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Les sciences de la vie et de l’environnement attirent les chercheuses africaines

Les sciences de la vie et de l’environnement attirent les chercheuses africaines


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Dans un laboratoire du Centre de recherche universitaire clinique de Bamako, au Mali, durant la pandémie de Covid-19 en mars 2020.

Elles sont déjà quelques-unes à avoir ouvert la voie. Telle Wangari Maathai, biologiste et militante écologiste kényane qui avait reçu le prix Nobel de la paix en 2004, ou Francisca Nneka Okeke, physicienne nigériane qui a figuré au classement des 100 Africains les plus influents du magazine New African. Leur place dans les laboratoires de recherche reste toutefois plus que modeste. Seulement 30 % des scientifiques en Afrique sont des femmes, et le continent lui-même pèse moins de 3 % dans l’effectif mondial des chercheurs.

Pour encourager les étudiantes engagées sur cette voie, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco), dont l’une des missions est de promouvoir l’accès à l’enseignement supérieur et de corriger les inégalités hommes-femmes, décerne chaque année avec la Fondation L’Oréal, le prix Jeunes Talents Afrique subsaharienne pour les femmes et la science à vingt chercheuses africaines, quinze doctorantes et cinq postdoctorantes, pour récompenser l’excellence de leurs travaux scientifiques.

« Le temps presse »

Pour sa treizième édition, 425 candidatures ont été sélectionnées par un jury présidé par le professeur Aggrey Ambali, directeur de la coopération technique et du financement des programmes au sein de l’Agence de développement de l’Union africaine (UA). Outre une dotation financière de 10 000 euros ou 15 000 euros destinée à leur permettre de matérialiser leurs projets, les lauréates reçoivent une formation pour les aider à encadrer des équipes et à diriger des projets dans un univers encore majoritairement masculin.

Asseoir sa légitimité dans le champ de la recherche lorsqu’on est une femme reste encore une « gageure » témoigne par exemple Lovasoa Rina Raharinaivo, doctorante en sciences de la vie et de l’environnement à Madagascar, et l’une des lauréates. Son projet de doctorat sur « la pollution plastique et ses alternatives à Madagascar », mené en trinôme à l’université de Tuléar, ville côtière du sud de la Grande Ile, vise à mettre au point la formule d’un film plastique à partir d’algues, en étudiant en parallèle sa biodégradabilité et sa rentabilité économique.

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« Tout le monde s’étonne de me voir faire d’aussi longues études alors que je suis une femme, même certains membres de ma propre famille », confie la chercheuse. Son projet pourrait néanmoins avoir rapidement des répercussions concrètes sur la communauté de pêcheurs de Tuléar, d’où elle-même est originaire. « Expliquer les solutions que je compte apporter auprès des villageois est plus facile dans ma branche que si je faisais, disons, de la physique quantique », plaisante-t-elle.

« Le temps presse pour réaliser la transition vers des sociétés plus vertes », titrait l’Unesco dans son rapport 2021 sur la science. Un constat partagé par ces lauréates qui, toutes, « expriment un fort intérêt pour les problématiques auxquelles est confronté leur environnement direct, et veulent y trouver des réponses concrètes », souligne Alexandra Palt, directrice générale de la Fondation L’Oréal. Sur l’ensemble des candidatures retenues cette année, 72 % relevaient du champ des sciences de la vie et de l’environnement. Et, parmi les futures lauréates, plus de la moitié d’entre elles ont investi ces questions.

« Nos futurs enfants »

Bibi Nausheen Jaffur étudie ainsi la production de biopolymères à partir de fibres végétales à l’île Maurice, la Tchadienne Assia Aboubakar Mahamat celle de matériaux de construction écologiques sur l’ensemble du continent. Trois jeunes chercheuses, Geraldin M. W. Lengai et Ruth Mwangi au Kenya, Adjata Kamara en Côte d’Ivoire, tentent respectivement de mettre au point un fongicide botanique pour les tomates et pommes de terre, des biopesticides contre la dégradation des tomates après la récolte et des biopesticides similaires contre la pourriture de l’igname. Citons encore deux doctorantes, Ange Cynthia Umuhire et Oluwatosin Ogundolie, qui travaillent sur la prédiction de la météo spatiale au Rwanda et celle des inondations au Nigeria, tandis que la Ghanéenne Winifred Ayinpogbilla Atiah, postdoctorante en sciences de la vie et de l’environnement, veut pouvoir prévoir les crues saisonnières.

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Pour introduire son travail, la Togolaise Mawulolo Yomo, doctorante en sciences de la vie et de l’environnement, choisit de prendre un exemple tangible : à Lomé, le goût de l’eau a changé. La faute à l’intrusion de l’eau de mer dans le bassin sédimentaire côtier du Togo, associée au pompage anarchique des aquifères. Ce qui n’est bien sûr pas qu’une affaire de goût : la quantité de sel dans l’eau consommée provoque des problèmes d’hypertension chez les populations côtières, tandis qu’utiliser une eau salée pour l’irrigation fait baisser les rendements agricoles. « La salinité de l’eau est un problème général, met en garde Mawulolo Yomo, pour les écosystèmes, pour la santé publique, pour l’agriculture, et même pour l’industrie. »

Mais elle peine, elle aussi, à être écoutée. « Quand on part sur le terrain, j’ai souvent droit aux mêmes quolibets : “C’est un travail épuisant, c’est dur pour les femmes, trouve-toi plutôt un homme qui t’épousera et s’occupera de toi.” » Alors à ceux qui lui disent de se soucier d’abord de fonder une famille, elle renvoie la balle : « Oui, le mariage fait partie de mes plans. Mais nos futurs enfants, il faudra bien qu’ils aient accès à l’eau potable, non ?  »

Dossier réalisé en partenariat avec la Fondation L’Oréal.

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