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Decathlon, à fond sur la réparation, le reconditionné et la location

Decathlon, à fond sur la réparation, le reconditionné et la location


Les temps changent et de plus en plus d’industriels anticipent une contraction des ventes de produits neufs. Que ce soit par pur engagement écologique, par opportunité économique ou pour adapter leur message aux enjeux de notre époque, des pans entiers de l’industrie ont entamé leur « transition écologique ». C’est le cas de Decathlon, même si les responsables des problématiques « circulaires » tranchent d’emblée avec ce discours, rappelant que dès sa fondation, l’enseigne française a toujours voulu pousser la réutilisation du matériel sportif.

Il est vrai que les opérations Trocathlon lancées dès 1986 (des brocantes du sport organisées sur les parkings des magasins, pendant lesquelles les particuliers peuvent vendre et acheter du matériel d’occasion) se sont imposées comme des moments forts de l’enseigne et sont depuis inscrites dans son ADN.

Sauf que depuis 1976, date d’ouverture du premier Decathlon près de Lille, le groupe s’est internationalisé et s’est énormément développé, avec des gammes fleuves, un accent mis sur l’accessibilité tarifaire, et des millions de produits écoulés chaque année qui ne font pas que du bien à la planète. Eh non, malheureusement, on ne fait pas 13,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires dans le monde (2021) sans polluer et émettre un bon paquet de CO2.

Un impact écologique énorme

Pour autant, le groupe français est — comme nous tous — aux premières loges du réchauffement climatique et de ses méfaits. Un phénomène qui a un impact de plus en plus fort sur le business du fabricant des vélos BTwin, des tentes Quechua, des maillots de bain Nabaji ou des ballons de basket Tarmak. C’est pourquoi l’économie circulaire et la problématique environnementale, mots clés tendances s’il en est, étaient inscrits en gras lors du dernier grand événement de la marque, où toutes ses nouveautés étaient présentées.

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« Toutes nos actions ont un impact et nous nous sentons une vraie responsabilité en tant que concepteur et distributeur. Bien sûr que l’activité de Decathlon a un impact écologique énorme. Nous ne pouvons pas l’ignorer et devons travailler dessus pour le réduire. Cela veut dire prendre des engagements factuels qui comptent et mesurer efficacement cet impact pour savoir où agir » reconnaît Marie Chaillou, responsable de la communication de l’enseigne sur le développement durable.

Et ces calculs sont imparables : environ 80 % des émissions de gaz à effet de serre sont issus de la fabrication des produits, des matières premières à leur transformation en produits finis. « C’est la raison pour laquelle faire en sorte que chaque produit soit utilisé le plus longtemps possible est la chose la plus efficace qui soit », ajoute la responsable. D’autant plus qu’il faut y ajouter les multiples pollutions engendrées par les procédés industriels, ou encore les grandes quantités d’eau englouties.

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La benne en dernier recours

Alors, chez Decathlon, on est en train de mettre le focus sur la circularité, pour qu’elle devienne une opportunité — y compris commerciale — et non une contrainte. « Les produits doivent avoir plusieurs vies, plusieurs utilisateurs », indique d’emblée Anthony Le Mens, responsable de la seconde vie des produits. « Ce que l’on constate, c’est que le bouleversement climatique et l’incertitude énergétique rebattent les cartes. Cela a un impact sur la disponibilité des matériaux, cela crée des tensions sur le transport. Et dans le même temps, nous nous sommes engagés sur l’accord Net Zero à l’horizon 2050, et nous avons des collaborateurs en magasin qui n’acceptent plus que des produits encore utilisables puissent finir à la benne. Dans le même temps, nos clients changent leurs habitudes, dans la pratique de leurs sports, mais aussi dans leurs consommations. C’est tout un ensemble de choses qui nous poussent à nous adapter », poursuit-il.

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C’est ainsi que l’on apprend qu’à date, en 2022, ce sont déjà plus de 190 000 produits reconditionnés qui ont été vendus par Decathlon, représentant 500 tonnes d’équivalent CO2 qui n’ont pas été émises dans l’atmosphère. Pour s’adapter, Decathlon s’intéresse aussi à l’upcycling pour revaloriser le matériel vraiment hors d’usage — un partenariat permet par exemple à une entreprise de fabriquer des sac à dos en réutilisant les toiles de ses kayaks gonflables —, mais également à la location.

Julie Delignon, chargée des thématiques d'économie circulaire chez Decathlon.

Julie Delignon, chargée des thématiques d’économie circulaire chez Decathlon.

© Decathlon

« Nous avons lancé plusieurs offres de location qui trouvent leur public et nous leur adossons des services. Nous louons par exemple un banc de musculation et le forfait comprend les conseils d’un coach. Nous proposons aussi, pour 3 € par mois, la location de vélos pour enfants avec la possibilité de changer de taille à mesure qu’il grandit. Avec ces offres, nous évitons l’achat de produits neufs qui pourraient n’avoir qu’une seule vie », précise Julie Delignon, en charge de l’économie circulaire, alors que ces offres de location vont se développer dans toute l’enseigne et même être prochainement proposées en ligne.

Rachat de produits et reconditionnement au cœur du processus

Et pour accélérer dans l’occasion et le reconditionné, Decathlon va développer ses offres de rachat de matériel usagé, sur les vélos, les sacs à dos, les tentes, le matériel de plongée, les raquettes, etc. En plus du bon d’achat, il est possible de recevoir le montant de la revente directement par virement bancaire et il sera bientôt possible d’obtenir une offre de reprise et de la valider directement sur le site internet de l’enseigne. Chaque produit sera alors diagnostiqué, réparé et remis à niveau si besoin, puis remis en vente avec une garantie de 24 mois.

