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Le gouvernement ne veut pas utiliser plus fortement les taxes sur les paris sportifs pour financer le sport

Le gouvernement ne veut pas utiliser plus fortement les taxes sur les paris sportifs pour financer le sport


La ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, à l’Elysée, à Paris, le 2 novembre 2022.

« Le sport doit financer le sport » : la formule est du sénateur Michel Savin (Les Républicains, LR). Elle est partagée par un certain nombre de parlementaires – de gauche, de droite ou du centre – qui ont exprimé cette revendication en direction du gouvernement à plusieurs reprises ces dernières semaines, lors des discussions sur le projet de loi de finances pour 2023.

L’idée est de rediriger une part plus grande, voire l’intégralité, des taxes prélevées par l’Etat sur les recettes des jeux et, surtout, sur les recettes des paris sportifs en ligne vers l’Agence nationale du sport (ANS), la structure chargée de la mise en œuvre des politiques publiques sportives. « Il faut agir sur [le montant des sommes issues] de ces taxes », a plaidé le sénateur (Union des démocrates et indépendants) Claude Kern lors de l’examen en séance publique des crédits de la « mission sport », vendredi 25 novembre.

Quelques semaines plus tôt, la députée (Parti socialiste, PS) Claudia Rouaux, rapporteuse sur cette « mission sport », avait chiffré à « 100 millions d’euros » l’enveloppe supplémentaire à « dégager pour le monde sportif » sur les prélèvements effectués par l’Etat sur les jeux et les paris sportifs. « Ces nouveaux moyens permettraient de soutenir davantage le développement du sport amateur, via des financements supplémentaires pour la construction et la rénovation énergétique des équipements sportifs », avait-elle avancé.

Financement du budget général de l’Etat

Le budget de l’ANS est déjà alimenté – entre autres – par ces « taxes affectées », comme on les appelle. Mais l’Agence ne touche qu’une petite partie des sommes prélevées par l’Etat sur les jeux exploités par la FDJ (hors paris sportifs) et sur les paris sportifs (exploités par la FDJ et différents opérateurs agréés). Ces taxes servent surtout à financer le budget général de l’Etat, et donc d’autres postes que le sport.

Lire aussi : Budget 2023 : une légère augmentation pour les sports

En 2023, les montants des taxes sur les jeux et sur les paris sportifs dévolus à l’ANS resteront ainsi stables à respectivement 71,8 millions et 34,6 millions d’euros. Dans le même temps, 147,1 millions d’euros issus de la taxe sur les paris sportifs et 174,2 millions d’euros issus de la taxe sur les jeux irrigueront le budget général de l’Etat, soit une nette hausse par rapport aux 76,7 millions et 162,6 millions en 2022.

Si c’est avant tout sur les sommes prélevées par l’Etat sur les paris en ligne sportifs que se concentrent les demandes d’un changement d’affectation, c’est que « les mises des paris sportifs en ligne ont augmenté de 44 % en un an et de 200 % en cinq ans », souligne le sénateur (PS) Jean-Jacques Lozach, rapporteur sur les crédits de la « mission sport ». Or, ajoute-t-il, ces paris sportifs « n’existeraient pas sans leur support, c’est-à-dire le sport, qui n’existerait pas sans le bénévolat ».

Contrecoup de l’affaire Mediapro

L’« invitation » à flécher plus largement ou totalement vers l’ANS les taxes prélevées sur les paris sportifs est aussi – voire surtout – motivée par le fait que la « taxe Buffet » (du nom de l’ancienne ministre des sports qui l’avait instituée) ne rapporte plus autant qu’escompté. Prélevée sur les droits de diffusion audiovisuelle, essentiellement ceux du football, son rendement a subi le contrecoup de la chute du diffuseur Mediapro, qui a conduit à une réduction de près de moitié des sommes versées au football.

