Depuis décembre 2013, l’arsenal juridique de la France dispose d’une arme très efficace contre les capitaux occultes. L’article 324-1-1 du code pénal est une petite révolution, selon Christophe Perruaux, directeur du Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), rattaché à Bercy. Il permet d’accuser automatiquement les personnes ayant caché des actifs d’origine douteuse, par le biais d’un prête-nom, d’une société offshore ou dans une cachette, de blanchiment. Si elles ne peuvent pas prouver l’origine licite de leurs biens ou capitaux, elles risquent une peine de cinq ans de prison, 375 000 € d’amende et la confiscation de la totalité des sommes.
Avant la mise en place de cette présomption de blanchiment, il était difficile pour les magistrats et les enquêteurs de prouver l’origine illicite des fonds. Le colonel Patrick Pégeot, commandant de la section de recherches de Paris, a indiqué que la « non-justification de ressources » ne visait que l’entourage des délinquants dans les enquêtes où il existait un lien avec une infraction pénale grave. De même, le « manquement aux obligations déclaratives » n’était sanctionné que par une amende correspondant au maximum à 50 % de la somme découverte. Ces sanctions sont anecdotiques par rapport aux peines encourues en cas de blanchiment.
L’article 324-1-1 du code pénal est une avancée significative pour les praticiens qui se sentaient accablés par le manque de moyens et la multiplication des dossiers financiers liés au trafic de drogue, à la fraude fiscale ou aux oligarques russes. Selon Christophe Perruaux, cette présomption de blanchiment a permis aux enquêteurs de sortir de l’impasse. Avant sa mise en place, ils étaient en grande difficulté pour savoir d’où venait l’argent et démontrer l’infraction d’origine qui avait généré ces fonds. Par conséquent, la présomption de blanchiment devient une arme absolue dans la lutte contre les capitaux occultes.
L’article 324-1-1 du code pénal a été instauré en décembre 2013 à la suite de l’affaire Cahuzac. Il est moins spectaculaire que la création concomitante du Parquet national financier (PNF) mais il est devenu un game changer dans la lutte contre les capitaux occultes. Cette disposition permet à la justice de présumer que les biens ou les capitaux utilisés ou détenus de façon occulte proviennent d’une infraction. Comme cela devient difficile pour les personnes qui ont dissimulé ces actifs, elles optent pour la solution de les légitimer en les rapatriant dans leur comptabilité, déclare Christophe Perruaux.
En conclusion, l’article 324-1-1 du code pénal représente une arme efficace dans la lutte contre les capitaux occultes. Selon les enquêteurs et la plupart des magistrats financiers, cette disposition permet de sortir de l’impasse. Elle oblige les personnes qui ont tenté de dissimuler des actifs d’origine douteuse à justifier leur origine licite. Cette présomption de blanchiment a permis à la justice d’engager une lourde bataille contre les délits financiers.