La Montréalaise Olga Hrycak a connu une vie modeste mais bien remplie grâce à son sport, le basketball. Ainsi, elle peine à croire qu’elle fait son entrée au Panthéon des sports du Québec en même temps que Martin St-Louis et Georges St-Pierre, entre autres.
• À lire aussi: Symboliser les femmes
« Martin St-Louis gagne des millions par année, nous ne sommes pas dans la même catégorie », lance la femme de 75 ans en riant, assurant du même souffle qu’elle voue un profond respect au hockeyeur devenu entraîneur-chef du Canadien.
Son intronisation à titre de bâtisseuse, qui aura lieu ce soir, « Madame Olga » ne l’a pourtant pas volée. Pendant un demi-siècle, l’entraîneuse a mené des équipes de basketball, principalement des formations masculines, à d’innombrables championnats.
« C’est absolument impossible pour moi de choisir le championnat qui a été le plus important, dit-elle. Je me souviens très bien de la victoire de 1981 avec l’équipe des Cavaliers du Collège régional Champlain de Saint-Lambert. On avait gagné le championnat provincial, et la finale avait eu lieu à John Abbott. Après la victoire, tout le monde dans le gymnase criait : “Ol-ga, Ol-ga, Ol-ga” ! »
Neuf championnats
Suivirent notamment sept championnats avec le Collège Dawson, entre 1988 et 2003, puis elle est devenue la première femme en Amérique du Nord à diriger une équipe universitaire masculine, soit les Citadins de l’UQAM, qui lançaient alors leur programme.
« À notre quatrième année seulement, les Citadins étaient champions du Québec, c’était quand même incroyable, souligne-t-elle à propos de la conquête de 2006, qui a été suivie de celle de 2010. Dans cette aventure, je dois remercier Daniel Méthot d’avoir osé faire appel à moi. J’ai sauté sur l’opportunité, mais j’ai aussi pleuré quand je suis partie de Dawson. C’était une page importante de ma vie qui se tournait. »
Au-delà de son rôle d’entraîneuse au basketball, Olga Hrycak a fait carrière à titre de conseillère pédagogique en éducation physique pour la Commission scolaire English-Montreal. Cet emploi faisait qu’elle ne pouvait pas être impliquée, autant qu’elle l’aurait souhaité, avec l’équipe canadienne de basketball masculin à une certaine époque.
Elle a été entraîneuse adjointe, aux côtés du légendaire Jack Donohue, entre 1984 et 1987. Sinon, c’est sous le titre de cheffe de mission, un rôle qui nécessitait de moins longues absences au travail, qu’elle se cachait. Ainsi, elle était en mesure de continuer de conseiller la formation nationale pendant certaines compétitions, et ce, jusqu’au milieu des années 1990.
Steve Nash
Elle a côtoyé le légendaire joueur Steve Nash, mais aussi, parmi tant d’autres, Jay Triano, qui a porté les couleurs de l’équipe du Canada avant de devenir lui-même entraîneur, notamment pour les Raptors de Toronto entre 2002 et 2011.
« J’étais dans la trentaine quand je suis arrivée avec l’équipe nationale, et dès le départ, Jack Donohue m’avait bien avertie que je n’étais pas là pour être assise dans les estrades, raconte la dame. Il comptait sur moi pour le jeu défensif. »
À travers ses nombreuses anecdotes, Olga Hrycak se souvient d’un tournoi disputé à Taïwan, où la cheffe de mission s’était retrouvée carrément derrière le banc parce qu’un des adjoints à l’entraîneur avait refusé de faire le voyage à cause de sa peur de l’avion. Ça ne s’invente pas !
Touchante intronisation
Avant d’être intronisée au Panthéon, Olga Hrycak est, depuis mai 2017, membre du Temple de la renommée du basketball canadien. Ce nouvel honneur qu’on lui décerne vient toutefois au sommet.
« Il n’y a pas de mots pour décrire les émotions que je ressens, dit-elle. C’est pour tout le Québec et les autres individus qui se retrouvent au Panthéon des sports, ce sont des champions avec des médailles et tout. »
Des médailles, des trophées, des bannières et des championnats, Olga Hrycak en a elle-même une grande collection.
Aider ses joueurs jusqu’en prison
Au-delà de ses exploits comme entraîneuse au basketball, Olga Hrycak aura transformé bien des vies. Non seulement elle sortait certains jeunes de la rue grâce au sport, mais il lui est arrivé plus souvent qu’à son tour d’offrir de la nourriture ou une paire de souliers à un joueur.
Il était tout naturel pour Mme Olga, aujourd’hui âgée de 75 ans, d’agir ainsi. Ses grands joueurs de basket étaient comme ses propres enfants.
Bienveillante, celle qui sera intronisée au Panthéon des sports du Québec ce soir préfère ne pas nommer l’individu en question, ni même l’année où cela est arrivé. Elle déploie toutefois sa grande bonté en mentionnant qu’elle a déjà visité à plusieurs reprises un de ses joueurs en prison. Incarcéré à Cowansville, celui-ci avait écopé d’une peine de deux ans pour s’être retrouvé, comme membre d’un gang de rue, sur les lieux d’un meurtre.
« J’avais parlé en sa faveur pour qu’on réduise sa peine d’au moins quelques mois, dit-elle. Aujourd’hui, je sais que ça va très bien pour lui. Je ne peux pas dire si j’ai sauvé la vie à certains, mais j’ai toujours voulu les aider. »
Pensée pour l’Ukraine
Grandement impliquée socialement, Mme Olga a reçu, en 2005, le prix Thérèse-Daviau, décerné par la Ville de Montréal. On soulignait alors sa contribution « de manière significative » afin d’améliorer la qualité de vie des Montréalais.
« J’étais toujours embarquée dans ma communauté et j’aimais y impliquer les gars qui jouaient au basketball dans mes équipes, souligne-t-elle. C’était pour moi une façon de les embarquer dans d’autres choses que le basketball. »
Encore dans la dernière année, Olga Hrycak, née à Montréal en 1947, est naturellement venue en aide à l’Ukraine, pays d’origine de son défunt père.
« J’ai encore des cousins et des cousines en Ukraine et on pense à eux tous les jours », mentionne la grande dame du basketball.