Longtemps, les partisans d’Emmanuel Macron se sont couchés de bonne humeur. Se délectant du délitement des oppositions, accueillant les ralliements venus de la droite et de la gauche, mesurant l’ébranlement des vieux partis. « La poutre travaille encore, laissons-la travailler », avait résumé Edouard Philippe, à l’automne 2017. Au mois de juin, à l’issue des élections législatives, c’est l’édifice du camp présidentiel qui a été percuté. Depuis, l’heure est à la restauration.
Autrefois bloc disparate mais uni dans une admiration du chef de l’Etat, parfois tiraillé par quelques débats mais jamais pris en défaut face à l’adversité, le « macronisme » mue. Moins vertical, plus diffus. La perte de la majorité absolue à l’Assemblée nationale a redéfini sa géographie et instillé une dose de liberté à tous les étages. Au front dans l’Hémicycle, les députés s’autonomisent. Les ministres lancent des pistes. Matignon pousse ses pions. Et l’Elysée avance, sans être tout le temps suivi. « Le centre d’équilibre du pouvoir s’est déplacé vers l’Assemblée nationale, c’est indéniable. Tout le monde a plus de latitude, les ministres, les parlementaires, analyse David Amiel, député Renaissance (ex-La République en marche, LRM) de Paris. Emmanuel Macron a pris acte de cet état de fait. On peut lui faire un procès en effacement, mais s’il intervenait tout le temps, on dirait qu’il n’a pas pris en compte la situation politique. »
Le président de la République n’a pas disparu, loin de là. En une prise de parole devant l’Association de la presse présidentielle, lundi 12 septembre, il a relancé la réforme des retraites. Mais il rencontre plus de résistance en interne. Son idée de faire voter ce texte dès la fin de l’année, en l’intégrant au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), a été très fraîchement accueillie par le patron du MoDem, François Bayrou, le délégué général de LRM, Stanislas Guerini, et le président d’Horizons, Edouard Philippe. Son Conseil national de la refondation, lancé dans la douleur, le 8 septembre, a été défendu très mollement par la majorité. Et d’autres débats lui échappent.
Car l’un des faits marquants de ce début de quinquennat est que l’agenda n’est plus seulement dicté par le haut de la pyramide. Certains ministres arrivent à imposer le tempo. Gérald Darmanin (intérieur) et Bruno Le Maire (économie) ont occupé l’espace médiatique tout l’été. Sans consulter Matignon ou l’Elysée, le ministre délégué en charge des transports, Clément Beaune, a proposé de réguler les jets privés. Emmanuel Macron l’a recadré lors du conseil des ministres de rentrée, le 24 août. Ce qui n’a pas empêché M. Beaune de réitérer devant les micros de France 2, le lendemain : « On peut réfléchir à des systèmes. » Malgré l’opposition de Bercy et la fin de non-recevoir élyséenne, ce buzz, selon certains ministres, n’est toujours pas clos.
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