L’affaire de la messagerie cryptée FR Deter a révélé la menace terroriste croissante en France issue de l’extrême droite, contrairement aux déclarations du gouvernement sur les menaces de l’ultragauche, de l’écoterrorisme et du terrorisme intellectuel. Les services de renseignement français estiment à 3 000 le nombre de militants d’extrême droite, dont plus de 1 300 ont déjà été fichés S. La messagerie cryptée FR Deter, qui a récemment été fermée sur instruction du ministre de l’Intérieur, avait plus de 7 300 abonnés dans toute la France et comprenait des listes de noms de politiciens de gauche, d’avocats et de journalistes, ainsi que des appels au meurtre, des menaces de mort et des insultes à l’encontre des étrangers, des musulmans, des juifs et des personnes LGBT.
FR Deter fait partie d’une nébuleuse de groupes Telegram sous surveillance depuis fin 2022, qui rassemble des centaines de comptes. Certains profils étaient déjà connus des services de renseignement, tandis que d’autres se présentent comme des militaires ou des fonctionnaires de police, sans que cela soit encore démontré. Nicolas Lerner, directeur général de la Sécurité intérieure, avait déjà prévenu en février cette année que la menace terroriste d’ultradroite était la principale menace pour les démocraties occidentales.
Malgré cela, peu de députés de la majorité présidentielle ont montré leur soutien à la proposition de loi d’Aurélien Taché demandant un état des lieux exhaustif de la menace terroriste d’extrême droite en France. La France totalise d’ailleurs 45 % des interpellations en Europe concernant les affaires liées au terrorisme d’extrême droite. En réponse à la question d’un député lors d’un débat récent à l’Assemblée nationale, le ministère de l’Intérieur a admis que l’extrême droite s’efforçait de recruter des membres des forces de l’ordre et de l’armée, mais que des décrets de dissolution d’associations avaient déjà été pris ces dernières années.
Pourtant, les idées de l’extrême droite se sont petit à petit installées dans le débat public en France, avec la complicité de politiciens de droite et du centre qui les ont reprises à leur compte à des fins électoralistes. Selon le sociologue et spécialiste de l’extrême droite, Erwan Lecœur, les services secrets français ont sous-estimé la menace d’extrême droite à partir des années 2000, se concentrant davantage sur la menace jihadiste. La société a également évolué, ce qui a facilité la propagation de ces idées et le recrutement grâce à Internet et aux réseaux sociaux. En conséquence, des termes considérés autrefois comme marginaux sont maintenant acceptés socialement, permettant aux loups solitaires de passer à l’acte.