Un but minuscule, pas de gardien et un terrain aux dimensions de celui du handball : en Côte d’Ivoire, certains rêvent de voir le populaire maracana, sorte de football à six né sur les campus il y a une cinquantaine d’années, devenir un sport olympique.
Sur un terrain vague, au bord de la lagune Ebrié d’Abidjan, des jeunes enchaînent des dribbles dans le sable, deux pneus servant de but improvisé. La taille réduite du terrain et du but oblige les joueurs à allier technique et précision, de quoi faire du maracana, du nom du célèbre stade de Rio de Janeiro, un entraînement idéal pour le football à onze.
Chez les benjamins du club Xenox de Treichville, une équipe amateure de foot « traditionnel » de ce quartier d’Abidjan, l’entraînement en maracana est un passage obligatoire chaque semaine.
« Quand on veut apprendre à un enfant à jouer au football, la base pour moi c’est le maracana », souligne Adama Ira, qui entraîne une équipe de jeunes du Xenox. « Les jeunes travaillent davantage les techniques de conservation et de pressing. Quand l’enfant est habitué à supporter cette pression, le grand terrain n’a plus de secret pour lui », renchérit le président du club Seydou Badjan Traoré.
« Une discipline à part »
S’il est impossible de dater avec précision l’invention du maracana, les experts de ce sport populaire estiment que les règles sont nées dans les années 1970 sur les campus de Côte d’Ivoire. Les étudiants éprouvaient à l’époque des difficultés à rassembler assez de camarades et à disposer de terrains adaptés pour pratiquer le football.
De la contrainte sont alors nées des règles singulières : « Le maracana se joue à six contre six, sans gardien et sur un terrain aux dimensions similaires à celles du handball », résume Charlemagne Bleu, président de la Fédération internationale de ce sport.
Dans les gradins de la salle polyvalente du parc des sports de Treichville, le président observe fièrement sa sélection nationale s’entraîner. Fin septembre au Cameroun, la Côte d’Ivoire a remporté pour la huitième fois – en neuf éditions – le Mara’CAN, la Coupe d’Afrique des nations de maracana.
Pour Charlemagne Bleu qui œuvre pour une plus grande reconnaissance de la discipline, l’enjeu est de taille. « Le maracana, ce n’est pas du football, c’est une discipline à part. Notre objectif est de faire en sorte qu’elle soit une discipline olympique », affirme-t-il. Selon lui, soixante-douze pays sur quatre continents comptent une fédération de cette discipline.
Des joueurs entre 35 et 45 ans
Autre particularité : elle fait la part belle aux anciens. A la Mara’CAN, la compétition africaine phare, les joueurs doivent avoir entre 35 et 45 ans, un âge souvent synonyme de retraite au football.
« Les jeunes [15-34 ans] ont leur championnat national de maracana mais, généralement, ils restent plus attirés par le football. Les seniors sont plus nombreux car ils ne peuvent plus jouer au foot, alors ils se tournent vers le maracana », explique Charlemagne Bleu.
Certains footballeurs de haut niveau s’offrent ainsi une prolongation de leur carrière, comme Issouf Koné, 40 ans. « Comme beaucoup de mes coéquipiers, j’ai joué au football professionnel de haut niveau, par conséquent, la reconversion n’a pas été trop difficile. On s’est replongé dans le maracana pour ne pas perdre le fil du sport et surtout du football », explique celui qui a disputé sa quatrième Mara’CAN avec l’équipe nationale ivoirienne. « Aujourd’hui, pour être professionnel au football, c’est devenu tellement difficile que je pense que le maracana est une plateforme qui pourrait aider nombre de jeunes gens », ajoute-t-il.
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