Les salariés abandonnant leur poste pourraient être privés d’allocations-chômage. L’Assemblée nationale a voté en ce sens, mercredi 5 octobre, en première lecture, des amendements portés par les députés de la majorité et de droite, dans le cadre de l’examen du projet de loi de réforme de l’assurance-chômage.
Malgré les critiques de la gauche, les amendements, qui précisent que « le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure à cette fin (…) est présumé démissionnaire », ont été largement adoptés, par 219 voix contre 68.
Mesure défendue par la majorité et Les Républicains
Actuellement, les salariés qui ne viennent plus travailler sans justification et qui finissent par être licenciés peuvent bénéficier de l’assurance-chômage. Un licenciement pour abandon de poste constitue en effet un licenciement pour faute grave : il ne prive donc pas la personne licenciée de son droit à bénéficier de cette protection, quand bien même l’abandon de poste est « volontaire ».
Mercredi, le gouvernement, par la voix de la ministre déléguée Carole Grandjean, s’est dit favorable à une réforme en la matière, qualifiant les abandons de poste de « phénomène en augmentation constante ». Le député de la majorité Dominique Da Silva a argué que les abandons de poste désorganisaient les entreprises et qu’il s’agissait de prévoir une mesure « claire et juste » pour chacun.
La droite développe un argumentaire similaire. « Nous ne privons les salariés d’aucun droit. Ils ont toujours la possibilité d’un recours » devant le conseil de prud’hommes, a ainsi fait valoir Jean-Louis Thiériot, député Les Républicains (LR), pour appuyer la position de son parti. Il en a profité pour critiquer chez certains élus de gauche « le choix du droit à la paresse », en référence à la récente affirmation de la députée écologiste Sandrine Rousseau sur Franceinfo, décriée par le camp présidentiel et la droite, et qui a relancé le débat à gauche.
La gauche pointe la dégradation des conditions de travail
Lors de débats houleux dans l’Hémicycle, la gauche s’est inscrite en faux sur ce phénomène, évoquant des cas « marginaux » et plaidant pour ne pas « affaiblir la protection des salariés », sur la même ligne qu’une partie des syndicats de salariés.
« Quelle est la cause de ces abandons de poste ? », a questionné le communiste Pierre Dharréville, suggérant un lien avec des conditions de travail qui se dégradent pour un nombre croissant d’employés.
Les socialistes ont assuré que la mesure adoptée était inconstitutionnelle et non compatible avec les normes de l’Organisation internationale du travail.
Lors des discussions, un amendement porté par Marine Le Pen (Rassemblement national) a, en revanche, été rejeté : il prévoyait que soit considéré comme une démission le refus d’accepter un contrat à durée indéterminée (CDI) à la fin d’un contrat à durée déterminée (CDD). « Il y a une partie des gens qui fraudent » en alternant CDD et allocations-chômage, et en refusant des CDI, a prétexté la présidente du groupe d’extrême droite.
Mais le sujet n’est pas clos. Le camp présidentiel s’est en effet aussi intéressé au sujet : des amendements prévoyant la même mesure, applicable après trois refus de CDI, avaient même été déposés par des députés Horizons et MoDem. Mais ils ont été retirés par leurs auteurs, à la demande du gouvernement, qui souhaite retravailler la disposition. En réaction, Mme Le Pen a dénoncé les « pudeurs de vierge du gouvernement ».