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la proposition du député « insoumis » Aymeric Caron divise sur les bancs de l’Assemblée

la proposition du député « insoumis » Aymeric Caron divise sur les bancs de l’Assemblée


C’est une proposition de loi qui risque d’électriser à nouveau les bancs de l’Assembée nationale. La commission des lois de l’Assemblée a rejeté, mercredi 16 novembre, la proposition de loi visant à interdire la pratique de la corrida portée par le militant antispéciste et député « insoumis » de Paris Aymeric Caron.

Le texte porté par l’ex-journaliste vise à modifier l’article 521-1 du code pénal, qui punit déjà la maltraitance animale, pour y inclure les courses de taureaux. Pratiquées et autorisées uniquement dans le Midi de la France, ces dernières font exception à la loi, puisque les règles ne leur sont pas applicables « lorsqu’une tradition locale ininterrompue peut être invoquée ».

Cosignée par plus de quatre-vingts élus des groupes La France insoumise (LFI) et écologiste, la proposition de loi doit maintenant être examinée dans l’Hémicycle à l’occasion de la journée d’initiative parlementaire « insoumise », jeudi 24 novembre. Les chances de la voir adoptée en première lecture sont minces, mais existent, tant la question divise l’ensemble des députés.

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La Nupes divisée : le PS et le PCF majoritairement défavorables

La tauromachie est sujette depuis longtemps au débat à gauche. Si les élus d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) – qui ont tenté sans succès de faire interdire la pratique en 2013 à l’Assemblée nationale, puis en 2021 au Sénat – et ceux de LFI s’accordent dans leur volonté d’interdiction, la partition n’est pas la même du côté du Parti socialiste (PS) et du Parti communiste français (PCF).

Voilà longtemps que ces deux partis très implantés défendent la corrida, qui fait, selon eux, partie intégrante de l’identité des territoires. Dans l’accord conclu par la Nupes pour les législatives, la proposition figurait ainsi parmi celles qui étaient remises « à la sagesse de l’Assemblée ». Il y est clairement stipulé que « le PS et le PCF ne soutiendront pas les propositions relatives à la chasse et à la corrida ».

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A l’approche d’un vote sensible, qui « interroge l’éthique et la relation à l’animal de chacun », les communistes du groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR) voteront en majorité contre le texte, mais laisseront « une liberté de vote » aux quelques députés qui y sont favorables, a fait savoir au Monde son président, le député du Puy-de-Dôme André Chassaigne. Au sein du groupe socialiste divisé sur la question, les voix devraient, elles, se partager entre abstention et vote contre, avance un député.

La droite votera contre

La droite, qui compte 62 élus à l’Assemblée, partage une position plus unanime sur le sujet. « On est assez nombreux » à « dire notre attachement à cette tradition taurine », a fait savoir auprès de l’Agence France-Presse le président du groupe Les Républicains (LR), Olivier Marleix.

En commission des lois mercredi, la députée du Maine-et-Loire Anne-Laure Blin, qui défendait la position de son groupe, a affirmé que « le groupe LR votera[it] contre cette proposition de loi », qui s’attaque à « une culture populaire » et « tradition fédératrice ».

Dans leurs rangs, l’un des prétendants à la présidence des Républicains (LR), le député du Lot Aurélien Pradié, s’était notamment emparé du sujet lors de la campagne des régionales 2021, où il était le candidat en Occitanie, terre de tauromachie. L’élu de 36 ans affirmait alors dans les colonnes de Midi libre : « Je me battrai pour que la corrida soit préservée. »

Le député Eric Pauget (LR), élu des Alpes-Maritimes, s’était toutefois fait remarquer pour sa position singulière en faveur de l’interdiction de la pratique, à l’occasion des débats sur la loi pour lutter contre la maltraitance animale, en 2021. Il déclarait dans Le Journal du dimanche : « On laisserait perdurer le spectacle du taureau qui se fait torturer dans des conditions de barbarie totale et qui se fait tuer à la fin ? (…) ça me choque. »

Au RN, une fracture entre animalistes et élus du Sud

Du côté de l’extrême droite, Marine Le Pen est connue pour être une fervente défenseuse de la condition animale. Cheffe de file des députés du Rasssemblement national (RN) depuis juin, elle s’était prononcée lors de la campagne présidentielle en faveur de l’interdiction de la corrida aux mineurs, mais sans appeler à une interdiction totale.

