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Champion d’Afrique en titre et qualifié pour la deuxième fois de suite à la Coupe du monde, le Sénégal fait actuellement partie des grandes nations du football africain. Un succès dû aux nombreux talents issus des centres de formation locaux de qualité. Ce vivier de jeunes footballeurs de plus en plus important attire la convoitise des plus grands clubs européens comme le Paris Saint-Germain.
Abdoulaye Faye et ses coéquipiers enfilent leurs équipements dans les vestiaires de l’Institut Diambars, l’une des plus grandes académies de football du Sénégal. Ils sourient en sortant des vestiaires, se lancent des quolibets avant d’emprunter une allée qui mène à l’un des six terrains de football de ce centre de formation de haut niveau. Premier atelier cet après-midi : des exercices d’abdominaux au sol. “Il faut qu’ils prennent des muscles car il faut être un vrai athlète pour jouer au foot aujourd’hui”, explique Bruno Rohart, l’entraîneur de l’équipe première de l’Institut Diambars.
Fondée en 2003, à Saly, à une centaine de kilomètres au sud de Dakar, l’académie a commencé à produire des talents qui ont brillé en Europe vers les années 2010. Sa première tête d’affiche : Idrissa Gana Gueye. Le milieu de terrain sénégalais passé par Lille, le PSG et Everton en Angleterre a ouvert la voie à une longue liste de footballeurs formés par le centre et qui ont fait le bonheur des championnats du Vieux Continent.
Dans le hall du bâtiment administratif de l’institut, les effigies des ex-pensionnaires de Diambars sont fièrement accrochées aux murs – trois d’entre eux participent actuellement au Mondial-2022 au Qatar avec l’équipe nationale. En plus d’Idrissa Gueye figure Bamba Dieng, le jeune attaquant de l’Olympique de Marseille, qui a marqué le troisième but du Sénégal face au Qatar, lors de la deuxième journée de la Coupe du monde. Saliou Ciss et Joseph Lopy complètent la liste des quatre fleurons de l’académie, champions d’Afrique avec le Sénégal en début d’année, auxquels s’ajoutent les portraits d’une dizaine d’autres footballeurs qui ont fait le bonheur de l’équipe nationale.
« On forme pour vendre »
Cet après-midi, l’équipe première de Diambars qui joue en Ligue 1 sénégalaise essaie des mises en place tactiques pour le prochain match de championnat. Abdoulaye, défenseur central gauche, à l’aise ballon au pied, soigne ses contrôles et ses passes. À 18 ans, il fait partie des pépites de l’académie. Ce jour-là, un recruteur de Manchester City, le géant du foot anglais, est présent dans les gradins en compagnie de l’agent de Kalidou Koulibaly, le capitaine de l’équipe nationale.
“Signer dans un club européen, c’est notre rêve à tous ici”, confie-t-il, même si le jeune défenseur a une préférence. “J’aimerais surtout jouer en Angleterre. C’est mon rêve. Je vais continuer à être performant ici et saisir ma chance si elle se présente”, dit-il, sourire aux lèvres. Il suit en cette période de Coupe du monde attentivement les matchs de l’équipe nationale et rêve de devenir un futur international sénégalais.
Abdoulaye n’excelle pas uniquement sur le terrain. “Il est de loin le meilleur élève de sa promotion”, précise Chérif Sow, responsable de la communication de l’Institut. En dehors du football, les pensionnaires, détectés dès l’âge de 13 ans, partent également à l’école. Ils sont logés et nourris gratuitement par l’académie qui déploie ainsi de gros investissements tout au long du cursus des jeunes footballeurs, en espérant des plus-values en les plaçant une fois adultes sur le marché lucratif des championnats européens de football. L’académie repose sur des fonds privés et se présente comme une entreprise à but non lucratif.
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“Notre premier objectif, c’est de placer des joueurs en Europe. On forme pour vendre”, affirme sans langue de bois, Cheikh Moussa Camara, le directeur technique de l’Institut Diambars. “On forme des joueurs pour le haut niveau. Et à ce jour, ce sont les clubs européens qui ont les moyens de prendre en charge nos jeunes et de leur offrir un avenir meilleur. En Afrique, on n’a malheureusement pas encore les moyens de conserver nos joueurs. Le haut niveau, c’est l’Europe.
La vente de joueurs constitue la principale source de revenus de Diambars qui compte également sur les indemnités de formation sur les transferts de ses ex-pensionnaires tout au long de leur carrière. “Cette prime est fixée entre 5 et 10 %” des transferts souvent à coup de millions d’euros sur le mercato européen, précise Chérif Sow.
Académies à foison
Diambars n’est pas la première académie de l’ère moderne du football sénégalais. Avant elle, Génération Foot fondée en 2000, peut se prévaloir d’avoir eu le même succès. Elle a offert au Sénégal Sadio Mané, l’un des plus grands footballeurs de l’histoire du pays et une autre génération de footballeurs talentueux.
En formant pléthore de talents, les académies ont largement contribué aux récents succès du football sénégalais. “Ce n’est pas un hasard. Les joueurs de l’équipe nationale sont bien formés soit ici soit en Europe. Cela fait toute la différence. C’est ce qui fait la force du Sénégal. Depuis 20 ans, on a investi dans le football des jeunes. En Afrique, à part les pays maghrébins qui copient le modèle occidental, il y a peu de pays africains qui ont commencé à anticiper la formation des jeunes”, renchérit Cheikh Moussa Camara.
Plusieurs clubs européens ont ainsi sauté sur l’occasion en nouant des partenariats avec les académies sénégalaises. Diambars collabore avec l’Olympique de Marseille, Génération Foot avec le FC Metz. Dakar Sacré Cœur, une autre académie érigée dans la capitale sénégalaise, s’est alliée avec l’Olympique lyonnais.
Le Sénégal a également attiré le Paris Saint-Germain. En mai 2021, une académie de football a été inaugurée à Ngaparou à 80 kilomètres au sud de Dakar par le club français. Plusieurs autres centres de formation appartenant notamment à d’anciens footballeurs sénégalais vont sortir de terre dans les années à venir. L’ancien international Demba Ba a ainsi investi trois millions d’euros pour la construction d’un centre en passe de faire du Sénégal le nouveau hub ouest-africain de formation des jeunes footballeurs.