La pandémie a joué un rôle de révélateur des faiblesses et des insuffisances du capitalisme dans différents pays. En France, elle a mis entre autres en lumière un écosystème de recherche et développement (R&D) devenu inadapté. Notre décrochage en matière d’innovation a largement contribué à notre perte de compétitivité, avec des déficits chroniques de notre balance commerciale et des pertes de parts de marché depuis vingt ans.
De fait, la France, considérée comme la 7e puissance mondiale au regard de son produit intérieur brut (PIB), ne se positionne qu’à la 13e place en ce qui concerne la part allouée aux dépenses intérieures brutes en R&D : elle est notamment devancée par la Corée du Sud (4,8 %), les Etats-Unis (3,4 %) et le Japon (3,3 %). Au sein de l’Union européenne, elle est devancée par les pays scandinaves, Suède en tête, et par son voisin allemand (3,1 %).
La France souffre de deux principaux écueils : la faiblesse des financements alloués aux chercheurs et la faiblesse de leur rémunération. La dépense de R&D financée par l’Etat est comparable aux Etats-Unis et en France (0,7 % du PIB), et légèrement plus élevée en Allemagne (0,9 %). Mais ce qui fait la force des Etats-Unis, ce sont tous les autres financements alloués à la recherche fondamentale par des agences publiques (National Science Foundation, National Institute of Health, NASA, Defense Advanced Research Projects Agency…) et des institutions de mécénat. Les trois plus grandes de ces institutions disposaient d’un budget de 78 milliards d’euros pour la recherche en 2022, contre 11 milliards en France pour l’ensemble des grands opérateurs de recherche. Enfin, d’après l’Economic Research Institute, un professeur d’université gagnerait 45 % de plus que le salaire moyen en France, contre 63 % en Allemagne et 77 % aux Etats-Unis. Cela se traduit par une moindre attractivité des métiers de la recherche et un exode des cerveaux.
Du côté de la R&D privée, la part des entreprises réalisant de la R&D est faible en France : elles ne sont que 25 000 sur plus de 4 millions d’entreprises. Sur les vingt dernières années, le poids des groupes français a baissé d’un tiers dans le classement mondial des plus grands investisseurs privés en R&D. Parmi les 20 premiers, on compte 10 entreprises américaines, 4 allemandes et… aucune française. Ce recul repose surtout sur l’absence de nouveaux innovateurs français ; la France se prive ainsi de nouvelles entreprises « disruptives », celles qui sont les plus dynamiques en matière d’emploi et de croissance.
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