Brandissant des drapeaux russes et criant des slogans à la gloire de Moscou, les manifestants ont affiché leur hostilité à la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et à la France. « Non à l’ingérence de la Cedeao », « France dégage », « Ensemble disons non à la France « , ou encore « Vive la coopération Russie-Burkina », pouvait-on entendre dans la foule rassemblée sur l’avenue menant à la présidence.
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La délégation de la Cedeao est arrivée ce mardi matin et devait se rendre à la présidence pour y rencontrer le nouvel homme fort du pays, le capitaine Ibrahim Traoré, selon une source officielle burkinabè. « Cette mission est une prise de contact avec les nouvelles autorités de la transition dans le cadre de l’accompagnement dont notre pays bénéficie » de la part de ses voisins ouest-africains, a déclaré dans un communiqué le capitaine Traoré, qui a renversé le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, lui-même arrivé au pouvoir lors d’un putsch en janvier dernier.
Appel à la retenue
Ibrahim Traoré en a profité pour prévenir les manifestants anti-Cedeao que « toute personne qui entreprendra des actes de nature à perturber le bon déroulement de la mission de la Cedeao se verra appliquer la rigueur de la loi ». Regrettant « la circulation de messages appelant à empêcher le bon déroulement de cette mission », il a renouvelé « son appel au calme » et « à la retenue ».
Avant la manifestation de mardi matin, de petits groupes avaient dressé dans la nuit des barrages dans le centre de Ouagadougou pour protester contre la venue de la délégation, et des messages appelant à entraver sa visite ont été publiés sur les réseaux sociaux. Pendant le week-end, des bâtiments diplomatiques et représentant des intérêts de la France avaient été pris à partie par des manifestants favorables au capitaine Traoré. Après s’être dans un premier temps opposé à sa destitution, le lieutenant-colonel Damiba avait fini par accepter de démissionner dimanche et de partir à Lomé.
En fin de semaine dernière, des manifestants qui réclamaient le départ de Damiba, accusé d’avoir été protégé par Paris, avaient déjà brandi des drapeaux russes, demandant un renforcement de la coopération militaire avec Moscou.
Des élections toujours prévues
La délégation de la Cedeao à Ouagadougou est conduite par la ministre bissau-guinéenne des Affaires étrangères, Suzi Carla Barbosa, dont le pays assure la présidence de l’organisation, et comprend notamment l’ancien président nigérien Mahamadou Issoufou, médiateur pour le Burkina Faso. Elle vient évaluer la situation après le départ de Damiba, à qui les putschistes reprochaient en particulier « la dégradation continue de la situation sécuritaire » dans un pays miné par la violence jihadiste et où les attaques contre civils et militaires se sont multipliées ces derniers mois.
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Depuis 2015, les attaques régulières de mouvements armés affiliés à Al-Qaïda et au groupe État islamique (EI) ont fait des milliers de morts et provoqué le déplacement de quelque deux millions de personnes. Le capitaine Traoré a promis de respecter les engagements pris par son prédécesseur à l’égard de la Cedeao sur l’organisation d’élections et un retour de civils au pouvoir au plus tard en juillet 2024.
Avec AFP