« Le pacte de stabilité est stupide », affirmait, en octobre 2002, Romano Prodi, alors président de la Commission européenne. C’était il y a vingt ans. Depuis, les crises se sont succédé, le cadre budgétaire communautaire a été amendé, mais sa philosophie n’a pas été substantiellement modifiée, alors que la question de sa pertinence et de son efficacité reste entière.
Mercredi 9 novembre, la Commission a présenté les grandes lignes de ce qui pourrait être une réforme en profondeur de ce texte en vertu duquel le déficit public ne doit pas dépasser 3 % du produit intérieur brut (PIB), quand la dette doit rester contenue à moins de 60 % de la richesse nationale, et qui encadre les finances publiques des Etats membres depuis 1997.
A l’époque, il avait vocation à faire converger les politiques budgétaires au sein de la future zone euro pour préparer l’arrivée de la monnaie unique. Depuis, l’union monétaire a vu le jour, elle s’est agrandie et a survécu à bien des remous, mais le pacte de stabilité et de croissance n’a assuré aux Vingt-Sept ni un niveau de dette soutenable, ni une activité économique soutenue. « Nous n’avons pas investi comme nous l’aurions dû, [et] le désendettement a échoué », constate le commissaire à l’économie, Paolo Gentiloni.
Objectifs irréalistes
D’une grande complexité, assorti de sanctions très lourdes et donc peu crédibles, porteur d’objectifs irréalistes, le pacte de stabilité n’a pas fait ses preuves. La crise liée au Covid-19 et la guerre en Ukraine, qui ont vu les Vingt-Sept multiplier leurs dépenses pour aider les citoyens et les entreprises à faire face, ont achevé de le démonétiser : il est suspendu depuis mars 2020 et en principe jusqu’à la fin de 2023.
Fin 2021, la dette au sein de l’Union européenne (UE) représentait, en moyenne, 88 % du PIB – quatorze pays étaient au-dessus des 60 %, dont la France (113 %) et l’Allemagne –, et ce ratio allait de 17,6 % en Estonie à 194,5 % en Grèce. La situation n’est pas en passe de s’améliorer : sur fond de guerre en Ukraine et de flambée des prix de l’énergie, les Vingt-Sept vont également devoir, s’ils ne veulent pas être durablement relégués derrière les Etats-Unis et la Chine, investir massivement dans les transitions écologique et numérique.
Vingt-cinq ans après la naissance du pacte de stabilité, il y a aujourd’hui un consensus en Europe pour le faire évoluer. L’exécutif communautaire pense possible de trouver une voie afin que la gouvernance économique européenne s’améliore, même si les règles totémiques des 3 % et 60 %, inscrites dans les traités, ne sont pas destinées à disparaître. « La stabilité financière et la croissance ne peuvent qu’aller main dans la main », commente Paolo Gentiloni.
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