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Police | Corruption: l’actuel patron de l’UPAC aurait protégé son prédécesseur Robert Lafrenière

Police | Corruption: l’actuel patron de l’UPAC aurait protégé son prédécesseur Robert Lafrenière


Le commissaire à la lutte contre la corruption Frédérick Gaudreau aurait caché des actions répréhensibles de son prédécesseur Robert Lafrenière, avance la lanceuse d’alerte Annie Trudel dans un livre qui paraît aujourd’hui.

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Dans Autopsie de l’enquête bidon UPAC, celle qui a notamment été témoin à la commission Charbonneau revient sur le fameux Projet A, cette enquête lancée en 2017 par Robert Lafrenière pour découvrir les responsables de fuites d’informations à l’Unité permanente anticorruption (UPAC).

« Le commissaire actuel […], Frédérick Gaudreau, sait depuis longtemps que les suspects [du Projet A] sont en réalité des cibles innocentes, que des enquêteurs ont été intimidés par les pressions du commissaire et de son entourage, et que l’enquête a été faussement orientée afin de protéger les vrais suspects », écrit-elle.

Depuis la fin octobre 2018, le Bureau des enquêtes indépendantes (BEI) mène une enquête nommée Serment sur la façon dont le Projet A a été géré. Robert Lafrenière fait partie des suspects, bien qu’il nie avoir quoi que ce soit à se reprocher.

Témoin des aveux

Annie Trudel base son ouvrage de 456 pages sur les documents de l’enquête Serment rendus publics en mai dernier par la Cour supérieure.

Elle raconte ainsi qu’en août 2018, Frédérick Gaudreau, qui était alors le bras droit de Robert Lafrenière, aurait participé à une rencontre avec ce dernier et une avocate de l’UPAC, au cours de laquelle il était question de l’enquête sur les fuites d’informations. À cette époque, ce sont des enquêteurs indépendants qui menaient l’investigation, quelques mois avant que le BEI n’en hérite.

Lors de cette rencontre, Frédérick Gaudreau aurait été témoin d’aveux de Robert Lafrenière à l’effet qu’il avait lui-même orchestré une fuite d’informations. Mais M. Gaudreau aurait refusé que l’avocate en fasse part aux enquêteurs.

« En vertu de l’article 260 de la Loi sur la police, Frédérick Gaudreau aurait dû rapporter les actions criminelles du commissaire plutôt que de le couvrir », écrit Annie Trudel dans son ouvrage.

Cet article de loi prévoit notamment que « Tout policier doit informer son directeur du comportement d’un autre policier susceptible de constituer une infraction criminelle ».

Tenter de protéger

Quelques mois après, Frédérick Gaudreau a pris la tête de l’UPAC. 

« Il faudra l’intervention de Me Annick Murphy (alors directrice des poursuites criminelles et pénales) pour que l’enquête soit retirée des mains de Frédérick Gaudreau », lui qui « a préféré tenter de protéger les enquêtes qui auraient pu tomber à l’eau dans l’éventualité où tout cela se savait », ajoute Annie Trudel.

Nous avons invité Frédérick Gaudreau à émettre des commentaires, mais il n’a pas souhaité le faire puisque « le BEI mène toujours son enquête concernant les fuites et le Projet A ». 

Bergeron regrette de ne pas l’avoir congédié 

L’ex-ministre de la Sécurité publique Stéphane Bergeron regrette d’avoir maintenu en poste Robert Lafrenière lorsque le Parti Québécois a pris le pouvoir en 2012. 

Celui qui signe la préface de Autopsie de l’enquête bidon UPAC raconte être allé faire une visite dans les bureaux de l’UPAC peu de temps après sa nomination comme ministre.

À l’époque, l’organisation était déjà rongée par « une atmosphère de méfiance, voire de rivalités », selon lui.

« Je n’avais guère confiance en [Robert Lafrenière] », écrit l’ex-ministre, qui raconte avoir décidé de ne pas lui montrer la porte afin d’éviter de bouleverser l’organisation au moment où la lutte à la corruption était une priorité du gouvernement.

Une décision dont il se « repent » aujourd’hui, écrivant avoir « peut-être eu tort » de maintenir le statu quo.

« Inconduite grave »

Robert Lafrenière est resté six ans de plus à la tête de l’UPAC. Dans l’intervalle, plusieurs controverses ont marqué son organisation, dont l’arrestation de la vice-première ministre Nathalie Normandeau au moment où était présenté le budget à l’Assemblée nationale. Il y a aussi eu l’arrestation du député Guy Ouellette « en contravention flagrante du privilège parlementaire », pour reprendre les mots de M. Bergeron.

L’enquête Serment du BEI, sur la façon dont étaient menées les enquêtes sous la gouverne de Robert Lafrenière, n’a à ce jour débouché sur aucune accusation formelle.

Toutefois, en décrétant un arrêt des procédures à l’endroit de Nathalie Normandeau en septembre 2020, le juge André Perreault de la Cour du Québec a mis en lumière « l’inconduite grave » de Lafrenière et de sa garde rapprochée.

Il a écrit que la haute direction de l’UPAC avait mis sur pied une « enquête bidon » qui ciblait des innocents et entraînait le système judiciaire sur de « fausses pistes ».

« Je n’ose même pas imaginer ce qui aurait pu se passer si le commissaire et ses sbires avaient déployé autant d’efforts et d’ingéniosité à traquer les véritables criminels qu’ils ne l’ont manifestement fait pour tenter d’imputer à d’autres leurs propres turpitudes », écrit Stéphane Bergeron, aujourd’hui député du Bloc Québécois.

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