Pour combler le manque à gagner (14,4 millions d’euros), le gouvernement a décidé de procéder à des transferts de dotations budgétaires. Ce procédé inquiète les parlementaires. Michel Savin y voit « un risque » pour la stabilité de l’ANS, « dans la mesure où tout dépend du bon vouloir du gouvernement, créant un décalage entre les missions et les moyens » de l’Agence. Dans un rapport publié en septembre, la Cour des comptes a relevé « que le budget de l’ANS, en 2022, était alimenté pour l’essentiel par des ressources publiques non pérennes », rappelle quant à lui le député (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) Stéphane Lenormand.

Lire aussi : La Cour des comptes appelle l’Agence nationale du sport à des « clarifications »

Si Claudia Rouaux dit ne pas souhaiter « remettre en cause le caractère dual du financement de l’ANS » – dotation budgétaire de l’Etat et ressources provenant des taxes affectées –, les craintes des parlementaires de voir l’Agence ballottée au gré des arbitrages budgétaires sont d’autant plus fortes que la trajectoire tracée par le gouvernement pour les trois ans qui viennent les inquiète : les crédits consacrés au sport (hors Jeux olympiques et paralympiques) devraient enregistrer une baisse de 20 % entre 2023 et 2025.

Rejet au Sénat

L’appel des parlementaires à relever les montants de la taxe sur les paris sportifs destinés à l’ANS ou à les affecter intégralement à cette dernière est toutefois resté sans effet. Le gouvernement a rejeté, vendredi, cette demande au Sénat, comme il l’avait déjà fait une première fois lors de l’examen, jeudi, de la première partie du projet de loi de finances, portant sur les recettes de l’Etat.

Lire aussi : JO 2024 : les élus locaux redoutent une « gueule de bois » postolympique pour le sport

« Nous regrettons votre obstination à ne pas vouloir que le sport finance le sport », a lancé Claude Kern à la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra. Lors de son audition au Sénat, le 2 novembre, cette dernière avait toutefois déclaré à propos des sommes prélevées par l’Etat sur les jeux et les paris sportifs en ligne : « Nous réfléchissons pour savoir comment bénéficier d’une partie de ce dynamisme. »

Pour ce qui la concerne, l’Association nationale des élus en charge du sport dans les communes n’entend pas lâcher l’affaire. « Nous allons travailler sur ce sujet du déplafonnement des taxes affectées », prévient son secrétaire général, Vincent Saulnier, pointant notamment les besoins de financement d’équipements sportifs structurants (stades, gymnases, piscines…).

Les trois sources de financements de l’ANS

En 2023, les ressources de l’Agence nationale du sport (ANS) devraient s’élever à 468,02 millions d’euros, contre 489,3 millions d’euros en 2022, selon le rapport de la députée socialiste Claudia Rouaux, rapporteuse au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale sur les crédits sports du projet de budget pour 2023.

Ces ressources ont trois origines :

  • Le « programme 219 » : dans le langage budgétaire, cela recouvre les dépenses de l’Etat relatives aux politiques sportives : développement de la pratique sportive pour tous sur l’ensemble du territoire, soutien au sport de haut niveau, promotion de l’éthique et de l’intégrité dans le sport, promotion des métiers du sport. En 2023, cela représentera 264,67 millions d’euros.
  • La « fiscalité affectée » : ce sont trois taxes affectées dont les montants sont plafonnés en lois de finances, à savoir le prélèvement sur les paris sportifs en ligne de la Française des jeux (FDJ) et des nouveaux opérateurs agréés, le prélèvement sur les jeux exploités par la FDJ hors paris sportifs et la « taxe Buffet », prélevée sur les droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives. En 2023, ces trois taxes affectées devraient apporter 166,1 millions d’euros à l’ANS.
  • Des ressources fléchées sur des actions ciblées : ce sont par exemple les crédits destinés au financement du programme de rénovation énergétique des équipements sportifs. En 2023, cela représentera 37,5 millions d’euros.

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