in

jeunes filles tunisiennes entre marivaudage et patriarcat

jeunes filles tunisiennes entre marivaudage et patriarcat


« Sous les figues », d’Erige Sehiri.

L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR

Des regards qui se croisent et se jaugent sous les branches, tandis qu’une main soupèse une figue. Si elle est un peu verte on la laisse, si elle est molle on la cueille. Ce n’est pas un hasard si, en argot, la figue désigne le sexe féminin : l’amour est comme un fruit mûr à saisir, dans le sensuel Sous les figues, premier long-métrage de fiction de la documentariste tunisienne Erige Sehiri (La Voie normale, 2018). C’est une question de tempo et la réalisatrice réussit particulièrement à tenir le rythme, ainsi que les différentes intrigues qui se nouent sous les figuiers, le temps d’une journée de cueillette.

Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs, à Cannes, le film séduit par son dispositif, économe et esthétique : des plans rapprochés dans les feuillages – rien que cela – captent des bribes de conversation, que le récit se charge ensuite de rendre intelligibles, et le « huis clos » en plein air montre une microsociété rurale dans ses tiraillements. Jusqu’aux jeunes filles tunisiennes cueillies à froid, entre marivaudage et patriarcat.

Mise en scène très efficace

Les branches des figuiers sont comme des flèches décochées par Cupidon, reliant les personnages. Un seau à la main, une jeune fille se confie à sa copine perchée dans l’arbre, qui elle-même pense au garçon occupé à sa besogne un peu plus loin. Pendant ce temps, l’aïeule, Leila (Leila Ohebi), surveille les unes et les autres, et parfois dénonce les paresseux ou les voleurs – moyennant un allongement de la paie – au jeune patron sans vergogne. Celui-ci embarque, à l’aurore, les travailleurs, pour la plupart des femmes, à l’arrière de sa fourgonnette et règne en maître, plus ou moins inflexible, jusqu’au coucher du soleil.

Fidé (Fide Fdhili) incarne la jeune fille la plus libre, qui parle aux hommes et monte à l’avant du véhicule avec le patron qui lui fait la cour. Sana (Ameni Fdhili) assume son conservatisme et se projette dans un mariage religieux avec son fiancé, qu’elle compte « éduquer » pour qu’il n’aille pas voir d’autres femmes ; Melek (Feten Fdhili) est bouleversée de retrouver, au milieu du verger, Abdou (Abdelhak Mrabti), un ancien amoureux qui avait quitté le pays après la mort de ses parents.

Les branches des figuiers sont comme des flèches décochées par Cupidon, reliant les personnages.

Tous les acteurs sont des comédiens non professionnels, et le film fait entendre un dialecte de la région berbère. La cinéaste ne tire pas tout le parti de cette authenticité, contraignant parfois ses personnages dans les stéréotypes fabriqués pour les besoins du récit – un peu chargé par ailleurs. Ainsi l’on voit venir à 100 lieues la scène de l’agression sexuelle qu’une cueilleuse réussira finalement à déjouer.

Il vous reste 24.63% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Affaire Sky ECC: 10 interpellations après des perquisitions dans la région anversoise

Affaire Sky ECC: 10 interpellations après des perquisitions dans la région anversoise

Un rassemblement organisé ce jeudi soir à Ixelles pour le mouvement #Balancetonbar

Un rassemblement organisé ce jeudi soir à Ixelles pour le mouvement #Balancetonbar