Le temps est loin où l’on remettait le Ballon d’or à son lauréat en bord de pelouse, avant un match quelconque, devant quelques photographes locaux. Cette remise fait désormais l’objet d’une cérémonie en grande pompe et smokings luisants, avec son inévitable lot de discours ampoulés et de moments embarrassants. Les récompenses pour la saison 2021-2022 seront attribuées ce lundi 17 octobre, au théâtre du Châtelet, à Paris.
L’essentiel se joue avant et après. Malgré les changements du mode de scrutin et des critères d’éligibilité, le volume des controverses autour du lauréat reste stable. Même quand il a été trusté par Lionel Messi et Cristiano Ronaldo (vainqueurs 12 fois sur 13 entre 2008 et 2021, Luka Modric s’immisçant en 2018), chacun devait se déterminer pour l’un ou l’autre, comme entre Lennon ou McCartney.
Les critères, maintes fois redéfinis, restent ambigus. Parfois, le Ballon d’or est allé à un perdreau de l’année qui ne justifia pas cet honneur par la suite (Michael Owen, en 2001). Parfois à un joueur favorisé par un manque de concurrence (Igor Belanov, en 1986), ou parce qu’il avait remporté un titre mondial et incarnait son équipe (Fabio Cannavaro, en 2006).
Biais et injustices
Souvent, au contraire, c’est un statut qui est primé, comme si les jurés devaient répondre à : « Qui est le meilleur joueur dans l’absolu ? » plutôt qu’à : « Qui a été le meilleur joueur cette année ? » Messi a ainsi devancé Robert Lewandowski en 2021…
Il fut un temps où la respectabilité du joueur constituait un critère implicite. En 2000, Zinédine Zidane, champion d’Europe avec la France, avait été privé de trophée par Luis Figo, mais surtout par un fâcheux coup de boule (déjà) asséné à un joueur du Hambourg SV.
On n’en est plus là, du moins si c’est bien Karim Benzema qui monte sur scène ce soir. Le Lyonnais, après avoir renoncé, en juin, à faire appel de sa condamnation dans l’affaire dite de « la sextape », a été reconnu coupable de « complicité de tentative de chantage ». L’absolution avait été accordée par le sélectionneur Didier Deschamps, le Ballon d’or vaudra béatification.
Laissons la morale de côté : la légitimité sportive du Madrilène est indiscutable. Non seulement il a été étincelant et décisif pour le Real, mais on peut se réjouir que son exceptionnelle longévité au plus haut niveau soit récompensée. Les footballeurs au long cours sont souvent passés au travers des mailles du palmarès.
Certains profils en ont été presque totalement exclus. Les défenseurs ne comptent que trois vainqueurs – le dernier en 2006 – et les gardiens ne peuvent même plus en rêver. Au point que les organisateurs ont créé en 2019 le « trophée Yachine », lot de consolation baptisé du nom de l’unique lauréat à ce poste, Lev Yachine, en 1963.
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