Un ancien président de l’Assemblée nationale au Gabon devenu un opposant de poids a été arrêté samedi 17 septembre à la frontière, en rentrant du Congo, avec trois valises remplies de billets représentant près de deux millions d’euros, ont annoncé dimanche à l’AFP des sources judiciaires.
Guy Nzouba-Ndama, 76 ans et président dix-neuf années durant de la chambre basse, en avait démissionné en mars 2016, un mois avant de se présenter à la présidentielle contre le chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba, puis de rallier son rival Jean Ping, battu de quelques points de pourcentage par le sortant. Son arrestation survient dix mois avant la présidentielle d’août 2023 pour laquelle M. Nzouba-Ndama fait figure de potentiel candidat.
Président du parti Les Démocrates, il « a été interpellé hier à Kabala, dans l’est, peu après avoir franchi la frontière en provenance du Congo », a indiqué à l’AFP un responsable du parquet de Franceville (est), qui a requis l’anonymat.
M. Nzouba-Ndama avait « éveillé les soupçons des douaniers en refusant de soumettre ses bagages à leur contrôle, ils ont prévenu les gendarmes qui ont arrêté son véhicule quelques kilomètres plus loin », selon le magistrat. Les militaires « ont fouillé ses bagages et découvert 1 190 000 000 francs CFA en billets de banque dans trois valises » (quelque 1,9 million d’euros), information confirmée à l’AFP par un autre magistrat et un haut responsable du gouvernement. Une vidéo montrant la fouille en présence de M. Nzouba-Ndama est devenue virale sur les réseaux sociaux.
« Lutte contre le blanchiment de capitaux »
Il est licite de passer d’un pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC, dont font partie Gabon et Congo) à l’autre avec une somme quelconque d’argent mais, au-delà d’un million de francs CFA, « elle doit être déclarée aux douanes et son possesseur doit en justifier la provenance et la destination dans le cadre des règles sur la lutte contre le blanchiment des capitaux ou le financement du terrorisme », selon les deux magistrats.
M. Nzouba Ndama « est entendu en garde à vue à Franceville par la Direction générale des recherches (DGR) de la gendarmerie, dans le cadre d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet sur la provenance et la destination de ces fonds », a annoncé en fin d’après-midi l’une des deux sources.
Les Démocrates, évoquant une « mise en scène humiliante » dans un communiqué, entendent « s’entourer de toutes les informations nécessaires, avant d’organiser un point de presse » pour informer « l’opinion nationale et internationale ».
Fidèle du président Omar Bongo Ondimba, qui régna près de quarante-deux ans (1967-2009) sans partage sur ce petit Etat d’Afrique centrale riche de son pétrole, M. Nzouba-Ndama a continué de diriger l’Assemblée nationale sous le premier mandat de son fils Ali Bongo Ondimba. Il a fondé en 2017 Les Démocrates, qui obtiendront dix sièges aux législatives de 2018, devenant la deuxième force politique du pays après le Parti démocratique gabonais (PDG) d’Ali Bongo, et faisait figure de candidat potentiel pour 2023.
Ali Bongo, élu en 2009 après la mort de son père, n’a pas à ce jour formellement annoncé son intention de briguer un troisième mandat en août 2023, mais il y est chaque jour vivement encouragé par son parti.
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