Islam Slimani, le meilleur buteur de l’histoire de la sélection algérienne (40 buts), a planté le décor lors de son arrivée à Oran, où les Fennecs affronteront en amical les 23 et 27 septembre la Guinée et le Nigeria. Interrogé par des journalistes à son arrivée à l’hôtel où séjourne l’équipe, l’attaquant de Brest à conseillé à ces derniers de « parler à ceux qui sont revenus, car moi, je ne suis jamais parti, j’ai toujours été là ». Une pique adressée, tout le monde l’a compris, à Andy Delort, 30 ans, l’attaquant de Nice et accessoirement concurrent de Slimani dans le secteur offensif des champions d’Afrique 2019.
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Il y a un an, en octobre 2021, Delort, qui venait d’être transféré de Montpellier à Nice, avait annoncé sa décision de renoncer temporairement à la sélection nationale pour se consacrer à son nouveau club. Cette décision, prise trois mois avant la Coupe d’Afrique des Nations au Cameroun, avait été particulièrement mal accueillie en Algérie, et pas seulement pas Djamel Belmadi, le sélectionneur des Fennecs. Celui-ci avait profité de l’occasion pour s’interroger publiquement sur l’attitude des dirigeants niçois, qui auraient fait pression sur Delort et sur d’autres joueurs africains afin qu’ils ne participent pas à la compétition.
Un vestiaire chargé d’ego
Onze mois plus tard, Andy Delort (11 sélections, 2 buts), international depuis 2019 – sa mère est d’origine algérienne – et champion d’Afrique en Égypte dans la foulée, est de retour au sein d’une équipe qui se remet de sa CAN camerounaise ratée et de son élimination de la Coupe du Monde face au Cameroun (1-0, 1-2). Il s’est excusé auprès du peuple algérien, en ajoutant avoir décidé en 2021 de prendre du recul également pour des raisons d’ordre privé, ce que Belmadi a confirmé. Le coach algérien s’était également empressé de préciser que « Delort s’était exclu lui-même de la sélection, qu’il [Belmadi] n’avait jamais fermé la porte à personne, mais que si l’Algérie s’était qualifiée pour la Coupe du Monde, Andy n’aurait pas été appelé pour ces deux matches amicaux ».
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La brève mais sèche déclaration de Slimani laisse donc supposer que Delort ne sera pas forcément le bienvenu dans un vestiaire chargé d’ego. « Si certains ne sont pas opposés au retour de Delort, d’autres, même s’ils sont minoritaires, n’ont pas oublié son attitude de l’année dernière, et ils ne sont pas spécialement ravis de le revoir », confirme Mouadh Nemroudi, journaliste à la radio El-Bahdja. Slimani, réputé pour sa franchise, fait visiblement partie du lot, ainsi que d’autres cadres de l’équipe, mais pour Ali Fergani, ancien international algérien puis sélectionneur des Fennecs, l’intérêt supérieur de l’équipe doit passer avant les cas personnels. « Si Belmadi a rappelé Delort, c’est qu’il estime en avoir besoin. Le joueur s’est excusé, il s’était sans doute montré maladroit l’année dernière dans sa communication, mais comme le sélectionneur est intelligent et qu’il a toujours dit qu’aucune porte n’était fermée… Même si tout le monde n’est évidemment pas favorable à sa présence, je pense qu’il sera bien accueilli ».
Quel accueil va lui réserver Oran ?
Depuis Kenchela, dans les Aurès, où il entraîne l’équipe locale, promue en Ligue 1 cette saison, Nabil Neghiz, qui fut brièvement sélectionneur en 2016, rappelle qu’à une certaine époque, « le nom de Delort aurait été inscrit sur une liste noire, comme cela fut parfois le cas. Les joueurs qui décidaient de tourner le dos à la sélection nationale étaient certains de ne jamais y revenir. Aujourd’hui, c’est différent, et à la place de Belmadi, j’aurais fait la même chose. Delort est un des bons attaquants du championnat de France, il a besoin de lui, donc il le convoque. » Si l’accueil réservé au buteur de l’OGC Nice pourrait se révéler assez tiède dans le vestiaire, l’autre interrogation concerne l’attitude du public algérien et plus particulièrement celui d’Oran, puisque les deux matches des Fennecs auront lieu dans la grande ville du Nord-Ouest.
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La cité portuaire n’a plus accueilli la sélection nationale depuis le 4 septembre 2005 et une humiliation infligée par le Nigeria (2-5) en qualifications pour la Coupe du Monde 2006. L’Algérie avait ensuite pris ses quartiers à Blida, où elle a disputé la grande majorité de ses rencontres internationales. « C’est un public qui aime tout particulièrement la sélection, et je pense que son attention va d’abord se porter sur elle, même si Delort sera sans doute sifflé par une partie du stade », assure Neghiz. Mouadh Nemroudi aimerait partager l’optimisme de l’entraîneur de l’USM Kenchala, mais le journaliste envisage plutôt une réception moins bienveillante. « D’après ce que j’entends, ce qu’on lit sur les réseaux sociaux, il y a davantage de personnes qui sont hostiles au retour de Delort que favorables. Je ne serais pas étonné qu’une majorité du stade le siffle… »
Mais il suffira sans doute que le match tourne à l’avantage de l’Algérie pour que le public du nouveau Stade Olympique d’Oran se préoccupe davantage de son équipe que du cas Delort…