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Les TER, trains fantômes des Hauts-de-France

Les TER, trains fantômes des Hauts-de-France


C’est la France qui se lève tôt et arrive en retard, la France des trains à l’arrêt. Sur les écrans bleus des gares SNCF des Hauts-de-France, la deuxième plus grande région ferroviaire du pays (en nombre de voyageurs quotidiens), s’affichent des trains express régionaux (TER) qui n’existent plus parce qu’ils ont été annulés, la veille ou le jour même, faute de conducteurs, de contrôleurs ou de matériel. « Supprimé » ; « Supprimé » ; « Supprimé ».

Dans les gares d’Amiens, Arras, Béthune (Pas-de-Calais), Beauvais, Creil (Oise), Lille ou Hazebrouck (Nord), devenues salles des pas perdus, des heures envolées et des coups de téléphone rageurs pour prévenir des retards, la scène se répète, matin, midi et soir, dans une posologie qui épuise le corps social et dit combien le service public du train, celui des petites lignes et des trajets quotidiens, est fragile.

En attendant le train en direction d’Hazebrouck (Nord), sur le quai de la gare de Béthune (Pas-de-Calais), le 13 septembre 2022.

« Le progrès ne vaut que s’il est partagé par tous », promettait un slogan de la Société nationale des chemins de fer à la fin du XXe siècle, à l’époque où celle-ci brillait en misant toute sa communication et ses fonds sur les TGV.

Sur les huit premiers mois de l’année, 11 241 TER ont été supprimés au dernier moment dans les Hauts-de-France, selon les données collectées par Le Monde, contre 7 385 sur la même période en 2021 et 4 797 en 2019, avant le Covid-19. Une augmentation de 134 %, en trois ans, du nombre d’annulations : des Amiens-Paris, capables d’emporter un millier de voyageurs pour chaque trajet ; des Creil-Paris, remplis de femmes de ménage chargées de nettoyer les locaux des grandes entreprises parisiennes ; des Valenciennes-Lille bourrés de lycéens ; des Creil-Beauvais avec des employés et des ouvriers payés au smic ; des Lens-Arras ; des Calais-Lille.

La France aime se regarder dans le miroir des TGV ou des Airbus. Mais son visage se dessine aussi sur les écrans bleus des TER. Emprunter ces lignes, dans une région où l’extrême droite obtient des scores très élevés, c’est entendre un flot de critiques, entre résignation et colère froide, sentiment de relégation et de maltraitance, face aux annulations, aux retards et au manque de transparence.

Romée Gobert, psychologue de 63 ans, nous propose gentiment le siège à côté d’elle dans le « 7 h 04 Paris-Amiens », à bord d’une rame construite au milieu des années 1970 : « Vous partez bosser, vous n’êtes pas sûrs de rentrer chez vous, résume-t-elle. Vous ne pouvez plus jamais savoir à quelle heure vous arrivez quelque part. Je suis désespérée parce que, avec le réchauffement climatique, on marche à l’envers. »

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