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Au micro de BFM-TV mercredi, elle a réaffirmé cette position en faisant savoir qu’elle ne voterait pas le texte de M. Caron. Selon elle, « il s’agit de traditions régionales qu’il faut conserver » et « l’urgence » en matière de protection animale est plutôt d’interdire « l’abattage sans étourdissement ».

Cette ligne de crête tenue par Mme Le Pen s’explique par le fait que son groupe est lui aussi divisé sur la question. Parmi les 89 députés RN, les quatre députés RN du Gard – Yoann Gillet, Nicolas Meizonnet, Pascale Bordes et Pierre Meurin – ont notamment fait savoir, par voie de presse locale, qu’ils s’opposeraient avec ferveur au texte porté par le militant antispéciste. Il en va de même pour Emmanuel Taché de la Pagerie, député de la 16e circonscription des Bouches-du-Rhône (Arles), fervent défenseur de la tauromachie.

A l’inverse, des députés tels que Julien Odoul, élu dans l’Yonne et militant de la Ligue des animaux, ou encore la députée de la Marne Anne-Sophie Frigout souhaitent voir la pratique interdite. Le premier affirmait sur CNews en août que « le spectacle de la souffrance animale n’a plus sa place en France en 2022 ».

Le gouvernement s’y oppose, mais la majorité est tiraillée

Sans surprise, le gouvernement a fait savoir en début de semaine qu’il se positionnerait contre le texte porté par M. Caron. « La question n’est pas d’être aficionados (…) Ça fait partie des traditions » culturelles locales, avait argué le ministre l’agriculture, Marc Fesneau, le 8 novembre sur Public Sénat. La tauromachie « n’est pas la priorité des priorités », a abondé le ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, le 15 novembre sur Franceinfo.

C’est la secrétaire d’Etat chargée de la ruralité, Dominique Faure, qui sera sur le banc des ministres le 24 novembre pour défendre cette position, plutôt que le garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, fervent défenseur de la corrida, un temps pressenti pour le faire.

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Mais au sein de la majorité, la question de l’interdiction de la corrida embarrasse là encore. En réunion de groupe, les députés Renaissance ont donc décidé mardi d’une liberté de vote sur ce texte, mais d’une position commune pour condamner la posture jugée radicale du député « insoumis » sur la question.

La présidente du groupe, la députée des Yvelines Aurore Bergé, se positionne du côté des anticorrida. Alors qu’elle n’était pas encore cheffe de file des macronistes, elle avait signé en juillet 2021 une tribune en faveur de l’interdiction de la pratique. Une position partagée, en outre, par le vice-président du groupe, le député de Paris Sylvain Maillard.

Des députés du Sud, comme Patrick Vignal, élu dans l’Hérault, ou encore le député du Gers Jean-René Cazeneuve, s’opposent, eux, à toute interdiction, tentant de convaincre leurs collègues indécis de faire de même. « Ça va disparaître tout seul, il y en a de moins en moins. Ça ne sert à rien de l’interdire et d’humilier des gens pour qui ce sont des traditions », a argumenté ce dernier auprès de l’Agence France-Presse.

Les trente députés du groupe Horizons ont, eux, tranché en réunion de groupe mardi pour un vote contre le texte quand les députés du MoDem du groupe Démocrates « voteront très majoritairement contre cette proposition de loi », qui « s’attaque en vérité à notre patrimoine culturel, à notre identité », a défendu la députée des Pyrénées-Atlantiques Florence Lasserre en commission mercredi.

En attendant le ferraillage dans l’Hémicycle, le débat se poursuit dans la rue ce week-end. Des mobilisations sont prévues dans les villes taurines contre l’interdiction, tout comme des actions des associations de protection animale en faveur de la proposition d’Aymeric Caron.

Reste encore à savoir si l’Assemblée aura le temps d’examiner le texte en séance lors de la très chargée journée de « niche » parlementaire de LFI, où il figure en quatrième position sur douze textes présentés.



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