Esquivée grâce au paratonnerre Eric Zemmour durant la campagne présidentielle, la question russe peut-elle perturber la rentrée politique de Marine Le Pen ? En condamnant clairement l’invasion de l’Ukraine mais en reprenant plusieurs éléments de langage du Kremlin, le Rassemblement national (RN) marche sur une corde raide depuis six mois. Or, le vent souffle fort. L’avancée militaire de l’Ukraine et les manifestations de panique du pouvoir russe sonnent à l’oreille des dirigeants européens et américains comme les premiers effets concrets du soutien militaire et du large éventail de sanctions imposées à l’économie russe.
Avec le retour de la guerre en Ukraine dans le débat public – une discussion sur le sujet ouvrira la session de l’Assemblée nationale, lundi 3 octobre – reviennent les procès en poutinophilie faits au RN. « Quel pacte tacite ou quel accord financier pourrait conduire à de telles déclarations ? », fait mine de s’interroger le secrétaire général de Renaissance, Stéphane Séjourné, quand Jordan Bardella met la crise énergétique sur le dos des sanctions européennes.
Les signes d’agacement des responsables du RN se multiplient. Mme Le Pen, le 20 septembre sur France Inter, accuse de « désinformation » les journalistes rappelant qu’elle se prononçait contre les sanctions jusqu’au mois d’août. Elle dit aujourd’hui qu’elle ne visait que « les sanctions sur l’énergie ». Le 29 septembre, M. Bardella, président par intérim, a annoncé son intention de poursuivre en justice « tous ceux qui insinuent » l’existence d’un lien financier entre la Russie et son parti.
Les « dangereuses postures belliqueuses » de l’UE
Les élus les plus russophiles, comme Thierry Mariani, n’ont toutefois pas été réduits au silence. Au Cap d’Agde, lors des journées parlementaires du mouvement et face à quelques journalistes, le député européen moquait leur « naïveté face à la guerre de l’information », voyait dans les charniers découverts à Izioum de simples cimetières et prédisait à l’avancée militaire ukrainienne le même destin que l’offensive de Ludendorff : une vaine série d’attaques allemandes sur le front occidental au printemps 1918, avant la victoire des Alliés.
Sur le fond, Mme Le Pen campe sur ses positions, dénonçant à la fois les actes de Vladimir Poutine et la « vision impériale » et les « dangereuses postures belliqueuses » de l’Union européenne. Selon elle, les sanctions économiques heurtent davantage les Français que la Russie, notamment parce qu’elles auraient renchéri fortement le prix des hydrocarbures ; et la livraison d’armes place la France dans une situation de « cobelligérant ». Le RN considère également la formation de troupes ukrainiennes comme un acte de belligérance.
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