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Une société qui protège les animaux, vraiment?

Une société qui protège les animaux, vraiment?


Chiens à prix exorbitants venus d’où on ne sait trop, malades ou d’une autre race : le fonctionnement d’un refuge controversé de Saint-Lin–Laurentides est fortement critiqué par d’anciens employés et des clients. 

Sarah Miron a eu toute une surprise lorsque son chien, adopté en décembre dernier à la SPA régionale, dans les Laurentides, a grandi au point de peser trois fois plus que ses supposés 20 lb. 

Croyant avoir acheté un petit boston terrier croisé, elle a découvert qu’il était en fait un mélange de ​​trois autres races.  

« Combien de familles comme nous se sont fait avoir en pensant que la chance leur souriait ? » se demande Mme Miron. 

Car contrairement à la plupart des refuges du Québec, de nombreux animaux à vendre sont affichés sur la page Facebook de la SPA.  

En juillet seulement, 29 chats et 65 chiens, dont des dizaines de chiots, y ont été mis en vente.  

Mais il y a toutefois un prix d’or à payer pour un tel animal à ce refuge, soit environ 2500 $. Dans la majorité des SPA et SPCA, un chien similaire se vend moins cher.

Fanny Lemieux, qui a travaillé au refuge en 2019, affirme que les chiens en vente provenaient « des portées qui arrivaient et dont on ne savait jamais où ». 

Les propriétaires de la SPA régionale n’ont pas rendu les appels du Journal, hier. 

Scènes d’horreur 

D’ex-employés ont raconté avoir vu plusieurs animaux malades à l’intérieur du chenil, sous prétexte que les responsables ne voulaient pas investir d’argent pour leur santé.

Ébranlés par leur état, des membres du personnel s’affairaient à leur trouver un meilleur environnement, souvent à travers des groupes citoyens de sauvetage animaliers. 

« Pendant le processus pour trouver une place, ils n’avaient pas de soins et de médicaments. Ils souffraient […] Il pouvait arriver que j’arrive le matin et que je voie un chat ou un chien mort dans son enclos », raconte une employée qui souhaite garder l’anonymat.

Animaux malades

Des centaines d’avis sur Google pour la SPA régionale et son entreprise sœur, L’inspecteur canin, et des rapports du MAPAQ viennent corroborer ce que plusieurs clients nous ont indiqué.

Jérémie Lebouthillier a laissé un avis d’une étoile. Sa copine et lui y ont adopté deux chattes. 

La plus jeune, Eclipse, a été diagnostiquée avec une otite très sévère, causée par des mites d’oreilles. Ces parasites auraient dû être tués lors de la vermifugation au refuge. 

« Ça a pris un bon deux mois de traitements avant d’en venir à bout. […] Il n’y a rien qui a été fait pour nous aider », se désole-t-il. 

Leanna Perreault a elle aussi vécu l’enfer avec son chiot Enzo. Acheté en mai, il a vite attrapé la toux de chenil, comme un frère de la même portée. 

« J’appelle pour leur faire savoir. Ils semblent très, très surpris, comme si c’était la première fois qu’ils entendaient cela », peut-on lire dans une publication virale sur Facebook. 

Elle se dit dégoûtée par leurs méthodes. 

« N’allez pas là ! » lance-t-elle. 

PAS LA BONNE RACE

Sarah Miron croyait avoir acheté un petit boston terrier croisé. Après un test d’ADN, le chien s’est révélé être un mélange de ​​staffordshire, berger belge et bullmastiff. 

PAS VERMIFUGÉ

La chatte de Jérémie Lebouthillier a eu une otite très sévère, causée par des mites d’oreilles, alors qu’elle était censée avoir été vermifugée.  

PRIS AVEC LA TOUX DU CHENIL

Une semaine après que Leanna Perreault a adopté son chiot, ce dernier a attrapé la toux de chenil, tout comme un frère, une maladie très transmissible entre chiens. 

