« Au Kazakhstan, tous les minerais et éléments du tableau de Mendeleïev sont présents ! » Cette phrase serait, dit-on, tirée de vieux manuels soviétiques, mais qu’importe : il n’est pas rare de l’entendre dans la bouche des Kazakhs lorsqu’ils vantent les richesses de leur sous-sol. Car celui-ci ne regorge pas seulement de pétrole, de charbon et, dans une moindre mesure, de gaz. En effet, il est également empli de près du tiers des réserves mondiales de chrome, de 25 % de celles de manganèse, de 10 % environ de celles de fer, de cuivre, de plomb et de zinc, ainsi que de nombreuses terres rares, selon les données officielles.
Des chiffres à considérer néanmoins avec précaution. « C’est une économie opaque, où les acteurs locaux et les grands clans proches du pouvoir se partagent les ressources, avec parfois la présence d’entreprises internationales », explique Agathe Demarais, de l’Economist Intelligence Unit (EIU), le centre de recherche indépendant du magazine The Economist. « Il est difficile de faire des affaires dans les mines kazakhes, tant parce que les réglementations issues des normes post-soviétiques sont complexes que parce que la corruption n’est pas rare », confie un cadre européen travaillant dans le secteur.
L’extraction d’uranium est un peu plus transparente, et fait l’objet de toutes les attentions depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février. Et pour cause : avec 40 % de la production mondiale, le pays est le premier producteur de cette ressource essentielle au fonctionnement des centrales nucléaires. Selon les données de l’Agence d’approvisionnement d’Euratom (ESA), le pays était, en 2021, le deuxième fournisseur de l’Union européenne (23 %), après le Niger (24,3 %) et devant la Russie (19,7 %), l’Australie (15,5 %) et le Canada (14,3 %).
Approvisionnement sécurisé
Localement, l’extraction est dominée par Kazatomprom, l’entreprise d’Etat qui exploite une quinzaine de mines, souvent en joint-venture avec des entreprises étrangères – notamment japonaise, chinoise, russe, canadienne et française, avec Orano (ex-Areva). « Nous sommes présents depuis 1996, avec 1 200 salariés et une capacité d’extraction de 4 000 tonnes par an », détaille Nicolas Maes, directeur des activités minières du groupe français.
Plus de 50 % de la production d’uranium du pays est exportée vers la Chine, y compris une large partie de celle d’Orano. La France, elle aussi, se fournit – dans des proportions limitées – au Kazakhstan, mais il est difficile d’obtenir des chiffres plus précis sur le sujet. EDF n’a pas répondu à notre demande, et le ministère de la transition écologique se contente d’assurer que l’approvisionnement pour les années à venir est sécurisé : « La France s’appuie sur des sources diversifiées géographiquement : Asie, Afrique, Océanie, Amériques, principalement hors de la sphère d’influence russe. »
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