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Autant d’activités qui, pour avoir un impact sur l’empreinte environnementale du groupe, ne peuvent rester marginales. Interrogés sur leurs objectifs, les cadres de l’entreprise annoncent que le but est de générer 5 % du chiffre d’affaires sur la vente de produits reconditionnés en 2026, et autant grâce aux offres de location, soit 10 % au total. Cela peut sembler peu, mais c’est — selon Decathlon — « un objectif ambitieux qui va permettre de mettre toute l’entreprise en dynamisme autour de ces projets ». Des équipes spécialisées se composent (comme sur le site de Brétigny-sur-Orge où 12 salariés se consacrent au reconditionnement) et des chantiers sont mis en place, pour que les produits d’occasion et reconditionnés soient proposés aux clients directement sur le site internet et l’application. Et puis dans le même temps, les ventes de neuf pourraient se contracter. Or, moins de production, c’est aussi moins d’impact environnemental.

Les ateliers Decathlon ont réparé plus d'un million de produits en 2021, et pas que des vélos.

Les ateliers Decathlon ont réparé plus d’un million de produits en 2021, et pas que des vélos.

© Decathlon

Dès lors, Decathlon prévoit aussi une augmentation de ses revenus issus de la réparation et de ses ateliers. « Lorsque l’on sonde les gens, on a l’impression que Decathlon ne répare que des vélos. On veut gagner en visibilité là-dessus, car nos ateliers réparent des dizaines de catégories de produits et acceptent toutes les marques, pas uniquement les produits vendus par nos magasins. Or nous avons une vraie expertise et une légitimité sur la réparation. Nous réparons les tentes, les kayaks, nous entretenons les raquettes, etc. », veut faire savoir Julie Delignon. Decathlon prévoit de recruter 500 techniciens supplémentaires d’ici 2026.

À la question « comment aimeriez-vous être accompagnés dans vos démarches », les reponsables de Decathlon répondent à l’unisson : « Très clairement, le premier critère d’un achat d’occasion chez nous, c’est le prix, devant la conviction écologique. On adorerait donc que le gouvernement nous aide avec, par exemple, une TVA réduite sur les produits de seconde main ».

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Difficile de concilier technologie et écologie

Les réponses sont un peu plus évasives lorsque l’on demande si la marque prend des engagements sur la durée de mise à disposition des pièces détachées ou la fourniture de manuels de réparation. Rien de précis, mais on nous promet des efforts en ce sens. Idem du côté de l’écoconception. On le sait, pour être durables, les produits doivent être pensés pour être réparables. Or, chez Decathlon comme partout, on veut intégrer toujours plus de technologie. Et qui dit technologie dit aussi plus de complexité et de difficultés à réparer.

Les responsables nous assurent que les équipes en charge de la conception des produits gardent en tête ces problématiques de longévité, sans plus de précisions. « Nous aimons aussi avoir, chez Decathlon, l’image de produits solides que l’on va pouvoir utiliser plus d’une saison », nous assène-t-on. Pour autant, on voit cette année fleurir au catalogue une expérience ping-pong en réalité virtuelle, une cible de fléchettes connectée, de nouvelles montres running avec Coros ou encore un kit pour connecter un panier de basket-ball.

Une note environnementale sur les produits textiles

« Ce que nous essayons de faire, c’est aussi de permettre aux gens d’avoir une consommation éclairée », explique Marie Chaillou. « Depuis de longues années nous travaillons avec l’Ademe sur la note environnementale que l’on affiche sur de nombreux produits textiles de notre catalogue. Comme le Nutriscore, elle est représentée par une note allant de A à E et permet au consommateur d’avoir une information sur ce qu’il achète ». Plus difficile à repérer en magasins, cette note est effectivement affichée sur les fiches d’un grand nombre de produits sur le site de Decathlon, avec des liens explicatifs vers la démarche et l’impact environnemental des références.

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« Ce n’est pas la réponse à tout, mais c’est l’une des solutions qui nous semblent importantes et cela met les clients en réflexion sur l’impact écologique de leurs achats. Certains seront peut-être tentés de s’orienter davantage vers un produit reconditionné en conséquence (…) Et puis en interne, les chefs de projet dont les produits affichent la note environnementale sont instinctivement poussés à l’améliorer », ajoute la responsable.

Les équipes de Decathlon ont participé au World Clean-Up Day en organisant de grandes opérations de nettoyage.

Les équipes de Decathlon ont participé au World Clean-Up Day en organisant de grandes opérations de nettoyage.

© Decathlon

Même si certains points de la démarche de Decathlon sont critiquables, difficile de contester le fait que la thématique écoresponsable est traitée sous un maximum d’aspects au sein de l’entreprise, jusque dans son programme de fidélité qui récompense les achats, le dépôt d’avis, mais aussi la pratique sportive et permet d’obtenir des bonus lorsque l’on achète un produit d’occasion ou que l’on participe à un événement écolo (par exemple, une opération nettoyage sponsorisée par l’enseigne).

Quant à la fabrication de la plupart de ses produits au bout du monde, comme la première chaussure de running à plaque de carbone Decathlon (la Kiprun KD900X) qui est faite au Vietnam, Decathlon ne nie pas avoir des progrès à faire, en assurant avoir l’intention de saisir les opportunités de rapprocher sa production lorsque c’est possible. Un exemple, c’est une usine nantaise qui fabrique sa nouvelle chaussure de football haut de gamme, la Kipsta Traxium Compressor, conçue pour durer 10 ans, recyclable et en partie recyclée. « Une proximité du site de production qui facilite et améliore le processus de création et de conception, en plus d’avoir du sens écologiquement pour un produit destiné au marché européen », nous assure le chef de produit.

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