L’accueil d’une chatte qui vire presque au drame


La chatte ne pouvait allaiter ses petits, étant dans un stade avancé de mammite.

Photo courtoisie

La chatte ne pouvait allaiter ses petits, étant dans un stade avancé de mammite.

Une femme de Saint-Lin–Laurentides qui agissait comme famille d’accueil pour une chatte et ses petits en juin 2021 a vécu l’enfer dès que les animaux sont arrivés chez elle. 

Charles Mathieu, Bureau d’enquête

« On sort la chatte de la cage et juste en la touchant en dessous, on voit que c’est chaud et impacté. Je regarde les mamelles, et la pauvre cocotte était en mammite avancée », indique Claudia Joly, en entrevue avec Le Journal.

Elle était dans un état « vraiment négligé » et ne pouvait donc pas nourrir ses petits, qui avaient pourtant besoin de lait aux deux à quatre heures. 

Elle a donc décidé d’appeler la SPA, qui, selon elle, n’effectuait pas un suivi adéquat dans les circonstances. 

« Ils me disent qu’ils vont faire des demandes et je n’ai pas de réponse. »

Elle a fait des démarches et s’est fait dire qu’il n’y avait pas de vétérinaire sur place et qu’elle devait prendre rendez-vous comme tout le monde. 

« C’est inquiétant », dit-elle.

Prendre les choses en main

À l’époque, Mme Joly était technicienne en santé animale dans une clinique vétérinaire près de chez elle. Ainsi, parce que le suivi n’était pas adéquat et qu’elle savait quoi faire pour s’occuper des animaux, elle a décidé de prendre les choses en main.

Elle a donc dû, à ses frais, aller à la clinique vétérinaire où elle travaille pour que la chatte puisse recevoir les traitements nécessaires, c’est-à-dire des antibiotiques et des anti-inflammatoires. Elle a également dû donner le biberon aux chatons, la maman ne pouvant pas nourrir ses petits en raison de la douleur.

« Si c’était quelqu’un qui ne connaît pas ça, peut-être qu’on aurait perdu la portée. Ils viennent avec la maman, on s’attend à ce que les bébés boivent [seuls] », affirme Mme Joly.

La SPA a finalement repris possession de la chatte, après plusieurs appels de Mme Joly.  

Tout le monde peut se nommer SPA 

N’importe quelle entreprise peut s’affirmer « Société protectrice des animaux », peu importe si elle a à cœur le bien-être des animaux ou non.

Charles Mathieu et Camille Payant, Bureau d’enquête et Le Journal de Montréal

Tout individu peut fonder un refuge et prendre le nom SPA ou SPCA s’il le désire, affirme Corinne Gonzalez, présidente de l’Association québécoise des SPA et SPCA.

Sans vouloir commenter le cas de la SPA régionale, elle soutient que les noms ne sont pas protégés.

« Ce nom peut être utilisé par n’importe qui. Des municipalités ne savent pas que ce n’est pas régi », dit-elle.

La Ville de Saint-Lin–Laurentides, qui retient les services de la SPA régionale pour ses licences d’animaux, va enquêter afin de s’assurer que l’entreprise est conforme à ses normes. 

« Ça ne correspond pas aux valeurs de la Ville. On est un peu sous le choc », précise la directrice des communications de la Ville, Marilyn Laroche.

Dossier connu

Plusieurs clients de la SPA ont affirmé avoir fait une plainte au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation au sujet du refuge.

« Nous pouvons confirmer que le dossier est connu de notre service d’inspection et que des interventions en vertu de la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal ont eu lieu au cours des derniers mois », précise son porte-parole, Yohan Dallaire Boily.

La SPA régionale et son entreprise sœur, L’inspecteur canin, ont été condamnées en 2021 pour des irrégularités dans les registres des animaux.

Le MAPAQ avait notamment constaté que 11 chats et 4 chiens apparaissaient dans les registres, mais ne se trouvaient pas dans l’établissement. 

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