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le Dr Tedros, un patron de l’OMS personnellement tiraillé par la situation au Tigré

le Dr Tedros, un patron de l'OMS personnellement tiraillé par la situation au Tigré



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Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, doit gérer une crise humanitaire au Tigré, sa région d’origine, théâtre d’un conflit entre les rebelles et le gouvernement éthiopien. Addis-Abeba l’accuse de prendre parti pour les contestataires.

À 57 ans, Tedros Adhanom Ghebreyesus, le patron de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), est dans la position unique de devoir gérer une crise humanitaire dans laquelle la survie de sa propre famille est en jeu. Originaire du Tigré, la région du nord de l’Éthiopie assiégée depuis deux ans par les forces fédérales et leurs alliés, il a exprimé mercredi 9 novembre son désir que l’accord de paix conclu la semaine dernière entre le gouvernement éthiopien et les rebelles tigréens permette désormais d’acheminer rapidement l’aide humanitaire.

« Donnons une chance à la paix, mais nous demandons aussi instamment la livraison immédiate de nourriture et de médicaments » et les services de base, a exhorté le Dr Tedros lors d’un point-presse. « Après l’accord de cessez-le-feu, je m’attendais à ce que la nourriture et les médicaments arrivent immédiatement. Ce n’est pas le cas », dit-il, estimant qu’une semaine est un délai assez long pour progresser.

Le Dr Tedros incarne aux yeux du grand public la lutte contre la pandémie de Covid-19 et il se sert à l’occasion de son audience pour évoquer la tragédie que vit sa région natale.


Encerclés, les six millions d’habitants du Tigré manquent de tout : carburant, nourriture, médicaments, communications ou électricité. « Oui, je suis originaire du Tigré, et oui, cela m’affecte personnellement, je ne prétends pas le contraire. La plupart de mes proches se trouvent dans les zones les plus touchées, plus de 90 % d’entre eux », avait-il lancé, la voix étranglée par l’émotion, lors d’un point-presse régulier de l’OMS le 19 octobre.

Accusé d’avoir une attitude partisane

Depuis deux ans, l’aide humanitaire n’est arrivée qu’au compte-gouttes au Tigré et les agences de l’ONU doivent composer avec les autorités – quelles qu’elles soient – pour arriver à opérer dans le pays.

Le Dr Tedros n’échappe pas à cet impératif et il s’expose au reproche de sortir de son rôle quand il évoque la situation au Tigré.

Le gouvernement éthiopien l’accuse d’avoir une attitude partisane et d’abuser du porte-voix que lui donne sa fonction.

Pour Addis-Abeba, il « utilise son poste pour faire avancer ses intérêts politiques personnels au détriment des intérêts de l’Éthiopie ». Le gouvernement éthiopien réclame une enquête de l’OMS sur ce qui, à ses yeux, constitue des manquements graves. Ces accusations n’ont pas empêché le Dr Tedros de décrocher un second mandat en mai.

>> À voir : « Éthiopie : la guerre au Tigré, un des conflits les plus meurtriers au monde »

Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a déclenché l’offensive contre le Tigré le 4 novembre 2020, accusant le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) au pouvoir dans la région d’attaquer des camps de l’armée fédérale.

La vie du Dr Tedros est intimement liée au TPLF, dont il a été un haut responsable. Le parti a été la force dominante de la coalition quadripartite du Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF) qui a contrôlé la politique éthiopienne pendant une trentaine d’année.

L’actuel patron de l’OMS faisait partie du comité exécutif de neuf membres du TPLF jusqu’à ce qu’il prenne son poste à Genève. Il a aussi dirigé le Bureau régional de la santé du Tigré avant de devenir ministre éthiopien de la Santé de 2005 à 2012. Pressenti comme possible dirigeant du TPLF – et donc potentiellement de l’Éthiopie –, il est finalement devenu ministre des Affaires étrangères jusqu’en 2016.

Quand Abiy Ahmed est arrivé au pouvoir en 2018 après des années de manifestations antigouvernementales, il a dissous l’EPRDF et formé le Parti de la prospérité. Le TPLF, dont sont issus les chefs rebelles, a refusé de suivre le mouvement.

Marqué par son enfance au Tigré

Lors d’un forum des jeunes en 2020, le Dr Tedros a confié qu’à l’âge de sept ans – alors enfant pauvre du Tigré –, il avait vu son jeune frère mourir, probablement de la rougeole. « Je n’acceptais pas cette situation à l’époque. Même maintenant, je ne l’accepte pas », a-t-il expliqué : « Cela m’a beaucoup influencé. »

Traditionnellement, le Dr Tedros tient des propos liminaires lors des conférences de presse hebdomadaires de l’OMS, et laisse en général soin à son équipe de répondre aux questions. Mais quand il s’agit du Tigré, il prend la parole et laisse souvent poindre l’émotion. « Je veux leur envoyer de l’argent, je ne peux pas leur envoyer d’argent. Ils meurent de faim, je le sais, je ne peux pas les aider. Je ne sais même pas qui est mort ou qui est vivant », a-t-il dit en août, évoquant le sort de sa famille.

Et le 1er novembre, il a été le seul des responsables de l’ONU à évoquer le risque d’un « génocide ». L’accord de cessez-le-feu pourrait offrir la chance de faire cesser le bain de sang. Et tous les yeux seront une nouvelle fois rivés sur ce qu’aura à dire le Dr Tedros.

Avec AFP



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