu’il exploite avec son père, dans le quartier Chomedey. Peu avant 21 h, Silva entre dans le commerce, se dirige vers la victime et l’atteint de plusieurs projectiles avant de repartir moins de 30 secondes plus tard, selon des enregistrements de caméras de surveillance obtenus par la police. Les autorités croient que ce meurtre n’avait rien à voir avec le crime organisé.

29 octobre 2018, à Montréal

Yvon Marchand, connu des milieux policiers comme un trafiquant de stupéfiants, est atteint de plusieurs projectiles d’arme à feu à l’extérieur de chez lui sur la rue Pierre-Tétreault, dans le quartier Hochelaga. Grièvement blessé, il a eu le temps de se réfugier dans sa résidence et d’alerter la police lors d’un appel au 911 avant son décès. Les policiers ont trouvé le pistolet mitrailleur du tireur Silva près de la maison. 

20 décembre 2018, à Montréal

Sébastien Beauchamp, ex-membre des Rockers, l’ancien club-école du chapitre Nomads des Hells Angels à Montréal, est tué d’une balle à la tête dans le stationnement d’une station-service sur le boulevard Langelier, dans le quartier Saint-Léonard. C’est «un miracle» que cette fusillade n’ait pas fait de victime innocente lors de cette fusillade survenue en plein jour où trois véhicules ont été touchés par des projectiles, d’après le juge Daniel Royer qui a présidé l’enquête préliminaire de Silva. 



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