La séance touchait à sa fin. Alors que l’horloge de l’Hémicycle approchait minuit, vendredi 14 octobre, la cheffe de file des députés « insoumis », Mathilde Panot, prend soudainement la parole pour réclamer la prolongation des débats sur le projet de loi de finances (PLF). L’élue du Val-de-Marne accuse le ministre des comptes publics, Gabriel Attal, et la coalition présidentielle d’avoir fait traîner les discussions pour éviter d’étudier dès ce vendredi soir les amendements à venir de la Nouvelle Union populaire, écologiste et sociale (Nupes) qui visent à rétablir l’impôt sur la fortune (ISF), supprimé en 2017 par Emmanuel Macron.
« Il est quand même bizarre que juste avant les amendements ISF, il y ait deux suspensions de séance, des prises de parole interminables de la minorité présidentielle et des ministres », déplore la députée, entourée des élus de la Nupes très mobilisés. Sa demande est d’autant plus justifiée selon elle, qu’un « bruit court d’un 49.3 » dégainé « dès lundi » par la première ministre, Elisabeth Borne, mettant fin aux discussions sur le budget. Mathilde Panot est ensuite soutenue dans sa démarche par son homologue socialiste des Landes, Boris Vallaud, qui déplore « les manœuvres dilatoires de l’exécutif et de la majorité ».
Mais cette demande est refusée immédiatement par la présidente (Renaissance) de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qui interrompt dans la confusion la séance quelques minutes avant l’horaire prévu.
Dans la foulée, les élus de la Nupes s’indignent sur leurs comptes Twitter et appellent à la mobilisation pour leur « marche contre la vie chère et l’inaction climatique » organisée dimanche 16 octobre. « Encore un petit coup de canif dans le fonctionnement démocratique de nos institutions. Prélude pathétique au 49.3 ? », interroge la députée (La France insoumise, LFI) de Seine-Saint-Denis Raquel Garrido.
Lenteur des débats
Cette fin de soirée chaotique est l’épilogue d’une semaine où les débats sur le budget se sont enlisés au fil des jours. Alors qu’il reste encore plus de 2 100 amendements à examiner – sur 3 300 déposés –, la fatigue et la lassitude ont commencé à poindre chez les parlementaires après cinq journées et soirées de discussions. « On est là depuis lundi soir. On ne peut pas dire qu’on avance bien », souffle ainsi en se rendant en séance la députée (Les Républicains, LR) du Jura Marie-Christine Dalloz.
Si tous reconnaissent des débats « intéressants sur le fond », les élus des oppositions redoutent désormais que le rythme des discussions empêche de pouvoir débattre des sujets les plus clivants de ce budget. « On espère que ça va aller jusqu’aux amendements sur les “superprofits” ; on a plein de choses à dire », avance ainsi la députée (LFI) de Seine-Maritime Alma Dufour. Mais pour certains élus, cette lente avancée des débats – ils reprendront lundi après-midi –, pourrait permettre à Elisabeth Borne de justifier en début de semaine prochaine le recours au 49.3. Alors si l’issue semble inévitable, chaque camp tente de s’en renvoyer la responsabilité.
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